3) Les entraînements à la production individuelle d’une analyse des textes

En plus de s’en remettre ponctuellement aux propositions interprétatives professorales à l’occasion des corrections, des enquêtés apprennent progressivement à réaliser le passage, suggéré par les questions professorales et attendu par les enseignants, du repérage des procédés stylistiques et des analyses ponctuelles à la production d’une analyse d’ensemble. Certains parviennent à maîtriser ces gestes lectoraux dans le courant de l’année. S’ils éprouvent souvent au départ des difficultés à opérer ce passage des propositions interprétatives ponctuelles à leur organisation selon une perspective d’étude, ils parviennent petit à petità proposer des analyses de texte qui coïncident avec les corrections professorales auxquelles ils se remettent, in fine. On peut dégager les conditions de cette appropriation de l’enseignement de français en seconde à partir des enquêtés dont, au vu des copies et des relevés de notes professoraux collectés, ainsi que des déclarations en entretien, les résultats scolaires en français sont les meilleurs 1141 :

  1. plus ou moins explicitement motivés par le souci d’une réussite scolaire ou d’une adhésion à la façon de lire enseignée, ces enquêtés témoignent d’une reconnaissance de l’autorité pédagogique en suivant les consignes professorales ;
  2. certains ont acquis dès le collège les savoirs et savoir-faire scolaires permettant une appropriation attendue des consignes lectorales lycéennes ; d’autres acquièrent rapidement les savoirs qui leur manquent : maîtrise de vocabulaires métastylistiques et métalinguisti­ques, connaissance de la littérature classique, usage d’outils de référence, intériorisation de la logique scolaire de l’analyse de texte ;
  3. en plus des conditions matérielles favorables à la skolè – du temps, des lieux et des outils –, ils bénéficient de conditions cognitives et affectives propices au travail scolaire sur les textes :
  • une expérience antérieure de la possible acquisition de nouveaux savoirs et une certitudo sui quant à la possibilité de l’acquérir ;
  • un sens du jeu scolaire qui leur permet de réguler l’investissement dans les activités à réaliser (travailler beaucoup pour acquérir de nouveaux savoirs, réduire les efforts quand les savoir-faire sont acquis – indépendamment de l’intérêt pour les œuvres –, etc.) ;
  • au besoin, des soutiens, familiaux ou autres, à une persévérance ;
  • des motifs de satisfactions (reconnaissance scolaire ; satisfactions lectorales nouvel­les par rapport à celles découvertes et enseignées au collège – non déterminées par l’appréciation des textes –).

Au cours de leur trajectoire antérieure, ces enquêtés ont appris à être attentifs aux exigences scolaires et, progressivement, à y répondre adéquatement : ils connaissent les voies pour y parvenir, bénéficient des conditions culturelles et matérielles favorables à l’exercice et à l’acquisition des savoirs, savoir-faire et dispositions leur permettant de les emprunter.

Notes
1141.

Elodie, Marie, Séverine (enquêtées dont les parents sont bacheliers et qui sont élèves de madame A) ; Léonardo (enquêté dont les parents sont bacheliers et qui est élève de monsieur C) ; Esther, Marie-Eve, Maxence et Thierry (enquêtés dont les parents sont bacheliers et qui sont élèves de madame D) ; Salah (enquêté dont les parents ne sont pas bacheliers et qui est élève de madame E) ; Edith, Mathilde, Olivia (enquêtées dont les parents sont bacheliers et qui sont élèves de monsieur F) ; Caroline, Bruno, Philippe (enquêtés dont les parents ne sont pas bacheliers et qui sont élèves de madame G).