4.2.1.1 Discussion graphique

Dans la représentation graphique proposée (Figure 36), deux équilibres quantité-prix sont identifiés :

  • (y I , P(y I )), avec un seul opérateur (I pour intégré)
  • (y A , P(y A )),lorsque le réseau est exploité par deux opérateurs (A pour allotis).

Une différence importante entre le modèle proposé ici et celui de Williamson (1968) est que la fonction de demande P(y) est ici la demande de service public de transport urbain de la part de l’autorité publique (pour le compte de la collectivité). La disposition à payer (donc le prix) est un montant de subvention, et la quantité y un niveau de service public offert à la population.

La discussion s’articulera autour de la fonction de coût moyen minimal CM(y), qui est supposée décroissante afin de montrer que les effets identifiés sont aussi valables pour une industrie en monopole naturel.

Puisque les coûts moyens sont supposés décroissants, le choix d’un monopole intégré (I) permet d’atteindre la courbe de coût moyen la plus basse CM(y). Et si le monopole est idéalement contrôlé par la puissance publique, la production y* permet d’atteindre le prix le plus faible P(y*) (qui égalise le coût moyen CM(y*)), l’optimum social.

Toutefois, il est possible que le monopole profite de son information privilégiée et de son pouvoir de marché pour imposer jusqu’à une production y I , caractérisée par l’équilibre entre recette marginal Rm(y I ) et coût marginal Cm(y I ). Le prix est dans ce cas P(y I ). C’est un prix plus élevé que le coût moyen CM(y I ), l’écart étant la rente du producteur.

Figure 36 : Arbitrage à la Williamson (1968) pour une décision allotissement

L’allotissement, hypothèse ici testée par la répartition de la production dans deux firmes, a deux conséquences. D’une part, le coût moyen pour obtenir y grâce à deux unités distinctes équivalentes est 2.CM(y/2). D’autre part, la concurrence entre les deux entités permet de limiter le pouvoir de marché et de dynamiser le monopole. Au mieux, l’allotissement conduit à la production y A , caractérisée par un prix P(y A ) = 2.CM(y A /2). Ce prix est inférieur à P(y I ) dans la Figure 36.

Et dans ce cas, si le gain de surplus libéré par la baisse du prix (la demande est supposée élastique) dépasse la perte technologique due aux déséconomies d’échelle, l’allotissement est un choix de gouvernance qui augmente le surplus global. Il est donc possible, dans le cas des hypothèses utilisées, que l’allotissement soit un choix judicieux.

Une partie de l’effet de la concurrence vient du fait que la baisse des prix qu’elle engendre s’applique à un ensemble plus grand de production que les déséconomies d’échelle (nous supposons y A >y I ). Et l’inefficacité observée par les ingénieurs (point de vue technique) est plus que compensée.

Les termes du choix entre intégration et allotissement sont donc ici ceux de l’arbitrage entre l’efficacité technologique et l’efficacité informationnelle. La question est donc double :

  • Quelles seraient les pertes en termes d’efficacité technologique ?
  • Quelles seraient les gains engendrés par la dynamique concurrentielle ?

La réponse tient au signe de l’équation suivante qui résume l’arbitrage observé graphiquement. L’allotissement est un gain si :

Ajoutons que le changement de gouvernance en faveur de l’allotissement implique une redistribution du surplus global entre les fournisseurs d’input de l’opérateur (actionnaires, salariés, fournisseurs…), et l’autorité publique. Et si l’on fait l’hypothèse démodée d’une autorité publique bienveillante, c’est aussi un gain pour la collectivité.

Par ailleurs, en termes de gestion d’entreprise, les métiers dominants à l’intérieur de l’entreprise exploitante sont plutôt de type « ingénieur » en cas d’intégration, alors que dans le cas de l’allotissement les métiers commerciaux pourraient devenir prépondérants. Nous y reviendrons dans la sous-section 4.2.2.