Un terroir de micro-propriétaires.

Didier Terrier a démontré que la proto-industrie s’installe surtout dans les terroirs où domine la grande propriété (ecclésiastique dans le Cambrésis) 1004 . Le démantèlement de la propriété nobiliaire sous la Révolution fait de l’Isère un département de petits propriétaires. Sous la Monarchie de Juillet, les grandes fermes, plutôt rares, appartiennent surtout à des rescapés du second ordre.

Domaines ecclésiastiques et nobles sont démantelés et vendus comme biens nationaux dès les premières années de la Révolution. La vente des biens nationaux en Isère, comme partout ailleurs, donne lieu à un intense agiotage et à une spéculation frénétique 1005 . Dans le Bas-Dauphiné, les ventes de biens de première origine représentent au mieux 3% de la superficie totale de la contrée, car la propriété ecclésiastique y est rare 1006 . En revanche, si on se réfère aux estimations – parfois contestées – d’André Gain à propos des biens de seconde origine, les autorités de l’Isère procèdent à plus de treize mille procès-verbaux de ventes, pour un montant supérieur à 28 millions de livres, ce qui fait de l’Isère l’un des départements les plus actifs en matière d’aliénations de biens 1007 . D’après les bordereaux d’indemnités établis en 1825, les biens de Marguerite-Gabrielle de Vallin , près de La Tour-du-Pin , hérités de son père, et de son mari, le marquis de La Poype, sont dispersés sous la forme de mille deux cents articles de vente 1008  ! À Poliénas, près de Saint-Marcellin , la propriété de Jean-Baptiste de Baronnat, d’une superficie de deux cent soixante-quinze hectares, soit environ un quart du terroir communal, est démembrée en soixante-quinze lots de trois hectares et demi en moyenne. Certaines enchères dépassent de quatre à cinq fois la mise initiale 1009 . En 1797, à Montferrat, la moitié des propriétés a moins de deux hectares et 16% seulement font, au contraire, plus de huit hectares. Paysans et artisans (92% des propriétaires) possèdent alors les deux tiers de la surface de la commune, alors que dix-sept bourgeois disposent du solde. La grande propriété aristocratique a disparu entièrement en 1794 avec la vente des terres du marquis de Barral, au profit de quelques riches paysans ou bourgeois. Alain Belmont constate alors que le nombre de propriétaires est quasiment identique à celui de 1758. En revanche, avec la mise en place du Code civil et l’instauration du partage égalitaire des biens, le nombre des propriétaires augmente fortement dans la première moitié du XIXe siècle 1010 .

Les propriétaires du Bas-Dauphiné s’affichent précocement très attachés à leurs parcelles ou lopins de terres, à tel point que biens communaux et droits collectifs (vaine pâture, parcours…) disparaissent rapidement après le vote des lois de septembre et d’octobre 1791, à quelques exceptions près 1011 . En 1793, à Saint-Savin , lors du partage des communaux, quarante-deux habitants vivant sur des terres défrichées, se voient privés de leurs terres, comprises dans les biens partagés 1012 . Dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin , on tente de préserver quelques communaux pour éviter une hausse de la criminalité rurale, mais à partir de 1806, leur démembrement s’engage définitivement dans les communes où l’on n’a pas procédé à leur partage. Comme sous l’Ancien Régime, la disparition des communaux ne sert que les intérêts des propriétaires les plus importants. La disparition des pratiques collectives, comme la vaine pâture et les biens communaux, ne marque pas la fin de la communauté. Quelques troubles sont signalés à Saint-Marcel en 1845 à propos du partage des biens communaux 1013 . En 1846, les biens communaux représentent au niveau départemental plus du cinquième de la superficie, avec une nette différence entre la plaine et la montagne. Deux ans plus tard, en Bas-Dauphiné, des paysans provoquent quelques troubles mineurs à propos d’une nouvelle répartition des communaux. Dans les années 1860, les autorités liquident plus des deux tiers de ces communaux 1014 . La pression foncière est réelle dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin où les densités de population atteignent cent habitants au kilomètre carré 1015 . Concrètement, cela se traduit par la faible proportion des bois communaux soumis au régime forestier, qui ne représentent que 0,8% de la superficie de l’arrondissement, contre 4,2% pour celui de Saint-Marcellin et près de 12% pour Grenoble, en 1846. Lorsque le conseil municipal des Avenières décide de louer les communaux à partir de l’été 1825, il déclenche une vive agitation parmi la population. Armés de tridents et de fourches, les paysans menacent violemment les géomètres et les gendarmes 1016 . Le 2 fructidor an V, le Président de Barral et quelques uns de ses amis fondent une Association des Propriétaires de Biens Nationaux : au total, cent cinquante-sept individus adhèrent à cette association de défense devant les velléités de la noblesse dauphinoise pour recouvrer ses biens 1017 .

