2-L’initiative voironnaise.

À la fin de l’année 1881, sur l’initiative de Séraphin Favier , alors maire de Voiron et façonnier en soieries, le Conseil municipal de Voiron propose la création d’une école primaire supérieure nationale et d’une école nationale d’apprentissage. L’établissement doit fonctionner sur le modèle de ceux de Vierzon et de Reims, conformément aux dispositions de la loi du 11 décembre 1880 sur les écoles manuelles d’apprentissage, pour favoriser le développement des deux principales activités industrielles de la cité, la papeterie et le tissage :

‘« Une école manuelle d’apprentissage rendra les plus grands services à la population ouvrière en dirigeant l’aptitude des enfants vers ces carrières qui leur sont ouvertes, et les industriels eux-mêmes trouveront leur profit à avoir des ouvriers et des employés mieux préparés et plus instruits ». ’

La loi de 1880 entraîne la création, dans les mois qui suivent, de trois établissements importants à Vierzon, Armentières et Voiron , ce dernier institué par le décret du 26 juillet 1882 3186 . Depuis quelques années déjà, existe un cours d’enseignement à Voiron, mais il s’avère trop petit. Pour en faciliter l’établissement, les élus sont prêts financièrement à verser une subvention de 250.000 francs pour la construction des locaux 3187 . Des négociations s’engagent entre l’Administration et les élus pour fixer les modalités de cette création : l’Etat, par l’intermédiaire de l’inspecteur général de l’Instruction Publique, impose en contrepartie la laïcisation de l’école congréganiste de Voiron, le vote d’une subvention de 300.000 francs par la Ville de Voiron et le partage des frais d’acquisition des terrains entre la municipalité et l’Etat. Les travaux de construction débutent au printemps 1884.

Au total, la « Nationale » coûte environ 1.266.000 francs (dont 1.133.000 pour les seuls bâtiments), soit un coût tout à fait comparable à celui de l’école de tissage de Créfeld 3188 . Les 11.000 m2 de surface, dont 2.500 pour les ateliers, sont occupés par l’école maternelle (cent cinquante places), l’école primaire élémentaire (deux cent trente places) et par l’école primaire supérieure. Celle-ci est installée dans un édifice en forme de fer à cheval, où sont accueillis les deux cent soixante-dix élèves pendant les trois années de scolarité. En 1907, la direction de l’établissement engage une première restructuration des activités textiles. Depuis huit ans, les ateliers de tissage de l’école abritaient cinq métiers mécaniques et une douzaine de métiers à bras. À cet équipement de base, on ajoute un laboratoire d’essais pour les tissus et un musée des tissus, afin de compléter le savoir technique des élèves 3189 .

Victime de son succès, le directeur doit procéder à l’agrandissement des dortoirs de l’établissement, passant de cent cinquante-six lits à l’ouverture à cent quatre-vingt-douze en 1893. Depuis 1891, il est obligé de refuser des candidats : en 1886-1887, il a accepté cent trente-neuf élèves, et près du double (deux cent soixante-six) en 1893-1894. Puis, jusqu’au début du siècle, les effectifs se stabilisent autour de deux cent cinquante élèves par an, le directeur refusant l’admission d’un nombre croissant de prétendants : jusqu’en 1892, aucun élève ne se voit refuser l’accès à la « Nationale ». Après cette date, les refus sont de plus en plus nombreux, atteignant en 1899-1900 le nombre de soixante-treize en raison du manque de places.

Finalement, entre la date d’ouverture et 1899, soit treize promotions, mille deux cent soixante-sept élèves sont sortis de cette institution. Mais les deux autres écoles annexées à la « Nationale » subissent la concurrence des écoles congréganistes, ce qui entraîne leur déclin 3190 .

Notes
3186.

PIGENET (M.), 1992.

3187.

ADI, 8T2/41, Lettre ms de Stouff, inspecteur d’académie adressée au Préfet, datée du 30 décembre 1881 et REVERDY (N.), 2004, pp. 31 et 40.

3188.

BERTHUIN, 1900, pp. 5-7 et REVERDY (N.), 2004, p. 41.

3189.

REVERDY (N.), 2004, p. 63.

3190.

BERTHUIN, 1900, pp. 8-9, 21-27.