2-Bourgs et marchés.

Les tisserands qui ne produisent pas assez de chanvre, surtout à partir de l’Empire, ont recours aux foires et marchés locaux, comme ceux de Saint-Marcellin dans le Sud-ouest du département ou surtout de Grenoble, pour s’approvisionner en matière première 200 .

Sous la Restauration, on dénombre, en Isère, huit marchés hebdomadaires où on peut s’échanger du chanvre, dont la moitié située dans l’arrondissement de Grenoble et autant dans celui de La Tour-du-Pin , près des terres où se cultive cette fibre mais aussi près des villages proto-industriels tissant des toiles de chanvre, et neuf marchés hebdomadaires pour les fils. Ces derniers sont en majorité situés en Bas-Dauphiné, là où on les utilise, à savoir Tullins , Le Grand-Lemps , Pont-de-Beauvoisin , Les Abrets , La Bâtie-Montgascon , La Tour-du-Pin et Virieu, ce qui signifie la présence sur les routes de nombreux marchands de fibres et de fils.

De même, ces villages et ces bourgs sont idéalement situés pour recevoir du chanvre ou des fils en provenance du Piémont voisin : le village de Pont-de-Beauvoisin occupe une position de carrefour pour les échanges frontaliers jusqu’en 1860, tant pour les trafics légaux que pour la contrebande entre la France et l’Italie 201 . Les Abrets ou La Bâtie-Montgascon ne sont qu’à quelques kilomètres eux aussi de la frontière. En revanche, l’écoulement du produit fini, les toiles, ne s’effectue que dans un nombre plus limité de centres, souvent de gros bourgs, tels que Tullins , Pont-de-Beauvoisin, La Tour-du-Pin et bien évidemment Voiron à l’occasion des marchés hebdomadaires où s’échangent également des grains. Sans doute faudrait-il rajouter à cette liste les marchés de Bourgoin ou de Saint-Geoire qui drainent capitaux, fibres et fripes au-delà leur canton respectif 202 . Au contraire, à La Côte-Saint-André, une partie de la vieille halle communale, d’origine médiévale, sert au commerce des cocons la saison venue.

La place grenobloise, au siècle des Lumières, participe de différentes manières à l’activité toilière : tout d’abord, elle domine le commerce des chanvres en Dauphiné, tant pour l’importation que pour l’exportation. Les filasses de chanvre sont destinées à l’approvisionnement des tisserands de la province mais aussi à celui du Midi, par l’entremise de la Foire de Beaucaire. Les Grenoblois occupent également une position importante dans le peignage du chanvre, avec deux cent soixante-treize peigneurs comptabilisés en ville en 1800. C’est beaucoup plus qu’à Voiron ou Bourgoin 203 .

Mais le principal marché local reste celui de Voiron . Les marchés secondaires abandonnent progressivement le négoce du chanvre et du fil au profit des produits frais et des fripes.

Notes
200.

ADI, 138M5, Statistiques manufacturières et commerciales, fabriques de toiles de l’arrondissement de Saint-Marcellin , rédigées par le sous-préfet, le 23 juin 1812.

201.

THORAL (M.-C.), 2007, pp. 85-106, DESCOTES-GENON (J.), 1994.

202.

ADI, 141M2, Tableau ms des marchés du département, rédigé par le Préfet de l’Isère le 15 décembre 1823, Etat ms des marchés dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin , dressé par le sous-préfet en 1849. Aucune indication n’est portée pour l’arrondissement de Vienne. Les marchés de chanvre sont celui de Bourg d’Oisans, Clelles, Grenoble, Vizille , dans l’arrondissement de Grenoble et Pont-de-Beauvoisin , La Bâtie-Montgascon , La Tour-du-Pin, Virieu dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin. En 1849, les trois principaux marchés hebdomadaires sont situés à Bourgoin , Saint-Geoire et La Tour-du-Pin. On y échange aussi bien des produits frais (œufs, beurre, volailles) que des toiles pour Bourgoin et du fil pour les deux autres.

203.

MORSEL (H.) et PARENT (J.-F.), 1991, pp. 35-36.