Partie III : Les déterminants de la couverture optimale d’assurance santé et le coût du risque de santé

Chapitre 4 : Demande d’assurance santé dans un contexte multirisque

4.1 Introduction

La littérature en économie de l’assurance a été fortement influencée par trois célèbres propositions. La première proposition est le principe de Bernoulli qui suggère qu’un agent riscophobe choisit une couverture complète si la prime d’assurance est actuarielle. La deuxième est la proposition de Mossin-Smith (1968) qui suggère qu’un agent riscophobe choisit une couverture partielle si la prime d’assurance est chargée. La dernière proposition est le théorème d’Arrow (1963). Ce dernier montre qu’un individu riscophobe préférera systématiquement un contrat de franchise plutôt qu’un contrat de coassurance. Cependant, ces trois propositions ne conservent leur validité que dans un cadre limité où il y a une seule source d’incertitude. En réponse à cette limite, Doherty et Schlesinger (1983) ont étudié la demande d’assurance dans un cadre plus général où l’individu est confronté à deux risques. Ces auteurs ont montré que, lorsque la prime est chargée, si les deux risques sont positivement corrélés, les agents choisissent une couverture complète. Autrement dit, les agents confrontés à un risque contre lequel ils ne peuvent s’assurer, ils réagissent en améliorant leur couverture contre le risque assurable si les deux risques sont positivement corrélés. Cependant, les résultats de Doherty et Schlesinger (1983) ne conservent pas leur validité lorsque l’objectif du décideur est représenté par une fonction d’utilité multi-dimensionnelle. En introduisant une fonction d’utilité bi variéeau modèle Doherty et Schlesinger (1983), Rey (2003) montre que les déterminants de la demande d’assurance sont la corrélation entre les deux risques et l’utilité marginale de la richesse en fonction de l’état de santé.

Le fait que le risque de santé est exogène dans l’analyse de Rey (2003) implique qu’on ne puisse transposer directement ses résultats à des problèmes d’assurance santé.

L’objectif de ce chapitre est de reprendre la démarche de l’analyse de Rey (2003) en endogénéisant le risque de santé afin de tester la robustesse des résultats de Doherty et Schlesinger (1983). Nous montrons que, contrairement aux résultas de Doherty et Schlesinger (1983), les agents peuvent améliorer leur couverture contre le risque de santé assurable même si les deux risques sont négativement corrélés.

Afin de répondre à notre problématique, on considère un individu qui fait face à un risque de santé et un risque non assurable. Pour ce deuxième risque, il peut s’agir d’un risque de perte de revenu consécutive à une baisse de l’activité pour un entrepreneur individuel ou à un risque d’accident.

En ce qui concerne la corrélation pouvant exister entre les risques, nous considérons tous les cas de figure possibles : les deux risques peuvent être indépendants, négativement ou positivement corrélés.

Par exemple, la probabilité de perte de revenu consécutive à une baisse de l’activité est plus grande pour un entrepreneur individuel malade que pour un autre bien portant.

Ce chapitre est organisé de la manière suivante. Après avoir présenté le modèle (section 4.2), nous examinons, dans la section 4.3.1, l’impact d’un risque non assurable sur la demande de coassurance de santé dans un contexte où la prime d’assurance est chargée. La section 4.3.2 contient des développements équivalents dans un contexte où la prime d’assurance est chargée. Dans la section 4.4, nous étudions la forme optimale du contrat d’assurance santé, avant de conclure le chapitre.