L’étude comparative des manuels composant notre corpus permet de relever la présence récurrente d’explications concernant trois « composants » du mobile : la carte SIM, la batterie et les codes de sécurité (PIN et PUK). Des informations sur ces trois éléments sont délivrées dans l’ensemble des documents étudiés.
Majoritairement, l’installation de la carte SIM et de la batterie, son chargement, constituent des opérations explicitées. Une partie leur est consacrée. Elle comporte des schémas, des recommandations et une exposition des procédures à suivre pour manipuler ces composants. Dans notre perspective, il est surtout intéressant de relever que l’image de l’appareil, ainsi véhiculée, a tendance à morceler l’objet technique. Autrement dit, le discours des modes d’emploi désolidarise certains constituants du mobile et de fait, produit l’image d’un appareil qui n’est pas celle d’une boîte noire.
Le mode d’emploi transmet par ailleurs un savoir sur le fonctionnement de l’appareil (source d’énergie, utilisation d’une carte…). Le rôle de chacun de ces éléments peut d’ailleurs parfois être explicité 761 . Enfin, relevons que le mobile n’est pas représenté comme un appareil immédiatement opérationnel puisque l’utilisateur doit effectuer certaines actions avant la mise en service de l’appareil. Nous pouvons donc considérer que ces explications désacralisent l’objet ou, tout au moins, participent de la désillusion énoncée par M. Legrand 762 .
Dans l’ensemble des modes d’emploi de notre corpus, un autre savoir est constamment délivré sur le fonctionnement des mobiles : celui concernant les codes de sécurité de la carte SIM (code PIN et PUK). Dès les premiers manuels analysés, un paragraphe, au moins, est consacré aux rôles de ces codes lors de l’utilisation d’un mobile. Voilà qui pour notre analyse est doublement intéressant. D’une part, cette terminologie est inhérente aux modes d’emploi de mobiles. Ainsi, quelle que soit la marque, un accord langagier commun sur l’emploi de ces termes est à l’œuvre 763 . C’est le même référent que désigne chaque constructeur en utilisant les termes « code PIN » et « code PUK ». Ces termes appartiennent à l’univers sociolinguistique véhiculé par les manuels de mobiles. D’autre part, dès 1996, la gestion de l’identification de l’abonné sur le réseau est inscrit dans un objectif de sécurisation de l’abonné. Ces codes sont, en effet, présentés comme un moyen d’éviter les utilisations non autorisées (logique des codes de carte bancaire). En d’autres termes, des caractéristiques essentielles au fonctionnement de l’appareil (identification par l’opérateur) sont exposées ou traduites suivant une logique qui mobilise l’attention de l’utilisateur/consommateur en la focalisant sur son intérêt.
Pour exemple, voici deux extraits :
- extrait du manuel du Motorola V3688 (1999) : « La carte SIM est une carte à puce contenant votre numéro de téléphone, des données d’exploitation et une mémoire pour le stockage de messages et des numéros de l’annuaire téléphonique. Vous pouvez donc utiliser votre carte avec tout autre téléphone GSM : les appels sont facturés sur votre carte. Prenez autant de soin de votre carte SIM que d’une carte bancaire. Elle ne doit être ni pliée, ni rayée, ni exposée à l’eau ou à l’électricité statique ».
-extrait du manuel Ericsson T28 (06/1999) : « Lorsque vous vous abonnez auprès d'un opérateur, ce dernier vous remet une carte SIM (Module d'identité d'abonné). Cette carte à puce contient, entre autres, votre numéro de téléphone, les services compris dans votre abonnement, et les données contenues dans votre répertoire téléphonique. Les cartes SIM existent en deux formats. Le premier correspond à la taille d'une carte de crédit, tandis que le second est plus petit. Votre téléphone utilise la carte la plus petite. De nombreuses cartes SIM au format carte de crédit contiennent une carte perforée de plus petite taille qui se détache facilement ».
Marc Legrand, op. cit., pp. 61-64.
Cette remarque n’est pas valable pour l’ensemble des termes employés dans les manuels de mobiles. Chaque marque développe également son propre univers sociolinguistique.