1.3 La Théorie Duale du Risque

1.3.1 Introduction

En 1738, le fameux paradoxe de Saint-Petersbourg mis en place par D. Bernoulli a remis en cause le critère d’espérance mathématique qui se révèle insuffisant pour décrire le comportement individuel des agents économiques. Mais, il faut remonter aux années 1950 pour que les économistes construisent des modèles qui soient censés représenter la rationalité des choix individuels en environnement aléatoire. J. von Neumann et O. Morgenstern en 1947 et L. Savage en 1954 ont dégagé une axiomatique permettant le classement des perspectives aléatoires, que l’on nomme le principe de l’UE. D’après ces axiomes, et plus particulièrement d’après l’axiome d’indépendance, ce principe admet que les pondérations des utilités sont des probabilités et que les préférences sont linéaires par rapport aux probabilités. Les paradoxes d’Ellsberg (1961) et d’Allais (1953), entre autres, ont respectivement contredit ces hypothèses et deux principales voies de recherche appartenant à une même famille de modèle permettant d’intégrer ces contradictions ont été développées :

Les modèles de croyance non-additive (qui sont compatibles avec le paradoxe d’Ellsberg) et le modèle de préférence non-linéaire dans les probabilités (qui restent compatibles avec le paradoxe d’Allais). La théorie duale du risque de Yaari appartient à ce dernier type de modèles et plus particulièrement aux modèles dits à pondération de rang qui admettent l’idée d’une altération subjective des probabilités. La particularité de la théorie de Yaari provient de son caractère dual par rapport au principe d’EU, puisqu’elle est linéaire en la richesse et non-linéaire dans les probabilités. Cette approche permet, contrairement à l’EU, de dissocier l’attitude à l’égard du risque de l’utilité marginale de la richesse. Depuis une dizaine d’années, ce modèle a été surtout utilisé pour tester la robustesse des résultats exhibés sous l’EU (Doherty et Eeckhoudt (1995), Eeckhoudt (1997) et Courbage (2000)).