(i) De la différenciation pédagogique exclusive à la différenciation pédagogique inclusive

La perspective éducative centrée sur l’élève, amplement divulguée et testée avec les élèves considérés avec des besoins éducatifs spéciaux, par les professeurs d’éducation spéciale, n’a pas réussi à s’élargir aux autres professeurs ni à ébranler la perspective de l’enseignement centrée sur les contenus programmatiques, prédéfinis et égaux pour tous. Les contenus continuent à être une fin en soi et seul leur maîtrise permet d’accéder à la certification académique. Même avec la diversification des publics scolaires et sans les accueillir, les contenus programmatiques continuent à être les mêmes pour tous, cependant qu’inaccessibles pour beaucoup. Les réponses pour répondre à la diversité des publics scolaires, quand il y eut la préoccupation de les construire, furent toujours dans le sens d’homogénéiser pour intervenir, en séparant, étiquetant et excluant, à travers des pratiques d’éducation compensatoire, spécialement dirigés vers les déficits.

Passer de la différenciation pédagogique exclusive à la différenciation pédagogique inclusive (Roldão, 2003), centrée sur la classe et sur le curriculum, et croire que ce peut être la meilleure forme pour que les élèves fassent des apprentissages importants, est le dilemme qui se pose à l’éducation inclusive. L’idée qui considère que l’élève doit être enseigné par un adulte pour apprendre est trop enracinée. On oublie le rôle de l’interaction que les contextes et les pairs proposent, que la majeure partie des apprentissages réalisés au long de la vie se fait hors de contextes et situations spécialement destinés à l’enseignement de quelqu’un et que les méthodologies utilisées pour faire apprendre ont été le pari de ceux qui veulent innover et de ceux qui parvinrent à des résultats dans le domaine (Montessori et Freinet, au XXème siècle; Edouard Seguin, au XIXème siècle, Abbé de l’Epée, Valentin Haüy, Louis Braille, au XVIIIème siècle, par exemple). Trop enracinée est l’idée de ce que l’unique responsable par son insuccès est l’élève même, oubliant la grande influence que les contextes ont sur la performance de chacun. (Bronfenbrenner, 1981, Ainscow, Porter & Wang, 1997, par exemple)

De nouveaux enjeux pédagogiques et organisationnels des contextes d’apprentissage (Ainscow, 1991, Wang, 1997), avec un point de mire la coopération et la différenciation pédagogique inclusive, avec des codes différenciés d’accès aux savoirs à réaliser, sont un chemin à suivre, mais il est encore long d’être un enjeu partagé et réalisé du côté des professeurs. La résolution de problèmes, comme stratégie d’enseignement apprentissage, pourra conduire à un enseignement plus coopératif et à des apprentissages plus diversifiés et fonctionnels. Ce sont des pratiques qui requièrent un grand investissement de la part des intervenants, ce qui rend difficile son implémentation.

Le prétexte de ce que les élèves considérés avec des besoins éducatifs spéciaux apprennent mieux dans des environnements spéciaux (ségrégation habillée?) spécialement créés pour eux et avec des personnes spécialement préparées pour eux, n’est pas davantage que le désir de continuation de la stratification sociale et scolaire, la perpétuation de la différenciation pédagogique exclusive et le rejet du droit à vivre et apprendre avec les autres, indépendamment de sa différence, oubliant que plus grand sera l’appui, plus forte sera la discrimination et que l’appui, le support à l’apprentissage, seulement est valide s’il aide à construire l’autonomie de l’élève dans son processus d’apprentissage, en le faisant un apprenti chaque fois plus indépendant.