Il faut tout d’abord souligner que les élus ont participé à l’élaboration du projet de territoire, et ce dès les premières études. C’est là une différence majeure avec l’élaboration du SDAU de la ville nouvelle où ils n’ont été associés que pour se prononcer sur un document très élaboré de la MEAVN.
Mais cette participation ne signifie pas pour autant « co-production ». Le groupe de pilotage composé d’une quinzaine d’élus du SATIN 647 n’a pas coordonné et orienté l’ensemble de la démarche du projet de territoire. En réalité, leur participation à l’élaboration du projet s’est plutôt faite sur un mode passif. Différents paramètres permettent d’expliquer cette atonie.
une faible mobilisation des élus sans leadership, et une intercommunalité éclatée et faible
Le SATIN est certes une scène de dialogue entre les vingt-sept communes, mais il n’échappe pas aux nombreuses dissensions entre le SAN et les communes extérieures d’une part, et entre les communes urbaines et les communes rurales, d’autre part. La co-présidence du syndicat, de 1999 à 2001, entre les trois maires de Villefontaine (commune de ville nouvelle), de Bourgoin-Jallieu (ville-centre limitrophe du SAN) et de Domarin (commune rurale) n’est pas neutre de ce point de vue car elle neutralise les forces en présence. A partir de 2001, le président du SATIN est le maire de Villefontaine, mais il est assisté dans sa tâche par deux vice-présidents délégués 648 et vingt-deux vice-présidents 649 . La composition du groupe de pilotage du projet de territoire traduit clairement ces dissensions : les élus des cinq communes du SAN représentent près de la moitié des membres ; les communes urbaines (Bourgoin-Jallieu, L’Isle d’Abeau et Villefontaine) les deux tiers.
Dans ces circonstances, le groupe de pilotage a éprouvé de nombreuses difficultés à faire émerger des orientations fortes partagées. La fragilité du consensus politique interne a en effet davantage conduit à mettre en avant des enjeux communaux plutôt que d’agglomération, c’est-à-dire à ménager les souverainetés communales et les équilibres partisans 650 . Pour ces raisons, le projet de territoire Nord-Isère se trouve fortement déconnecté de tout fonctionnement d’intercommunalité. Il apparaît comme une démarche plus précautionneuse que volontariste et comme un exercice assez formel, ayant peu de prise sur les communes et visant essentiellement à organiser des stratégies communales défensives.
Sur ce point, nous verrons que le projet de territoire n’a pas réussi à établir un agenda ni une scène de négociation à l’échelle du SATIN. Les échanges se sont surtout joués entre communes et ont été davantage des conflits ou des consensus que des coopérations.
Ce groupe de pilotage s’est réuni environ une fois par mois de 2002 à 2003 pour orienter le travail technique.
Il est composé de :
cinq élus de Villefontaine (R. Feyssaguet, Maire et Président du SATIN, B. Laporte, G. Martin, F. Béal, M. Liénard),
trois élus de Bourgoin-Jallieu (A. Cottalorda, Maire et 1er Vice-Président du SATIN, A. Bonnamy et
L. Lavergne),
deux élus de L’Isle d’Abeau (M. Pierrel et C. Goglio),
deux élus de Saint-Chef (M. Fanget, Maire, et C. Chevanton-Debauge),
un élu de Domarin (J.-P. Augustin, Maire et 2ème Vice-Président du SATIN),
un élu de Nivolas-Vermelle (M. Rival, Maire),
un élu de Meyrié (E. Rey).
On retrouve les maires de Bourgoin-Jallieu et de Domarin.
Un par commune membre.
Le chapitre 4.4. du projet de territoire intitulé La mise en œuvre d’une organisation territoriale respectueuse des identités du Nord-Isère : « La ville archipel » est à cet égard particulièrement révélateur (Projet de territoire, (Version 10), pp. 34-37) : « Pour respecter l’architecture du territoire le projet de territoire réfute le schéma d’agglomération « classique » organisée autour d’une ville centre et privilégie un modèle en « archipel » reposant sur la mise en réseau de pôles principaux, lieux de concentration des activités de production ou des échanges marchands, jouissant d’une bonne accessibilité et d’un bon positionnement par rapport aux axes, et de pôles secondaires (les bourgs) destinés à irriguer le territoire dans sa profondeur. Ce modèle est jugé conforme aux identités et aux pratiques du territoire, et il présente des avantages certains en matière de respect des paysages, de diversification de l’offre de logement (permettant un parcours résidentiel), de répartition des fonctions urbaines d’agglomération (en s’appuyant sur les services et équipements existants et en les montant en gamme pour leur faire atteindre une échelle d’agglomération) » (p. 34). Ce projet d’organisation spatiale permet surtout de satisfaire toutes les communes, notamment en terme d’accueil et de développement des fonctions d’agglomération. L’image du réseau permet par ailleurs de limiter les conflits en matière d’attribution des fonctions urbaines dites « supérieures », dans la mesure où tous les pôles urbains sont désignés « tête de réseau » dans des domaines privilégiés ; chaque tête de réseau devant ensuite essaimer sur le reste du territoire non seulement en terme de décentralisation (activité hors les murs) mais aussi en terme d’appui et de mise à disposition de moyens et de ressources (« le pôle principal rayonne sur le territoire », p. 37). Pour les villages, « l’intérêt majeur réside dans l’organisation du territoire autour de plusieurs « toiles » thématiques, permettant à chacun de bénéficier des services en retombée des pôles majeurs » (p. 37). Le recours à l’image du réseau permet ainsi de coordonner les échelles communales en évitant ou en apaisant les conflits d’intérêts classiques entre les communes. Cela finit par placer les négociations essentiellement dans
la recherche de compromis territoriaux entre l’intercommunalité et les communes.