4.1.1. Les prémices : l’élaboration du PADOG lyonnais, 1962-1965

Ce Plan Directeur n’a jamais été approuvé et les plans communaux élaborés en 1966-1969 pour les communes centrales n’ont avec lui qu’une filiation approximative. La raison en est que dès 1962, l’Etat a désiré que la planification des grandes agglomérations soit reconsidérée dans le contexte beaucoup plus large d’une région urbaine étendue. Alors que le découpage de la France en vingt-et-une régions date de 1956, l’idée d’organiser la « province » autour de quelques grandes métropoles apparaît en 1962 avec la mise en place de la politique de l’Aménagement du Territoire et de ses institutions (création de la DATAR, des préfectures de région en particulier). C’est dans cette optique qu’est entrepris en 1962, à l’initiative du Ministère de l’Equipement et de la préfecture du Rhône, l’étude d’un Plan d’Aménagement et d’Organisation Générale (PADOG) de la Région Urbaine de Lyon, à l’instar de ce qui avait été réalisé pour la région parisienne. Il s’applique à une région urbaine lyonnaise largement délimitée puisqu’elle comprend alors le Rhône, les arrondissements de Vienne et de La Tour-du-Pin dans l’Isère, de Bourg-en-Bresse dans l’Ain ainsi que les cantons d’Ambérieu, de Lagnieu et de Saint-Rambert-en-Bugey, soit au total 913 communes.

En 1964, le PADOG est étendu à la région stéphanoise par incorporation de l’arrondissement de Saint-Etienne et d’une partie de celui de Montbrison. L’avant-projet de plan d’aménagement 391 publié le 31 décembre 1965 s’inspire très directement des principes d’orientation du Commissariat au Plan retenu alors pour le Ve Plan. Il propose de limiter la croissance lyonnaise pour ne pas dépasser un seuil compris entre 1,5 et 1,7 millions d’habitants afin d’éviter une congestion prévisible, tout en conservant à Lyon les activités spécifiquement métropolitaines dans un centre bien aménagé et bien accessible.

Ce ralentissement de la croissance doit être obtenu par diverses mesures simultanées :

  • application de critères sélectifs pour les localisations des activités ;
  • instauration d’une « ceinture verte » pour s’opposer à une extension en tache d’huile, ou le long des grands axes de circulation ;
  • maîtrise de l’urbanisation périphérique qui s’effectue de manière anarchique et risque de rejoindre les villes périphériques par coalescence ;
  • concentration des développements urbains sur des axes privilégiés ;
  • création de villes nouvelles périphériques destinées à accueillir une partie de l’accroissement lyonnais.

Ce dernier point très conversé signifie que l’on renonce à la solution de la création d’un deuxième centre lyonnais localisé à Bron, mais repoussé en raison des préférences de l’Etat en faveur des villes nouvelles et de l’argument de la présence de l’aéroport dont le transfert n’était pas encore décidé.

Le PADOG prévoyait que ces villes nouvelles, pour ne pas être de simples satellites, devraient atteindre de 100 à 150 000 habitants et détenir d’importantes activités. Leur localisation devait-elle se faire à 15 km voire davantage par rapport à la banlieue lyonnaise et correspondre à la création d’entité « ex-nihilo » comme le recommandaient les services de l’Etat ? Sur le premier point, le schéma proposé a choisi de mettre des séparations importantes, mais sur le second, il a clairement indiqué que les villes nouvelles pourraient s’appuyer sur des villes déjà existantes. C’est ainsi qu’était proposée la création de quatre villes nouvelles :

  • dans la vallée de la Saône entre Villefranche et Belleville ;
  • sur le Haut-Rhône, entre Meximieux, Ambérieu et Lagnieu ;
  • sur l’axe Lyon-Chambéry entre Bourgoin et La Tour-du-Pin (c’est-à-dire plus à l’Est que L’Isle d’Abeau) ;
  • à l’aval de Lyon, sur le Rhône, entre Vienne et le Péage-de-Roussillon.

Ces propositions montrent clairement que les principales options qui seront développées après 1970 étaient déjà inscrites dans ce schéma. Le choix des conceptions de l’Etat apparaît primordial alors que les communes n’ont guère été consultées. De plus, l’élaboration a été marquée par l’intervention croissante des architectes-urbanistes qui ont formalisé les différentes hypothèses d’expansion urbaine 392 , donnant au document un aspect très « technique » mais privilégiant en l’occurrence les dimensions spatiales par le biais de croquis ou cartes. Par ailleurs, si le PADOG n’insiste guère encore sur la nécessité de doter Lyon de grands équipements pour accéder au rang de métropole, c’est que cette conception n’apparaît qu’en 1965, en tant que doctrine d’aménagement au niveau national, bien que dès 1962 la rénovation de La Part-Dieu s’infléchisse vers la réalisation d’un centre directionnel à vocation régionale. On peut aussi remarquer que la conception du développement lyonnais n’exclut pas alors les possibilités vers l’Ouest, le Nord et le Sud et que l’option « tout à l’Est » ne sera adoptée que plus tardivement.

Notes
391.

Le Plan d’Aménagement et d’Organisation Générale de la Région Urbaine de Lyon-Saint-Etienne.
Avant-projet
, Ministère de l’Equipement, DDE du Rhône, 31 décembre 1965.

392.

MEILLERAND M.-C., op. cit., pp. 118-122.; BONNEVILLE M., « Planification et développement urbain dans l’agglomération lyonnaise : essai d’évaluation pour la période 1968-1982 », Revue de Géographie de Lyon, 1982, n°2, pp. 93-115.