Une portion non négligeable du Bas-Dauphiné est encore, au début du XIXe siècle, impropre à la culture. Ainsi, la plaine de Bièvre, autour de La Côte-Saint-André, a été pendant longtemps un espace forestier, puis les défrichements successifs sous l’Ancien Régime l’ont transformée en plaine « couverte de cailloux et en grande partie en friche » dans les dernières années de l’Ancien Régime, jusqu’à ce que les paysans se mettent à utiliser du plâtre pour fertiliser la terre 1018 . L’ancien préfet de l’Isère sous la Restauration, le baron d’Haussez, compare la plaine de Bièvre à un « désert » en raison des grandes distances qui séparent les différents villages, concentrés autour des rares sources d’eau qui affleurent en surface. Au milieu du XIXe siècle,

‘« desséchés et livrés à l’agriculture, ces nouveaux terrains se couvrirent de riches moissons, et les habitants furent délivrés des maladies qui les décimaient périodiquement. À cette heure, ce sont des cantons fertiles que de jolies routes mettent en communication avec le reste du pays » 1019 .’

Toutefois, ce portrait peu flatteur du département ne doit pas cacher les réels progrès qui sont réalisés en matière agricole en l’espace d’un demi-siècle : la surface agricole exploitée progresse fortement grâce à l’assèchement des marais de Bourgoin , grâce à la fertilisation des terres de la plaine de Bièvre… Au total, ce sont plus de mille hectares de terres qui sont gagnés pour l’agriculture locale.

Les défrichements opérés sous l’Ancien Régime se sont donc poursuivis, en partie, dans la première moitié du XIXe siècle afin de gagner de nouvelles terres à l’agriculture 1020 . Gabriel Gratet du Bouchage et le comte de Menon revendiquent dans les premières années de la Restauration la propriété des marais du Bouchage, de Vézeronce et de Saint-Savin contre les empiétements de la compagnie BIMAR, chargée de leur dessèchement. Au début du XIXe siècle, cette dernière se proposait d’assécher les marais de Bourgoin en échange de la propriété du tiers des nouvelles terres. Mais, l’entreprise ne mène pas à terme sa mission et se débarrasse à bon compte de ses terres 1021 .

À la fin de l’Ancien Régime, les marais recouvrent une grande partie des Terres Froides, les plongeant régulièrement dans un épais brouillard assez malsain pour les habitants de la contrée. De là,

‘« des exhalaisons produites par les eaux stagnantes répandaient aux alentours leur funeste influence ; les fièvres intermittentes sévissaient sur les populations ; une immense étendues de pays était en friche. […] La contrée était réputée la plus misérable du Dauphiné » 1022 . ’

Ces vastes marais traversent les cantons de Bourgoin , Morestel , La Verpillière, La Tour-du-Pin , et dans une moindre mesure celui de Pont-de-Beauvoisin . Le seul marais de Bourgoin s’étend sur plusieurs milliers d’hectares. Les habitants subissent régulièrement fièvres et épidémies en raison de la trop grande promiscuité avec les marais de Bourgoin, ou ceux de Morestel ou encore de Virieu, car cette contrée est infestée de terres marécageuses. Il fournit un pâturage hivernal aux troupeaux : en 1806, plus de quatre mille vaches et près de deux mille chevaux vivent sur ces marais. Pourtant, les habitants du Bas-Dauphiné se sont habitués à leur présence et ont su les utiliser, d’abord pour la pâture, puis pour le fourrage, le gibier 1023 ... Des marais, les habitants ont pris l’habitude d’extraire la tourbe au XIXe siècle. En fin de compte, ils préfèrent défricher les coteaux pour conserver l’exploitation de la tourbe, utilisée notamment comme engrais 1024 . La propriété des marais comme leur desséchement constituent une source de conflits dans les campagnes du Bas-Dauphiné, entre les riverains, les usagers, les différentes compagnies chargées de l’assèchement (dont la BIMAR) et ceux qui en revendiquent la possession. Depuis le XVIIe siècle, différents travaux de dessèchement ont été engagés par les propriétaires et concessionnaires successifs.

