« Ne pas trop participer à la campagne »

Politique

Les poids lourds du gouvernement ne participeront chacun qu'à un

meeting

Européennes : Raffarin cherche le ton de sa campagne

Guillaume Tabard

[13 mai 2004]

Faire campagne sans trop s'exposer. Se préparer à une défaite sans

sembler s'y résigner. Le gouvernement Raffarin aborde les élections

européennes avec prudence. Mardi soir, le premier ministre a réuni

les poids lourds de son équipe pour définir une stratégie. Nicolas

Sarkozy, François Fillon, Jean-Louis Borloo, Michèle Alliot-Marie,

Philippe Douste-Blazy et Gilles de Robien ont ainsi planché à

Matignon, Dominique de Villepin et Dominique Perben, également

conviés, étant en déplacement aux États-Unis.

«Je ne crois pas que je sois engagé dans la bataille partisane au

quotidien. Les élections auront lieu. Nous écouterons ce que les

Français disent, mais je n'en fais pas pour moi l'échéance de mon

action», a assuré Jean-Pierre Raffarin la semaine dernière, sur

France 2. Mais le chef du gouvernement a payé cher de s'être

arc-bouté jusqu'au bout à son slogan «à élections régionales, leçons

régionales». Et s'il risquait de l'oublier, Alain Juppé l'a

clairement rappelé dimanche au conseil national d'Aubervilliers:

«L'enjeu est également national. Ne commettons pas la même erreur

que pour les élections régionales.» Jouant les Cassandre, François

Fillon a prévenu de son côté: «Il est possible que nous fassions,

une fois encore, les frais d'une élection détournée de ses

véritables objectifs.»

Lors de la réunion de Matignon, la question a donc été tranchée: les

ministres devront s'engager dans la campagne. Mais de manière plus

qualitative que quantitative. Chaque «grand ministre» participera à

un meeting dans une circonscription électorale. Nicolas Sarkozy sera

ainsi le 9 juin à Clermont-Ferrand, où il soutiendra son vieux

complice Brice Hortefeux, tête de liste dans les trois régions

centrales (Auvergne, Limousin, Centre). François Fillon présidera un

meeting à Nantes, où la liste UMP sera conduite par son amie

Roselyne Bachelot. Michèle Alliot-Marie ira soutenir Alain

Lamassoure à Bordeaux. Un meeting par personne, c'est peu.

Officiellement, parce que la campagne effective sera extrêmement

courte: trois semaines tout au plus, au lendemain du pont de

l'Ascension. Officieusement, parce que personne ne se bouscule pour

battre les estrades. Trop de nouveaux dossiers à régler,

invoque-t-on, par exemple, à Bercy comme à l'Éducation.

Seul, Michel Barnier effectuera un véritable tour de France. La

tutelle qu'il exerce au Quai d'Orsay sur les affaires européennes,

ses anciennes fonctions à la Commission de Bruxelles font de lui, à

part Alain Juppé qui effectuera sa dernière campagne, le responsable

de la droite française le plus crédible sur ces questions. Voilà

pourquoi le premier ministre lui a demandé d'être le «coordinateur»

de la campagne européenne du gouvernement. En plaçant Michel Barnier

au premier plan, Jean-Pierre Raffarin peut se protéger lui-même en

évitant de trop monter au feu politique. Lui aussi se limitera sans

doute à un seul meeting avant le scrutin, le 10 juin à Paris. Le

reste du temps, c'est en tant que chef du gouvernement qu'il

montrera son engagement européen. Mardi prochain, il recevra à dîner

Romano Prodi, président de la Commission européenne. Il devrait

aussi profiter des nombreuses cérémonies célébrant le soixantième

anniversaire du Débarquement pour présenter sa vision de l'Union.

Sur un plan plus qualitatif, les ministres ont également été invités

à mener une campagne d'explication, en s'appuyant sur leurs

compétences respectives, sur sept thèmes: l'Europe de l'emploi,

l'Europe de la croissance, l'Europe des grands projets, l'Europe de

la Sécurité sociale, l'Europe de la sécurité personnelle, l'Europe

de la transmission des savoirs, des échanges culturels et de la

jeunesse.

En associant Gilles de Robien, l'unique ministre UDF de son équipe,

à cette campagne militante, Raffarin cherche enfin à ce que l'on ne

réduise pas le soutien à son gouvernement au seul score de l'UMP.