1.3.2.1. Eléments de contexte

A partir du milieu des années 1970, la recherche sur la planification urbaine amorce plusieurs évolutions. Ebranlée par l’effondrement des référentiels marxistes et structuralistes 122 , la recherche urbaine s’oriente vers l’objet « local », analyse les rites de la vie quotidienne, et poursuit l’examen de la décentralisation et des transformations des relations entre l’Etat et les collectivités locales. Dans le même temps, les SDAU ne semblent plus d’actualité.

Déjà difficiles à concevoir, et surtout à faire approuver, ils perdent de leur intérêt dans un contexte marqué par la récession économique et urbaine, et par le poids déterminant pris par l’urbanisme opérationnel (Zones d’Aménagement Concerté, Opération Publique d’Amélioration de l’Habitat, etc.). L’Etat, qui a engagé un processus de décentralisation, élabore par ailleurs de nouveaux dispositifs pour gérer ses relations avec les collectivités locales. Avec les contrats « villes moyennes », il abandonne progressivement le système des subventions et le remplace par un contrat global avec les collectivités locales, négocié sur des objectifs. De fait, la scène politique ou le lieu de négociation que constituait le SDAU sont progressivement désaffectés.

A cela s’ajoutent dès le milieu des années 1980, le redémarrage de l’activité économique et la reprise de l’urbanisation dans les grandes agglomérations urbaines. Les collectivités locales et leurs élus « managers » tentent dès lors de favoriser tous les moyens susceptibles d’améliorer leur position dans la concurrence interurbaine, soit à l’échelle de leur agglomération, soit à l’échelle nationale voire internationale. Ces éléments ne sont évidemment pas favorables à la planification urbaine et encouragent plutôt la multiplication des modifications apportées aux POS et le recours de plus en plus systématique à la procédure de la ZAC.

Dans un tel contexte, la recherche urbaine s’oriente progressivement vers l’analyse des politiques urbaines. Ce glissement des chercheurs sur les politiques urbaines est, nous semble-t-il, fortement influencé par l’approche des politiques publiques. Sous le couvert de la modernisation de l’administration, la théorie de l’acteur et des élus « managers », dans le sens de la valorisation de leur capacité d’action, est par la suite dominante. Les raisons sont à rechercher dans l’engouement pour l’initiative individuelle, les idées libérales, l’attraction du marché et la concurrence, et le fractionnement du champ social.

Notes
122.

A peine deux ans après le colloque de Dieppe, la mission de la recherche urbaine organise un nouveau colloque sur la planification urbaine, intitulé « Prendre la ville ». Mais son orientation est bien différente du précédent.
Il privilégie en effet la confrontation entre les courants marxistes de la sociologie urbaine qui avaient dominé le colloque de Dieppe, et des chercheurs qui critiquent ces approches et privilégient les analyses en termes de pouvoir, de domination et de désir. Les hauts fonctionnaires praticiens de l’urbanisme ne sont d’ailleurs pas conviés pour participer aux débats. Voir à cet égard, Actes du colloque de Saint-Etienne en Devolluy sur la planification urbaine, Prendre la ville, esquisse d’une histoire de l’urbanisme d’état, Paris, éd. Anthropos, 1977, 484 p.