Vers 1806, les meilleures terres valent aux alentours de trois mille francs contre moins de deux mille pour celles de seconde qualité 1025 . Dans les années 1820 et 1830, la micropropriété varie d’un arrondissement à l’autre. De ce point de vue, l’arrondissement de La Tour-du-Pin , qui devient dans les décennies suivantes le cœur du Bas-Dauphiné soyeux, se distingue des trois autres arrondissements par le poids plus important qu’y occupent les propriétés inférieures à deux hectares 1026 . Les trois quarts (74,6%) des propriétés entrent dans cette catégorie, signe de la misère qui y règne et des pressions qui s’y exercent, d’autant que c’est dans cet arrondissement que les densités de population sont les plus élevées. Au contraire, dans l’arrondissement montagneux de Grenoble ou dans les plaines viennoises ou de Saint-Marcellin , ce type de propriété n’excède pas, en moyenne les deux tiers. Une analyse plus fine, par canton, toujours à partir des relevés opérés par Gimel, le directeur des contributions directes de l’Isère dans le premier cadastre, permet d’aller plus loin dans ces conclusions. À de rares exceptions près, le tissage à domicile de soieries s’implante surtout dans les cantons où la micropropriété de moins de deux hectares est la plus forte, à savoir celui de Pont-de-Beauvoisin (80,2%), La Tour-du-Pin (79,4%), Rives (78,4%), Virieu (75,3%)… En général, les cantons où cette micropropriété représente au moins 72% des propriétés, attirent davantage les métiers à tisser à domicile 1027 . Il est évident qu’en Isère il existe « une forte proportion de propriétaires ne vivant pas, ou pratiquement pas, du travail de la terre qu’ils détiennent » 1028 . L’arrondissement de La Tour-du-Pin se caractérise par une forte proportion d’ouvriers agricoles, de métayers ou de fermiers dans la première moitié du siècle 1029 .

Pierre Barral relève à partir des années 1840, et pendant un demi-siècle, une diminution régulière de la contenance moyenne de la propriété foncière en Isère pour atteindre une surface moyenne à peine supérieure à deux hectares en 1890 1030 . Dans le village de Morette, dans l’arrondissement de Saint-Marcellin , le nombre de fermes passe de soixante et un à cent seize entre 1827 et 1862, mais les plus petites et les plus fragiles sont aussi les premières à disparaître 1031 . L’Isère est sans conteste un département où règne la petite propriété, et cela est particulièrement vrai dans le Bas-Dauphiné (notamment les Terres Froides, le seuil de Rives ). En 1840, pour l’ensemble de l’Isère, les cotes foncières supérieures à vingt hectares (2,5% des cotes) représentent un tiers de la surface, alors que celles inférieures à cinq hectares (86% des cotes) représentent une superficie sensiblement équivalente. À elles seules, les cotes supérieures à cent hectares représentent une superficie supérieure à soixante mille hectares pour l’ensemble du département, soit 10% de la surface appropriée. Celles supérieures à cinquante hectares rassemblent un cinquième de la superficie appropriée. Pour Philippe Vigier, ce sont les cotes comprises entre cinq et cinquante hectares qui dominent en Isère, puisqu’elles détiennent la moitié du sol. Durant le XIXe siècle, la petite propriété ne cesse de se renforcer. Quant à l’exploitation, selon Barral, les superficies inférieures à cinq hectares dominent, surtout dans les Terres Froides. Au moins jusqu’à la fin du Second Empire, le morcellement touche davantage la petite propriété que la grande 1032 .

