3.3. Le rôle du professeur de soutien éducatif au Portugal

Au Portugal, le concept d’«enseignant de soutien» est introduit par l’Arrêté 105/ 97, du 23 Août, republié par l’Arrêté 10856/ 2005, du 13 Mai, où l’on peut lire :

Enseignant de soutien – l’enseignant qui a pour fonction de prêter le soutien éducatif à l’école dans son ensemble, à l’enseignant, à l’élève et à la famille, quant à l’organisation et à la gestion des ressources et des mesures différenciées à introduire dans le processus d’enseignement/ apprentissage (3a).

Comme nous l’avons déjà dit, ce nouveau concept a évolué à partir de la désignation d’enseignant d’éducation spéciale. Les fonctions et les rôles qui lui sont attribués ont eux aussi progressés et semblent avoir comme principal mentor Porter (1997).

Les fonctions suivantes sont définies dans le même article:

Ce même article stipule les tâches suivantes comme spécifiques:

‘Le processus d’identification des élèves 106 est toujours articulé avec les professeurs qui exercent des fonctions de soutien éducatif (5.2).’ ‘Jusqu’au 31 Mai de l’année scolaire, l’enseignant de soutien éducatif présente un compte-rendu détaillé, caractérisant le progrès des enfants et des élèves à sa charge ainsi que des activités réalisées. Ce compte-rendu devra être envoyé au conseil d’enseignants ou au conseil de classe, à l’organe d’administration de l’établissement d’enseignement et à l’équipe de coordination des soutiens éducatifs (5.5).’

Continuant l’analyse du même article, celui-ci détermine, au point 4, que, pour les activités de soutien éducatif, des enseignants à formation spécialisée dans des domaines spécifiques soient placés et que, pour les orienter au niveau technique et pédagogique, des équipes de coordination ou des coordinateurs de département soient désignés (4.1). Ces enseignants font partis du cadre du groupement 107 ou du lycée, tant que durera le détachement, et ils pourront garantir le soutien à d’autres établissements éducatifs, nommément à d’autres groupement ou à d’autres institutions proches (7.2 et 7.3).

Au cas où il n’y ait pas d’enseignants à formation spécialisée, d’autres enseignants peuvent être sélectionnés pour assurer les fonctions de soutien éducatif, toutefois, ceux-ci devront appartenir au cadre de l’école ou de la zone pédagogique (9.3).

Selon ce qui est stipulé par l’Arrêté, l’enseignant de soutien éducatif est un professeur à formation spécialisée (ou non) qui intègre le cadre du groupement ou du lycée, auquel on demande la collaboration avec les organes de gestion et de coordination pédagogique (12a, 12c et 12d), l’aide pour la diversification de stratégies et de méthodes éducatives (12b), le soutien aux élèves et aux professeurs respectifs (12c), la participation à l’amélioration des conditions et du milieu éducatif ainsi que l’élaboration de compte-rendu qui documente son activité. Des sept alinéas relatifs aux fonctions, trois sont dédiés à la collaboration avec les organes de gestion et de coordination pédagogique, ce qui dénonce le besoin, de la part de ce professionnel, de travailler en équipe pour co-responsabiliser la gestion exécutive et pédagogique vis-à-vis de l’introduction des mesures nécessaires aux options prises quant au soutien éducatif. Des autre quatre, deux, dans leur ensemble, ont à voir avec l’amélioration des conditions de l’ambiance éducative et pédagogique. L’autre alinéa est en rapport au soutien aux élèves et aux enseignants titulaires de classe. Le dernier, introduit dans la republication du premier Arrêté, a à voir avec la visibilité, par rapport aux instances hiérarchiques, du travail réalisé. Cet accent mis sur la co-responsabilisation de l’enseignant de soutien pour ce qui est de la création/ participation dans les dynamiques de l’école, au niveau éducatif et pédagogique, se fonde sur ce que Ainscow (1991, 1997) et Porter (1997), entre autres, défendent et qui va dans le sens de créer des milieux éducatifs inclusifs/ éducation inclusive, avec la participation des professionnels et d’autres ressources déjà existantes. C’est d’ailleurs, le premier principe énoncé dans la republication de l’Arrêté cité plus haut. On peut dire que l’accent est porté, en premier lieu, sur l’école/ groupement, dans son ensemble et, en deuxième, sur la classe, en ce qui concerne les élèves et les enseignants.

