Dérouler une histoire sous la forme de séquences

L’analyse empirique du SDAU de la ville nouvelle et du projet de territoire Nord-Isère a pour corollaire d’opter pour un mode narratif, même s’il faut reconnaître et assumer qu’il est impossible de circonscrire finement leur histoire. Par ailleurs, en s’inspirant de la méthodologie du récit proposée par L. Sfez (1992) 373 pour retracer le déroulement d’une décision et en l’adaptant à notre propre situation, nous procéderons au récit de la conception et de la mise en œuvre du SDAU et du projet de territoire sous la forme de séquences.

Ce mode présente trois intérêts majeurs.

  • Premièrement, l’idée de séquence offre un double avantage : d’une part, elle permet de nous dégager d’une perspective linéaire avec laquelle les événements et/ou actions s’enchaîneraient de manière séquentielle et causale (l’action A précède et explique l’action B) ; d’autre part, elle n’implique pas pour autant de « renoncer à exposer le cheminement des faits, à dégager des temps forts et des temps faibles » 374 .
  • Deuxièmement, la méthode des séquences permet de se dégager d’une perspective dans laquelle nous commencerions par énoncer des fins dont tout le reste découlerait ; elle admet et donc autorise (voir invite à) la prise en compte de la superposition des actions et décisions ; elle admet et autorise le caractère potentiellement dilué et fragmenté de l’élaboration des choix et des décisions ; elle reconnaît, avec les théories de l’action, que les acteurs poursuivent plusieurs fins, y compris simultanément ; elle ne cherche pas la cohérence logique des actions.
  • Troisièmement, ce procédé fonde les assises de la mise en œuvre finale d’une comparaison ; la démarche comparative étant indissociable d’une posture inductive, compréhensive et empirique. Il faut préciser que la comparaison n’a pas ici le statut d’objectif mais de moyen. Il ne s’agit pas en effet de fixer certaines variables (contextuelles par exemple) pour, ensuite, comparer le SDAU et le projet de territoire, mais d’identifier et de comparer des variables pour éclairer et reconstruire des logiques d’action.

Sur cette base, nous cherchons à retracer les cheminements temporels du SDAU et du projet de territoire en identifiant les séquences de leur déroulement, et nous analysons de manière privilégiée certaines séquences soit parce qu’elles sont particulièrement significatives des manières d’opérer, soit parce qu’elles illustrent avec plus d’acuité que d’autres les logiques d’action dominantes, soit parce qu’elles permettent de mieux saisir les problèmes et enjeux de la conception et de la mise en œuvre. Ainsi, dans le cas du SDAU de la ville nouvelle, les activités de conception et de mise en oeuvre seront particulièrement traitées au travers de l’histoire des périmètres (géographique et temporel) parce qu’ils cristallisent nombre de problèmes et de conflits.

Notes
373.

SFEZ L., Critique de la décision, Paris, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 1992 (4ème ed), 571 p.

374.

SFEZ L (1992), op. cit., p. 182.