c) opinion

Les discours concernant l’UE ont ainsi été rattachés à des énoncés dont les sujets font partie des espaces publics qui y sont représentés. Ces espaces publics sont représentés dans ces discours à partir d’instances de pouvoir :

- Les institutions européennes

- L’État-Nation

- Les sujets européens

- Les partis politiques

- Les identités institutionnelles

- Le parlement européen

- Les citoyens de chaque État-membre

C’est dans ces lieux de pouvoir que l’énonciation est effectivement possible, en ce sens qu’ils désignent la présence d’acteurs capables d’exercer une forme de pouvoir. Nous en concluons qu’un discours européen n’existe effectivement, dans le corpus que nous avons étudié, que s’il engage ces formes d’identité.

Mais nous nous sommes également inscrit dans une lignée théorique de type réaliste selon laquelle les représentations renvoient toujours à un état de choses. Dans le cadre d’une thèse sur la communication politique, cet état de choses correspond aux caractéristiques qui définissent ces instances de pouvoir.

Une différence majeure a été dès lors observée entre le type de réalité représenté dans les journaux espagnols et français (dans les premiers, les « manifestations verbales » sont largement plus représentées que les autres types de réalités sur lesquelles se construisent les informations). Il s’agit sans doute d’une distinction d’ordre culturel, mais elle nous a permis de mieux comprendre la différence concernant les domaines d’action de l’état républicain représentés dans ces mêmes journaux (c.f. III.1.3.1).

En somme, nous n’avons pas parlé de l’Europe, mais de la représentation qu’en donnent les instances constitutives de notre Espace Public européen (celui mis en œuvre dans cette thèse). En effet, l’Europe, comme entité politique, n’existe au fond que dans les discours énoncés par ces instances. C’est donc vers ces discours que nous avons voulu porter notre regard parce que c’est à partir d’eux que se construit la réalité politique européenne.

Nous avons également constaté ce que Jacques Gerstlé avait noté lors de la campagne au référendum pour la constitution européenne en France pendant le printemps 2005 :

‘« Outre les cadrages national et européen, ‘l’information européenne’ peut être partagée en deux autres grands ensembles, deux façons très différentes pour les journalistes de couvrir les élections, et de construire ainsi la réalité de la campagne pour les téléspectateurs : le jeu (‘game frame’) et les enjeux (‘issue frame’). Le jeu met l’accent sur la compétition politique entre les forces en présence et les stratégies mises en oeuvre pour maximiser des voix. Les enjeux, au contraire, insistent sur les problèmes d’intérêt public dont l’élection est censée assurer le règlement collectif ». 502

Nous avons enfin rendu compte d’un discours européen composé aussi bien par des représentations des jeux politiques que des enjeux de l’élection, à partir de la distinction entre les arènes et les territoires du politique. C’est ainsi, dans l’articulation de ces deux composantes de la communication politique que se développe l’Espace Public européen avec une confrontation constante entre des formes d’action et des formes d’appartenance. C’est également parce que la communication politique renvoie à cette tension entre deux espaces de pouvoir différents, que nous avons terminé notre travail par la mise en visibilité des « moyens de faire » exprimés dans cette campagne électorale. Nous adaptons ainsi à notre démarche la notion de médiation politique développée par Bernard Lamizet.

Notes
502.

GERSTLÉ, J : 2005 op.cit (p.19).