Des compétences au point de vue du prélèvement des besoins, du planning, du démarrage de l’action éducative/ pédagogique et de l’évaluation de l’activité réalisée lui sont exigées :

Nous soulignons le maintient de l’alinéa d) qui renvoie à la collaboration pour le développement du régime éducatif spécial, prévu par le Décret nº319/ 91, du 23 Août, étant donné que ce régime s’encadre dans le domaine de l’éducation spéciale, dans une perspective centrée sur l’élève qui, parce qu’il est spécial, bénéficie de mesures spéciales d’accompagnement, à l’école régulière, contrariant ainsi le principe énoncé «d’égalité d’opportunités de succès éducatif pour tous les enfants et jeunes» (2a) 108 , dans une «école inclusive» (1.1) 109 .

Le Ministère de l’éducation, à travers le Département d’éducation Basique, en 1998, publie le numéro 2 de la collection soutiens Educatifs sur le thème des soutiens Educatifs «Organisation et gestion des soutiens éducatifs», réaffirmant et orientant l’introduction des mesures exprimées par l’Arrêté 105/ 97, du 23 Août.

Après avoir adopté, dans son article, les principes de l’école inclusive, préconisant que les objectifs éducationnels et le plan d’étude sont les mêmes pour tous, il appelle l’attention sur les différences individuelles et sur les contextes d’apprentissage, ce qui conduit au besoin de « rendre flexible l’organisation scolaire, les stratégies d’enseignement, la gestion des ressources e du curriculum, de sorte à favoriser le développement maximisé de tous, en harmonie avec les caractéristiques personnelles et les besoins de chacun » (P.11). Le soutien éducatif est apprécié sous deux angles : le cognitif et le social, focalisant le premier sur l’apprentissage et ses instruments et le second, sur la vie de l’élève à l’école. La construction de l’école inclusive passe aussi, selon le même texte, par la construction de l’identité de l’école, à travers l’élaboration d’un projet éducatif personnel.

Il définit comme participants au soutien éducatif :

De nombreux et diversifiés participants, bien organisés et intéressés au développement personnel et académique de chaque élève du contexte scolaire, sont engagés dans les services de soutien, ce qui pourra faciliter l’établissement de réseaux de communication et d’action efficaces quant à la résolution des problèmes que ces situations déchaînent, dans une perspective systémique et écologique (Bronfenbrenner, 1979, 1981).

Il définit les fonctions de l’enseignant de soutien éducatif à quatre niveaux : (i) avec les organes de gestion et de coordination de l’école et du groupement d’écoles, (ii) avec les enseignants des classes qui ont des élèves à besoins éducatifs spéciaux, (iii) avec les auxiliaires d’action éducative et (iv) avec les élèves, explicitant sept fonctions relativement au premier niveau, cinq pour le deuxième, quatre pour le troisième et il n’en relève aucune pour le quatrième niveau. Nous transcrivons de suite le texte du document cité plus haut, en ce qui concerne cette thématique, parce que nous le jugeons important pour la définition des fonctions du professeur de soutien éducatif et pour la compréhension de celles-ci.

Fonctions des enseignants de soutien éducatif

Avec les organes de gestion et de coordination de l’école et du groupement d’écoles

On s’aperçoit, grâce à l’énoncé ci-dessus, l’existence d’un éventail très élargi et diversifié de fonctions qui, si elles étaient bien réalisées, rendraient l’enseignant de soutien éducatif un participant remarquable vis-à-vis de l’organisation et de la gestion de l’école, en ce qui concerne le soutien éducatif. L’accent mis sur ce domaine se lie au besoin de sensibiliser et de mobiliser la gestion et la coordination des écoles pour qu’elles deviennent efficaces pour tous (Ainscow, 1991). Bien entendu, ceci ne réussira pas si la gestion n’est pas mobilisée et convaincue.

