Bien que le temps ne soit pas considéré comme une ressource en soi par certains auteurs, nous l’avons inscrit dans notre typologie des ressources tout en étant conscient de sa « volatilité » dans le domaine qui nous intéresse ici. Si l’on suit la leçon de F. Scherrer (1997, 2004) 359 , la ressource temporelle fait référence à tous les enjeux et problèmes de synchronisation internes à une politique publique 360 . Le bon déroulement de la mise en œuvre de toute démarche planificatrice repose notamment sur le principe de la synchronisation à moyen terme du jeu des acteurs ou à tout le moins la très forte réduction de leurs décalages temporels.
Notons par ailleurs que la distribution de cette « ressource temporelle » est généralement inégale entre les acteurs (les acteurs institutionnels disposant généralement de plus de temps que les représentants des groupes sociaux), ce qui peut engendrer de véritables conflits de mise en œuvre (par exemple, contraintes de coordination dans le temps). Dans le cas de la ville nouvelle, nous verrons que pour « gagner du temps » (cette ressource est en effet limitée elle aussi), l’Etat a acquis massivement des réserves foncières, ce qui permettait d’envisager la construction de la ville sur trois décennies tout au plus. D’une certaine manière, l’Etat a troqué ici de l’espace contre du temps.
A ce stade de l’analyse, il est important de souligner que le concept de ressource présenté ici nous permet de distinguer clairement les ressources des acteurs, des moyens d’action retenus pour l’élaboration et la mise en œuvre du SDAU et du projet de territoire.
SCHERRER F., « Désynchroniser, re-synchroniser l’action collective urbaine. Entre temps diégétique et temps incrémental : l’action collective urbaine dans la longue durée », in Rencontres de Gadagne, « Les rythmes urbains », Lyon, Musée Gadagne, 2004, pp. 39-47 ; SCHERRER F., « Temps décalés. Longue durée. Le prisme des infrastructures », in OBADIA A. (Coord.), Entreprendre la ville : nouvelles temporalités, nouveaux services, éd. de L’Aube, 1997, pp. 423-429.
Ainsi, les acteurs institutionnels et sociaux peuvent jouer sur le temps en indiquant qu’ils n’agiront que si
les autres acteurs concernés agissent préalablement, simultanément ou postérieurement.
C’est ainsi que le mode persuasif privilégiera les ressources cognitives et communicative.