Globalement, ce sont les cantons situés dans la vallée de l’Isère (Tullins , Vinay , Saint-Marcellin ) ou surtout dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin qui abritent la propriété aristocratique la plus importante. Dans cet arrondissement, les vieilles familles de la noblesse dauphinoise conservent toujours dans la première moitié du XIXe siècle de beaux domaines, comme aux plus beaux jours de l’Ancien Régime, notamment dans les cantons de Crémieu, Morestel et dans une moindre mesure dans ceux de Saint-Geoire , Virieu, La Tour-du-Pin, Bourgoin , dans les espaces vallonnés et boisés, alors que le bas pays (dans la vallée de la Bourbre et dans les marais de Bourgoin) est au contraire dominé par la moyenne et la petite propriété. Les grands domaines ont alors besoin de fermiers et de salariés agricoles, touchant souvent un salaire de misère. L’enquête agricole de 1852 confirme que c’est dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin que l’on retrouve le plus grand nombre de journaliers agricoles non propriétaires dans le département : ils sont onze mille quatre cent quarante-six. Sur un domaine de soixante hectares situé dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin, quatre ou cinq personnes sont nécessaires pendant l’année : un maître charretier, un bouvier, un touchon (valet de cour), une fille de basse-cour et éventuellement un enfant pour garder les bêtes dans les champs, sans compter la main d’œuvre saisonnière pour les moissons ou les vendanges. Dans les exploitations d’une dizaine d’hectares, l’agriculteur se fait aider par son épouse et un domestique. Dans les cantons de Morestel et de Bourgoin, un maître charretier reçoit autour de cent cinquante francs de gages, contre cent à cent cinquante francs pour un bouvier, cent à cent dix francs pour un touchon, et cent francs pour une servante. Près de La Tour-du-Pin et de Bourgoin, les moissonneurs et les batteurs saisonniers touchent leurs gages en nature, soit un sixième de la récolte, mais ils doivent aussi clôturer les champs et fournir des journées de fauchage. . Quant aux femmes qui gagnent les champs le temps de la moisson, l’exploitant leur verse dix à douze boisseaux de grains, soit deux cent cinquante à trois cents litres de grains et les hommes dix-huit boisseaux. Près de Pont-de-Beauvoisin , ils perçoivent le onzième ou le douzième de la récolte. Les journaliers touchent des gages en argent, entre 1 et 1,25 franc en hiver, et 1,25 et 1,50 franc par jour en été 1033 . L’exode rural et la concurrence du tissage de soieries entraînent une hausse des salaires des journaliers (entre un tiers et le double) jusqu’à la fin des années 1860 1034 .

Certes, la petite exploitation n’est pas forcément un handicap, mais elle ne permet pas toujours de répondre aux besoins du ménage 1035 . Dans les premières années de la Monarchie de Juillet, les rendements moyens à l’hectare dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin sont parmi les plus élevés de la moitié sud du pays, signe que l’agriculture locale n’est pas aussi routinière et inefficace que semblent le penser les contemporains, puisqu’ils dépassent les cent cinquante francs par hectare 1036 .

Le sort de la paysannerie dauphinoise ne cesse de se détériorer tout au long de la Monarchie de Juillet. La modernisation des pratiques agricoles et le développement de la petite propriété, mais aussi les crises agricoles régulières, ont comme corollaire une montée de l’endettement paysan en Bas-Dauphiné comme dans la plupart des régions rurales du pays, soit de la main à la main sous la forme de prêts verbaux, soit sous la forme d’obligations hypothécaires, soit encore par des acquisitions foncières réglées en plusieurs annuités 1037 . Déjà en 1818, on estime qu’en Isère, entre un quart et un tiers des propriétaires fonciers sont grevés de dettes, souvent à des taux d’intérêts proches de 10%. La création d’une Caisse Hypothécaire, à Paris, avec un capital de cinquante millions de francs deux ans plus tard n’y a rien changé. À partir de 1829, elle se trouve d’ailleurs dirigée par le député de l’Isère Sapey, soupçonné de faire partie de ces « bandes noires » qui écument le département afin de dépecer les grands domaines aristocratiques et de pousser ainsi les paysans à s’endetter lourdement pour acquérir quelques lopins de terres issus de ces démembrements 1038 . Sous le Second Empire, l’arrondissement de La Tour-du-Pin est particulièrement touché par l’usure : les taux peuvent atteindre 15%, comme dans l’arrondissement de Vienne, alors que dans les deux autres arrondissements, ils sont moins élevés 1039 .

