b) Discours 

Notre travail sur les identités discursives nous a permis aussi d’aborder les aspects qui permettent de décrire une instance d’énonciation comme étant également une instance de communication. La différence entre ces deux dimensions réside dans la possibilité de reconnaître les signifiés rattachés aux processus d’énonciation. Nous avons considéré, toujours dans la lignée de l’agir communicationnel habermassien, que la mise en place des instances de communication, issues du rapport entre leur identité discursive et les identités sur lesquelles portent leurs discours, se produit à partir du principe de vérité dans le cas des journaux d’information et du principe de justesse pour les affiches (c.f. II.3.1.1, II.3.1.2).

Le passage de l’énonciation à la communication a été abordé à partir de la notion d’intentionnalité collective développée par John R. Searle et cela nous a permis de proposer une signification propre à l’identité discursive de chacune de ces instances (C.f. p. 189).

Ainsi, avec ces deux temps d’analyse, nous avons construit un modèle d’interprétation du processus de communication dans lequel s’insèrent les affiches et les journaux qui composent notre corpus. Ce modèle d’interprétation repose toutefois sur un postulat fort selon lequel les dispositifs d’énonciation déployés dans des processus de communication médiatée contiennent les traces des sujets de langage à l’origine des énoncés qui y sont exprimés. Suivant ce postulat, nous avons considéré que lire un journal, tout comme regarder une affiche, sont des pratiques qui impliquent d’identifier l’identité discursive du journal (ou de l’affiche). Nous ne disons pas que le lecteur ou le spectateur reconnaissent l’intention qui fonde le message qu’ils lisent ou regardent, nous disons simplement qu’ils lui attribuent une intention, reconnaissant une distance entre leurs intentions propres et celles déployées par l’objet qu’il lisent ou regardent.

C’est pourquoi nous avons abordé la troisième partie de la thèse (opinion) à partir d’un cadre d’analyse normatif reposant sur le langage politique républicain. Ce cadre d’analyse nous a permis d’aborder la question de la responsabilité de l’énonciation comme une composante de l’Espace Public : j’exerce ma liberté lorsque j’exprime un jugement en public et que ce jugement peut être compris parce qu’il fait appel à une identité discursive et institutionnelle reconnaissable par ce public. Les institutions politiques sont ainsi des espaces (physiques et symboliques) à l’intérieur desquels il est possible d’exercer cette liberté. La troisième partie de notre thèse a été vouée à décrire les caractéristiques de cet espace lorsqu’il s’agit de l’Union Européenne.