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« Appeler au vote sanction »

Elections européennes

Le PS appelle au vote-sanction sans le dire

Malgré les apparences, les socialistes gardent

la même stratégie que pour les régionales.

Par Paul QUINIO

lundi 10 mai 2004 (Liberation - 06:00)

Tout est dans le «aussi». «Ce sont aussi des

élections européennes», a déclaré hier matin

Patrick Bloche en ouvrant, à la Mutualité, à

Paris, la convention nationale lançant la

campagne du Parti socialiste pour le scrutin du

13 juin. «On a tous le 28 mars à l'esprit», a

ajouté le responsable de la fédération de Paris.

Difficile d'être plus explicite. En fin de

réunion, le premier secrétaire du PS, François

Hollande, a lui aussi estimé que «les Français

ne doivent pas apporter à Jean-Pierre Raffarin

une autre réponse le 13 juin que celle du 28

mars». Le Premier ministre avait «nié la portée

politique nationale de la consultation

régionale. Il a prétendu que les européennes ne

figuraient pas dans son calendrier. Nous allons

essayer de réparer cet oubli», a ironisé le

patron du PS en faisant des européennes «la

deuxième occasion, mais aussi la dernière avant

2007, d'adresser un message à l'égard du

pouvoir».

Troisième tour? La députée européenne sortante

Pervenche Béres a appelé de son côté «à

combattre Jacques Chirac et le gouvernement

comme nous l'avons fait lors des régionales». Et

malgré les apparences, le secrétaire national

chargé des questions internationales, Pierre

Moscovici, veut lui aussi faire du 13 juin une

répétition du vote sanction. «Nous n'avons pas

l'intention de faire de cette consultation un

troisième tour des élections régionales», a-t-il

d'abord assuré dans le Journal du dimanche.

Avant d'insister sur le fait que «les Français

peuvent vouloir donner un nouvel avertissement»

au gouvernement Raffarin.

Les socialistes vont d'ailleurs calquer leur

stratégie de campagne sur celle adoptée lors des

régionales. L'organigramme est quasiment le

même, avec François Rebsamen en directeur de

campagne et Jack Lang en porte-parole. Le

premier secrétaire, François Hollande, devrait

faire le tour des 7 grandes circonscriptions

régionales métropolitaines, comme il avait fait

celui des 22 régions. Et Claude Bartolone,

chargé de la communication, a annoncé que les

opérations baptisées «Tous sur le pont» qui

avaient jalonné la campagne des régionales

seront renouvelées pour mobiliser les militants.

Les propos de Pierre Moscovici, tête de liste

dans la région est, résument assez bien la

tactique adoptée par le PS pour les européennes

: appeler au vote sanction, mais sans le dire.

L'expression «troisième tour des régionales»

devrait être bannie des discours lors des

meetings. «Nous ne mènerons pas campagne en

demandant aux Français de confirmer la

sanction», confiait en fin de semaine dernière

François Rebsamen, secrétaire national chargé

des fédérations. Comme ils l'ont fait avant le

21 mars, les socialistes vont plutôt user de

l'argument du «vote utile», érigé en version

positive du vote sanction. «Pour les chercheurs,

les chômeurs, le vote du 28 mars a été utile», a

déclaré hier Rebsamen à la tribune. «Dire non à

une politique libérale à l'échelle européenne

pèsera sur les choix du gouvernement, notamment

sur la Sécurité sociale», a-t-il poursuivi.

Hollande a repris l'argument, en rappelant les

décisions prises dans les régions sur la

gratuité des livres, les emplois associatifs ou

les OGM. «L'avenir de la protection sociale

figurera bien au coeur des élections du 13

juin», assure le numéro un du PS.

Slogan social. Cette déclinaison du vote utile

est néanmoins plus délicate à établir au niveau

européen. Elle prend pour l'instant

essentiellement la forme d'un slogan en faveur

de l'Europe sociale. A défaut, François Hollande

s'est plu hier à taper comme un sourd sur

«l'incohérence et l'injustice» d'un gouvernement

«au service de ses clientèles». Une autre façon

d'inciter au vote sanction.