2.2.1.1. La réalité du discours politique

Nous commençons (nous suivrons le même ordre pour chacun des journaux analysés) par présenter la distribution des sept dénominations politiques décrites plus haut, selon le type de réalité qu’elles représentent. Le tableau suivant montre ainsi le nombre d’occurrences pour chaque dénomination (chiffre dans chaque case), la réalité qui y est représentée (à partir des catégories proposées par Gilles Gauthier et que nous avons décrites plus haut (c.f. III.2.1) et la présence relative pour chacune de ces deux variables dans l’ensemble du sous-corpus 410 . Nous avons enfin considéré l’article dans son ensemble comme notre unité d’analyse de base 411 .

  Voir la France Davantage Revenir et aimer L’essentiel L’Europe sociale Tot. %
Faits mentaux non intentionnels: 1         1 10,0
Gestes ponctuels:   1 2   1 4 13,8
Comportements continus:   1       1 3,4
Tendances, dispositions et propensions: 8     2   10 34,5
Manifestations verbales: 8 1   1 3 13 44,8
Total 17 3 2 3 4 29 100
% 58,6 10,3 6,9 10,3 13,8 100  

Ce tableau nous montre deux caractéristiques fondamentales. En premier lieu la prédominance de « manifestations verbales » (44,8%) suivie des « tendances, dispositions et propensions » (34,5%) et des « gestes ponctuels » (13,8%). Ces deux dernières catégories désignent les groupes sociaux porteurs d’une identité politique pour la première et la représentation de règles régulatives pour la deuxième. Cette première vue d’ensemble nous laisse donc penser qu’il s’agit de la représentation d’une réalité constituée de groupes politiques qui énoncent dans leurs manifestations verbales un certain nombre de règles régulatives. La deuxième caractéristique de ce tableau concerne la distribution des dénominations politiques, parmi lesquelles « voir la France » représente plus de la moitié des articles analysés (58,6%). Nous pouvons dès lors faire l’hypothèse d’une concentration d’énonciations portant sur des règles régulatives de la part de groupes sociaux, dans les articles que nous avons rattachés à cette dénomination politique.

Notes
410.

Nous avons utilisé, pour l’étude de ce que nous appelons « la réalité du discours politique » un sous-corpus constitué d’articles rendant compte des déclarations, des actes publics ou des actions produites par des hommes ou des femmes politiques participant à la campagne électorale. Sont donc exclues de ce sous-corpus les informations se référant à la campagne dans d’autres pays de l’Europe ou bien à des actions, des actes publics ou des déclarations qui feraient référence à l’Europe et non à la campagne politique à l’intérieur du pays. Les autres informations constituent un deuxième sous-corpus qui est analysé dans un deuxième temps afin de confronter ce que nous désignons comme le discours national et le discours européen. Cette même distinction a été introduite pour l’ensemble des journaux analysés. Nous suivrons aussi cette démarche pour les autres journaux analysés.

411.

On pourrait sans doute nous objecter la présence de représentations de plusieurs types de réalités dans un même article. En l’état actuel de notre recherche (et aussi de l’application de la théorie de Searle à l’analyse de discours, dont à notre connaissance la seule tentative précise est celle de Gilles Gauthier dont nous nous servons ici) il nous est impossible de répondre de manière précise à une telle remarque. Nous pouvons toutefois avancer deux arguments pour soutenir notre démarche en attendant de pouvoir mieux l’affiner : en premier lieu, l’importance des titres journalistiques dans la production mais aussi la compréhension des informations. Les travaux, que nous avons déjà abondamment cités de Teun Van Dijk, reposent, en grande mesure sur ce principe. En deuxième lieu et en lien avec cela, la présence même d’un titre fait appel à la condensation de l’information de l’article dans un ou quelques énoncés. Il en découle la possibilité de considérer un article comme le développement d’une information, dans le sens d’un contenu précis. C’est donc sur la base de cette hypothèse que nous avons considéré chaque article comme représentant un seul type de réalité.