II. La lecture lycéenne, une étude de texte

Le Programme de français pour la classe de seconde générale et technologique explicite la « continuité » de cet enseignement entre le collège et le lycée. Le Programme décrit aussi « la progression » des différentes « perspectives d’étude » que sont : l’histoire littéraire, les genres, la réflexion sur la production et la réception des textes ou l’argumentation. Cette progression est conçue comme « approfondissement » des savoirs et savoir-faire auxquels les collégiens ont été « initiés » ou qu’ils ont « abordés » durant le collège et comme enseignement de « démarches » « plus réflexives » et « plus analytiques ».

L’étude de texte occupe une place prépondérante dans l’enseignement du français en seconde. En effet, c’est par l’enseignement et l’apprentissage de la lecture et du commentaire que la maîtrise et la compréhension des procédés d’écriture, littéraires comme non littéraires, s’acquièrent en même temps qu’elles sont évaluées (en 2000-2001 plus qu’en 1997-1998, les enseignants interrogés consacrent quelques heures à l’écriture d’invention).

Les contraintes lectorales propres au contexte scolaire-lycéen portent d’abord sur la définition même des façons de lire et sur leur enseignement. Celui-ci a pour finalité déclarée la construction d’un citoyen autonome susceptible d’exercer un esprit critique.

La façon de lire que le lycée se donne pour objectif de transmettre aux élèves peut être définie comme mise en œuvre d’un rapport analytique aux textes. Pour ce faire, les élèves doivent apprendre à considérer la lecture comme un travail sur le texte qui suit une démarche rigoureuse et s’appuie sur des connaissances précises et spécialisées. Ils doivent également engager un rapport réflexif à ce qu’ils font, à ce qui leur est demandé de faire, être conscient de la démarche à suivre pour mettre en œuvre une telle façon de lire. Son apprentissage est indissociablement lié à l’adoption d’un ‘‘statut’’ de lecteur particulier. En effet, une lecture-travail qui a pour visée l’interprétation des textes selon une logique particulière n’est pas le fait de n’importe quel lecteur, mais celui d’un lecteur ‘‘commentateur’’ 921 . Enfin, si la lecture est considérée comme travail, le statut de ce qui est lu devient particulier : la littérature et les textes littéraires sont constitués comme objet d’étude, et revêtent de la sorte des propriétés spécifiques qui appellent une façon de lire. On abordera ces points successivement : l’affirmation du caractère rigoureux de la lecture au lycée, et de la démarche de lecture, le statut particulier du lecteur commentateur, la constitution de la littérature et des textes comme objets d’étude. Au fil de cette présentation, se préciseront la définition même de la façon de lire attendue au lycée en situation d’évaluation et les modalités de son enseignement.

Notes
921.

E. Bautier et J.-Y. Rochex retiennent le commentaire comme pratique scolaire à partir de laquelle saisir les rapports aux savoirs des élèves. C’est dans cette perspective – différente de celle de la présente recherche – qu’ils reviennent sur les attendus professoraux d’une telle pratique – en termes cognitifs, psychologiques, etc. –, E. Bautier et J.-Y. Rochex, L’expérience scolaire des nouveaux lycéens, op. cit., p. 187-211.