1-Innovation, tension et agitation.

L’historiographie d’inspiration marxiste s’est rapidement emparée de la mémoire combative des canuts lyonnais (ou chefs d’atelier), pour en magnifier l’action dans une France industrielle encore balbutiante : les révoltes de 1831 et de 1834 deviennent des symboles de la lutte des classes entre une classe dominée, les canuts, et une classe dominante, les fabricants de soieries, et annoncent les combats sociaux à venir 768 . D’autres, parmi lesquels un certain nombre de contemporains, estiment que l’agitation perpétuelle des canuts est à l’origine de la « ruralisation » de la Fabrique : en effet, les fabricants lyonnais, à la recherche d’une main d’œuvre docile et corvéable, aurait cherché à s’affranchir d’une corporation ouvrière tumultueuse, surtout après 1831 et 1834 769 . D’autant que cette main d’œuvre populeuse et agitée serait à l’origine d’un sentiment diffus d’insécurité parmi les élites lyonnaises, angoissées et troublées à la moindre perturbation de l’ordre public 770 .

Notes
768.

RUDE (F.), 1969, BEZUCHA (R. J.), 1971 et 1974.

769.

Bulletin des Soies et des Soieries, n°143, du 27 décembre 1879.

770.

NUGUES-BOURCHAT (A.), 2004, pp. 85-88.