La modification du périmètre en 1984

La loi Rocard de 1983 permet notamment de réviser le périmètre d’urbanisation de la ville nouvelle. Comme en 1978, le projet de révision est élaboré à la suite de multiples négociations entre l’Administration et les communes intéressées. Les termes de la négociation sont d’ailleurs identiques et laissent le « dernier mot » à l’Etat. Selon l’article 4 de la loi, « sur la demande d’une ou plusieurs communes, ou s’il estime nécessaire, le représentant de l’Etat peut proposer le retrait d’une ou plusieurs communes en assortissant cette proposition des révisions territoriales rendues nécessaires par la poursuite de l’urbanisation et préalablement acceptées par les communes concernées ». Il en résulte pour les communes qui désirent se retirer de la ville nouvelle, d’abandonner la partie de leur territoire située dans la zone d’agglomération nouvelle, au sens de la législation antérieure (Loi Boscher).

Carte n°10 : Les modifications du périmètre d’agglomération nouvelle : le résultat d’un processus de négociation
Carte n°10 : Les modifications du périmètre d’agglomération nouvelle : le résultat d’un processus de négociation encadré

© EPIDA / S. Rabilloud / C. Balvay

Sur les quatre communes qui ont souhaité sortir de la ville nouvelle, seules les communes de Grenay, Saint-Alban-de-Roche et Roche ont pu se retirer, selon les modalités territoriales précédemment définies 551 . Quant à la demande de retrait de Four, elle est rejetée au motif que le conseil municipal a refusé de céder les terrains situés en Zone d’agglomération nouvelle. Pour l’Administration et conformément au SDAU, ces terrains constituent en effet la seule jonction possible entre les pôles urbains de l’Ouest (Villefontaine) et de l’Est (ZAC des « Trois Vallons »). La Loi Rocard propose par ailleurs aux communes limitrophes qui ne font pas, ou qui ne font plus partie de l’agglomération nouvelle, d’intégrer (ou de réintégrer) le Syndicat d’agglomération nouvelle. Malgré les propositions de l’Etat de créer une agglomération élargie avec Bourgoin-Jallieu, la commune refuse de retourner dans le dispositif ville nouvelle au motif de la préservation de l’autonomie communale.

Au final, le nouveau périmètre de la ville nouvelle englobe en totalité les territoires des communes de Villefontaine, Saint-Quentin-Fallavier, L’Isle d’Abeau, Vaulx-Milieu et Four (voir carte n°10, page précédente). Ce nouveau périmètre est voté par le comité syndical du SCANIDA et par les conseils municipaux selon la règle de la « majorité qualifiée ». Il est bien entendu que si les conditions de majorité ne sont pas respectées, la procédure, identique à celle utilisée en 1978, implique de valider le nouveau périmètre par un décret en Conseil d’Etat.

En conclusion, l’examen des stratégies de négociations sous-jacentes aux modifications du périmètre d’urbanisation de la ville nouvelle révèle :

  1. d’une part, l’incapacité du SDAU à organiser une véritable subsidiarité entre les questions relevant d’approches d’agglomération et celles plus locales. Au-delà des prises de position contre la ville nouvelle, sa mise en œuvre fait immanquablement resurgir des débats sur le partage des compétences entre l’EPCI (i.e. le SCANIDA ou le SAN) et les communes ;
  2. d’autre part, l’étonnante stabilité de la politique foncière de l’Etat, de l’étendue des compétences de l’EPIDA, et des grandes orientations du SDAU. Autrement dit, c’est un changement dans la continuité : il n’y a pas d’échange de ressources entre l’Administration et les collectivités locales, ni de transfert de compétences, et encore moins de modification des objectifs du SDAU. On trouve ici toutes les contradictions d’une situation insoluble pour la ville nouvelle : modifier le contenu du projet sans changer le contenantAinsi peut-on lire dans la lettre adressée par le Premier Ministre (R. Barre) au Président du SCANIDA (P. Mauroit) le 7 décembre 1977 : « La conjoncture économique et démographique nous conduit, dans les régions urbaines concernées, à des rythmes annuels de construction inférieurs à ceux qui avaient été envisagés. Il s’agit donc pour les villes nouvelles de tenir compte des réalités et, sans remettre en cause leurs schémas directeurs, ni leur part dans l’aménagement de ces régions urbaines, de redéfinir, en concertation avec les élus, leur rythme de réalisation au cours des toutes prochaines années. Celui-ci devra tenir compte du meilleur équilibre financier des budgets locaux et des opérations d’aménagement. Il permettra, sur la base des résultats déjà obtenus, de consacrer des efforts plus importants à la qualité de l’architecture et du cadre de vie urbain et de faire une place accrue à la maison individuelle »., autrement dit transformer en prototype d’un nouvel art de vivre un projet dont la mise en œuvre « technocratique » à partir de procédures exceptionnelles n’avait pour seule légitimation que les dimensions et la complexité d’un programme nécessaire à l’aménagement de l’agglomération lyonnaise.
Notes
551.

Grenay cède à Saint-Quentin-Fallavier les terrains situés principalement dans la zone industrielle de
« Chesnes Ouest » et au Nord de la RN 6 (130 hectares). A l’inverse Saint-Quentin-Fallavier cède à Grenay des terrains représentant 27,5 hectares situés au sud du territoire de Grenay. Saint-Alban-de-Roche cède à
L’Isle d’Abeau environ 180 hectares, dont la ZAC des « Trois-Vallons ». L’Isle d’Abeau récupère par ailleurs la ZAC « Saint-Hubert », cédée auparavant à Villefontaine à la suite de l’arrêté préfectoral du 19 juin 1981. Enfin, Roche cède près de 120 hectares à Villefontaine (ZAC des « Fougères »).