Une recherche en SIC

Le domaine des Sciences de l’information et de la communication nous offre dès lors un lieu théorique pertinent pour une telle problématique, en ce qu’il nous permet de poser la question du sens à propos des formes institutionnelles : s’interroger sur la communication revient à s’intéresser aux formes de représentation au moyen desquelles une réalité peut acquérir du sens. C’est donc dans cette perspective que nous chercherons à questionner les formes de représentation de l’idéal de l’émancipation dans des discours concernant l’Europe.

Nous envisageons ainsi l’analyse des composantes politiques de l’Europe à partir d’une question proprement politique : quelles sont les certitudes (morales, éthiques, politiques ou scientifiques) exprimées par les énoncés représentant les institutions européennes ? Dès lors, notre recherche s’insère dans le champ de la communication politique mais elle ne le fait pas pour rendre compte de la communication des institutions politiques, ni de la communication entre des institutions politiques et la société civile ; elle se propose de produire une analyse du phénomène « communication politique ». Ce phénomène a fait l’objet d’un numéro de la revue Hermès dont l’article introductif d’André Gosselin nous permet de situer conceptuellement notre recherche : la communication politique est un processus par lequel les territoires du politique sont rendus visibles dans les arènes du politique à partir des formes d’agir communicationnel 5 .

Outre la volonté d’attirer l’attention sur les deux axes autours desquels s’articulent les processus de communication politique (l’axe vertical de la représentation qui relie les arènes et les territoires du politique et l’axe horizontal de l’action qui désigne les pratiques communicationnelles), ce numéro d’Hermès vise à distinguer plusieurs domaines de recherches dans l’étude de la communication politique. Ainsi, les différentes contributions qui le constituent sont identifiées comme des études portant sur les composantes institutionnelles du débat politique (les territoires), sur les lieux de représentation des normes et des règles qui constituent ces territoires (les arènes) ou encore sur les caractéristiques formelles, sociologiques ou discursives des processus de mise en relation de ces deux espaces (les pratiques communicationnelles) :

‘« Que fait André Gosselin ? Il montre l’intérêt à mobiliser les catégories de Max Weber, avant d’ailleurs celles de Jürgen Habermas. Après avoir rappelé les deux axes, horizontal qui va de l’action à la réception, et vertical qui va de l’arène aux territoires, il définit six formes d’agir qui caractérisent le champ de la communication politique » 6 .’

C’est à partir de la mobilisation de ces catégories que nous allons donc analyser un processus de communication politique. Mais nous allons essayer de montrer que ces catégories (que Gosselin désigne comme types d’agir communicationnel) issues de la conception de l’action rationnelle initiée par Weber, ne désignent pas une forme de communication, mais des pratiques discursives mettant en œuvre des processus d’énonciation. C’est pourquoi nous proposons une étude du politique à partir de l’interrogation des formes de circulation discursive présentes dans les processus de communication politique. La communication politique est alors comprise comme «le processus d’énonciation des représentations des territoires du politique exprimées dans des arènes du politique par des sujets porteurs d’identités politiques ». Nous adoptons ainsi une approche de type sémiotique (l’étude des formes d’énonciation) mais également discursive (l’étude du rapport entre les énoncés qui en découlent et la réalité représentée).

Notes
5.

GOSSELIN, A : La communication politique. Cartographie d’un champ de recherche et d’activités in Hermès nº 17-18, Communication et politique, 1995. (pp.17-33).

6.

WOLTON, D: La communication politique. Avant-propos in Hermès nº17-18, op. cit (p.12).