Quelques faillites retentissantes à Lyon et à Grenoble fragilisent l’équilibre financier des ménages paysans des campagnes voisines. À la fin des années 1830, la mise en liquidation de la maison Charvet, installée à Lyon, a pour conséquence le remboursement rapide de plus de trois millions de francs de créances dans l’arrondissement de La Tour-du-Pin , exigées par les liquidateurs 1040 . Entre 1836 et 1842, manieurs d’argent et banquiers grenoblois sont emportés dans les abysses de faillites retentissantes, entraînant derrière eux quelques grandes entreprises industrielles et leur clientèle de particuliers. Barthellon, Doyon, Durand ou encore Giroud disparaissent. Non moins importante pour l’économie locale est la liquidation de la principale banque grenobloise à la même époque, la maison Charles Durand & fils & Cie. Les liquidateurs de cet établissement tentent de recouvrer pendant les années 1840, des sommes colossales auprès de plusieurs débiteurs : rien que pour l’arrondissement de La Tour du Pin, pas moins de deux cent vingt-six anciens clients de la maison Durand doivent encore rembourser 575.000 francs en 1845. Au total, le déficit de la maison Durand s’élève à quatre millions de francs. Tous ont bénéficié de crédits de la part de la banque grenobloise pour se porter acquéreurs de terres en Bas-Dauphiné. Au total, ces créances représentent à elles seules la moitié du montant à recouvrer par les liquidateurs qui pressent leurs débiteurs à se manifester 1041 . L’économie rurale se trouve asphyxiée par la raréfaction du crédit, tandis que la fabrication des toiles est en souffrance depuis longtemps. En quelques années seulement, les paysans du Bas-Dauphiné font la fortune des usuriers. Comme si cela ne suffisait pas, ces mêmes paysans endettés sont confrontés à partir de 1848 à l’avilissement du prix des terres et à la baisse de leur revenu. Au milieu du siècle, leur position devient vite intenable avec la raréfaction du crédit et la montée du taux d’intérêt, tant et si bien que les expropriations forcées se multiplient sous la Seconde République 1042 . Pourtant, pendant la crise économique des années 1846-1847, les paysans du Bas-Dauphiné ne s’illustrent pas par des soulèvements ou des jacqueries comme en 1789. Les autorités relèvent seulement cinq menaces de troubles dans la contrée 1043 .

La corrélation entre taille de la propriété et sériciculture semble moins évidente, par le caractère diffus de cette dernière, d’autant que les revenus issus de l’éducation des vers à soie sont très inférieurs à ceux du tissage, au mieux quelques dizaines de francs 1044 . Pour diffuser le tissage, les fabricants lyonnais privilégient les contrées ayant de nombreux bras disponibles, soumis à de fortes pressions foncières. En effet, les Terres Froides, au cœur du tissage, sont dominées par la petite propriété foncière, souvent limitée à quelques ares, au mieux à quelques hectares, davantage tournée vers l’autoconsommation.

Notes
1004.

TERRIER (D.), 1996, pp. 92-94.

1005.

VERMALE (F.), 1917.

1006.

BODINIER (B.) et TEYSSIER (E.), 2000, carte p. 164. La superficie des biens de première origine n’excède pas 3% de la superficie totale dans les districts de Vienne et de La Tour-du-Pin . Pour celui de Saint-Marcellin , elle se situe entre 3 et 5%.

1007.

GAIN (A.), 1928, pp. 550-551, cité par BODINIER (B.) et TEYSSIER (E.), pp. 146-147 et 328. Avec treize mille quatre cent soixante-douze aliénations, l’Isère est le troisième département le plus touché par les aliénations de biens de seconde origine, derrière le Pas-de-Calais et la Côte-d’Or. Par sa valeur, 28.583.206 francs, l’Isère se classe au dixième rang.

1008.

ADI, 1Q581, Bordereau d’indemnité du couple Vallin -La Poype.

1009.

TRENARD (L.), 1992, p. 675.

1010.

BELMONT (A.) et BIGAND-ESPAREL (P.), 1988.

1011.

VIVIER (N.), 1998, pp. 20 et 171. En 1846, les biens communaux représentent 9% de la superficie de la France.

1012.

Ibid, p. 154.

1013.

SOBOUL (A.), 1976, pp. 204 et 306 et THORAL (M.-C.), 2004, pp. 527-530.

1014.

JONAS (R. A.), 1994, p. 21, VIVIER (N.), 1998, pp. 236, 276-277, 303.

1015.

