2°) Le poids des contraintes discursives dans la construction des images du téléphone mobile

D’après notre analyse, le genre discursif, ses propriétés jouent un rôle déterminant dans les récurrences d’imagerie identifiées. Ainsi nous pouvons nous interroger sur le degré d’influence du genre discursif. N’est-ce pas le discours qui modèle la représentation de l’objet à son image ? Les constantes relevées ne sont-elles pas identiques pour d’autres objets ? En d’autres termes, qu’est-ce qui dans ces invariants est propre à l’objet technique contemporain « téléphone mobile » ?

Au premier abord, des correspondances peuvent être réalisées entre les invariants et l’image d’autres objets véhiculées dans chacun de ces discours. Par exemple, les spots publicitaires d’autres produits les valorisent aussi en montrant une faible intervention de l’utilisateur (produits ménagers, plats cuisinés…). La mise en scène de l’économie du geste semble donc propre à la valorisation publicitaire contemporaine. De même, les utilisateurs/consommateurs représentés dans les spots publicitaires sont rarement âgés de plus 50 ans – exception faite des produits destinés à cette cible Associer la jeunesse au produit est une stratégie repérable dans le discours publicitaire d’autres objets. Certains invariants constatés dans les modes d’emploi sont aussi identifiables pour des appareils autres que le mobile. L’image d’un objet délicat, que l’utilisateur doit manier avec précaution, paraît inhérente aux manuels d’utilisation.

Toutefois, si les deux images du mobile identifiées semblent modelées en fonction du genre discursif dans lequel elles s’actualisent, la « nature » de l’objet délimite aussi ces images, leurs potentialités, leurs possibilités d’actualisation. Au terme de notre analyse, nous considérons, en effet, qu’un cadre commun relatif au téléphone mobile reste présent sur l’ensemble de la période étudiée. L’addition des caractéristiques suivantes pourrait résumer ce cadre : objet technique, contemporain, communication/télécommunication, informatique/électronique. Ces caractéristiques nous semblent délimiter les possibilités de représentation des spots publicitaires comme des modes d’emploi. En fonction de son genre, chaque discours s’appuie sur ces critères et les exploite. Finalement, le genre discursif comme la « nature » du téléphone mobile constituent des cadres qui délimitent un ensemble de représentations possibles. Par la suite, certaines s’actualisent. La difficulté pour l’analyste reste dans l’impossibilité de séparer nettement ce qui relève du genre discursif, de l’objet et de ses images.