« Feindre l’indifférence »

Européennes. A peine 1 200 personnes, hier soir

à Paris, pour écouter un Premier ministre

refusant de lier son sort au scrutin.

En meeting, Raffarin feint l'indifférence...

Par Vanessa SCHNEIDER

vendredi 11 juin 2004 (Liberation - 06:00)

Le revoilà. Jean-Pierre Raffarin avait prévenu

qu'il ne s'impliquerait pas beaucoup dans la

campagne des européennes. Il a poussé la

discrétion si loin qu'on a bien failli ne pas

l'y voir. Hier soir, il a néanmoins conclu le

dernier meeting de la campagne de l'UMP qui

s'est tenu Porte de Versailles à Paris avec le

patron du parti, Alain Juppé. Sa présence aux

côtés de la tête de liste UMP en Ile-de-France,

Patrick Gaubert, n'a pas suffi à attirer les

foules. A peine 1 200 personnes se sont

déplacées pour écouter leurs grands chefs dans

une ambiance morne. Seul Alain Juppé a cru

sentir «de l'enthousiasme». Le président du

conseil général des Hauts-de-Seine, Nicolas

Sarkozy s'est, lui, abstenu de venir.

Juppé «admiratif». Le Premier ministre a profité

de cette occasion un peu tristounette pour

vanter encore une fois les bienfaits de sa

politique et d'insister sur la nécessité de

conduire les réformes. Son message européen

tient en quelques mots : il ne faut pas avoir

peur de l'Europe qui «nous protège» contre la

mondialisation, et le projet de Constitution de

Valéry Giscard d'Estaing est le bon. Alain Juppé

l'a fait applaudir par la salle en se disant

«admiratif» et «décidé à le soutenir».

«Action». Quand la gauche, et dans une moindre

mesure l'UDF, le poussent à démissionner en cas

d'un nouvel échec de l'UMP, le Premier ministre

s'efforce de ne pas lier son sort aux résultats

de dimanche. Depuis plusieurs semaines, il ne

cesse de rappeler qu'il est «à la tête d'une

majorité élue pour cinq ans». Dans une interview

au Monde publiée hier, il «imagine l'avenir dans

l'action», façon de dire qu'il pense rester aux

manettes quoi qu'il arrive. Comme pour éviter la

focalisation sur le seul score de l'UMP, il a

expliqué hier que «la grande question de

l'élection de dimanche est [pour la droite

européenne] de garder la majorité à Strasbourg».

En entrant au dernier moment dans la campagne,

le Premier ministre espère ne faire de cette

élection qu'une parenthèse vite refermée. Il ne

manque jamais une occasion de rappeler qu'il a

de gros chantiers sur le feu comme ceux de

l'assurance maladie, de la cohésion sociale

ainsi que la préparation du budget.

Pour les régionales de mars dernier, il s'était

déplacé pour soutenir certaines têtes de liste

UMP. Et s'est fait du même coup reprocher de les

avoir fait perdre. Alors qu'il jurait que ces

élections n'avaient rien de nationales, les

électeurs ont profité du scrutin pour

sanctionner sa politique. C'est ce qui risque de

se reproduire dimanche.