En Beaujolais et en Lyonnais, GARRIER (G.), 1973, relève une densité moyenne équivalente (106 hab./km2 dans la première moitié du XIXe siècle et une croissance de 82% de la population.

1016.

CHABOUD (R.), 2006.

1017.

THOMÉ DE MAISONNEUVE (P.), 1938-1939.

1018.

CROZET (F.), 1869, p. 3 et BERNARD (P.), 1952.

1019.

RAVERAT (A.), 1861, p. 401.

1020.

PILOT (J.J.A.), 1847, p. 448.

1021.

Agriculture française, département de l’Isère, Paris, Imprimerie royale, 1843, pp. 88-89.

1022.

RAVERAT (A.), 1861, p. 400.

1023.

Voir DEREX (J.-M.), 2001.

1024.

BRAVARD (J.-P.), 1981, pp. 71-91 et THORAL (M.-C.), 2004, pp. 530-532. En guise de comparaison, voir MAYAUD (J.-L.), 1977.

1025.

PERRIN-DULAC (F.), 1806, tome 2, p. 302.

1026.

En 1851, la propriété moyenne en France est estimée à cinq hectares environ. MAYAUD (J.-L.), 1999, p. 13.

1027.

GIMEL, 1875.

1028.

VIGIER (P.), 1963b, p. 82.

1029.

DUMOLARD (P.), 1983, pp. 107-108.

1030.

En 1884, environ 90% des cotes foncières en France ont moins de dix hectares, avec une superficie moyenne pour les exploitations de 8,20 hectares. MAYAUD (J.-L.), 1999, pp. 33, 56-57. D’après les décomptes effectués par cet auteur, la superficie moyenne des exploitations en Isère se situe entre 5 et 6,99 hectares en 1892. Plus de 90% des exploitations iséroises ont alors moins de dix hectares.

1031.

GARAVEL (J.), cité par JONAS (R. A.), 1994, p. 16.

1032.

Ministère de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics, Enquête agricole, 2 e série, enquêtes départementales, 25 e circonscription, Hautes-Alpes, Haute-Savoie, Isère, Paris, Imprimerie Impériale, 1867, pp. 34 et 37, BARRAL (P.), 1962, pp. 89-96 et VIGIER (P.), 1963b, pp. 82-83.

1033.

Agriculture française, département de l’Isère, Paris, Imprimerie royale, 1843, pp. 31, 65, 71-73, 76.

1034.

Ministère de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics, Enquête agricole, 2 e série, enquêtes départementales, 25 e circonscription, Hautes-Alpes, Haute-Savoie, Isère, Paris, Imprimerie Impériale, 1867, p. 39.

1035.

MAYAUD (J.-L.), 1999.

1036.

CLOUT (H. D.), 1980, p. 212, cité par HIGGS (D.), 1990, p. 95.

1037.

BEAUR (G.), 1994.

1038.

DENIS (Y.), 1964, CHAUVAUD (F.), 1984.

1039.

Ministère de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics, Enquête agricole, 2 e série, enquêtes départementales, 25 e circonscription, Hautes-Alpes, Haute-Savoie, Isère, Paris, Imprimerie Impériale, 1867, p. 38.

1040.

ADI, 1N4/8, Rapport du Préfet de l’Isère au Conseil général, année 1840.

1041.

Extrait imprimé du rapport fait à la commission de surveillance de la liquidation Charles Durand et fils et Compagnie, par les gérants de cette liquidation, Grenoble, Imprimerie Allier, sd [1845] et LÉON (P.), 1954a, pp. 540-541 et 786-788. Doyon laisse un déficit de 1,5 million de francs sur un passif de 5,6 millions de francs. Une banque de Bourgoin , peut-être Rivière, a un passif de 1,5 million contre 8,6 millions de francs pour Durand et 4,4 millions pour Barthellon.

1042.

VIGIER (P.), 1963a, vol. 1, pp. 38-39 et vol. 2, pp. 31-34.

1043.

GOSSEZ (R.), 1956, pp. 1-3, alors que l’Ouest du pays se soulève massivement.

1044.

D’après LEVI (G.), 1989a, p. 110, la sériciculture et la plantation de mûriers se concentrent surtout dans les espaces marqués par la petite propriété. Les ressources tirées de cette activité sont indispensables dans les budgets paysans.