Avec les enseignants des classes qui possèdent des élèves à besoins éducatifs spéciaux

L’enseignant de soutien éducatif apparaît, dans ce document, sous un angle actif de collaboration avec le(s) professeur(s) qui peut se réaliser dans ou en dehors de la salle de classe. Dans le premier cas, cela mène à «l’organisation et à la gestion d’un travail coopératif entre les deux professeurs»; dans le deuxième cas, sa collaboration exige un travail avec les enseignants de l’école, en petits groupes, pour rentabiliser «les ressources et encourager le dialogue et la réflexion conjointe, aussi bien que la gestion coopérative des difficultés au sein de chaque école».

Avec les Auxiliaires d’action Educative

Cette définition et cette mise en pratique de collaboration, en articulation permanente avec le(s) enseignant(s) de la classe, rendent possible un plus grand accompagnement des élèves qui en ont besoin, favorisant aussi la co-responsabilisation envers le travail à faire à l’école, en tant que communauté éducative.

Avec les élèves

A chaque fois que l’on se trouve en présence de spécificités culturelles, de divers rythmes de travail ou bien d’élèves qui exigent une flexibilité du curriculum et des méthodologies de pédagogie différenciée, le soutien doit être, de préférence, assumé par le(s) professeur(s) de la (des) classe(s).

Pour les situations que le professeur de la classe considère nécessaire, spécialement pour les cas où l’accès au curriculum exige l’introduction de techniques, de langages alternatifs ou d’équipement spécifique comme ceux employés chez les élèves qui ont un handicap visuel, auditif, moteur ou qui souffrent de plusieurs handicaps, le professeur de soutien éducatif pourra directement aider l’élève. Le soutien doit, dans ces cas, être réalisé durant un espace de temps concerté entre les deux enseignants et inséré dans la dynamique de la classe.

Dans le cas des élèves qui ont des difficultés transitoires quant aux apprentissages instrumentaux de la lecture, de l’écriture et du calcul, ce peut être bienfaisant de leur attribuer un soutien complémentaire intensif, hors horaire scolaire, de façon à ce qu’ils puissent, le plus rapidement possible, accéder à la généralité des matières du curriculum. Toutefois, les soutiens, hors de la salle de classe, auront toujours un caractère exceptionnel et ne devront être employés qu’après l’épuisement total des autres solutions.

Le soutien direct à l’élève est vu comme une mesure exceptionnelle à n’être adoptée que dans des situations très particulières et pour un travail très spécifique, durant un espace de temps limité et après avoir épuisé toutes les autres mesures de soutien.

Un Arrêté de 1978 a crée un subside pour les enseignants de l’enseignement spécial, quand ils travaillent dans ce domaine. Ce subside se maintient de nos jours, quoiqu’il ait déjà été contesté à plusieurs reprises. L’Arrêté nº600/99, du 22 Juillet, déclare que la charge horaire de ces enseignants devra être réduite de deux heures par semaine.

Relativement aux professeurs de soutien éducatif, le Conseil National de l’éducation, en 1999, a émis l’Avis nº 3, qui recommande :

‘Le profil du professeur de soutien éducatif doit intégrer des aspects relatifs à sa préparation académique et pédagogique, mais aussi, à sa capacité de commander (qui devra s’articuler convenablement avec le pouvoir institutionnel des organes),à sa capacité de communication et à sa facilité d’établir des rapports entre institutions.’ ‘On estime qu’il est nécessaire de garantir la stabilité de travail des professeurs de soutien (…).’ ‘On devra éviter l’attribution de privilèges rémunératoires ou professionnels qui puissent créer des situations d’injustice et qui rendent difficile l’insertion de ces enseignants dans le milieu scolaire (46.6).’

Le Conseil National de l’éducation synthétise les soucis qui, en ce moment, sont évalués dans ce domaine. Cependant, le plus important c’est l’analyse que le législateur fait au sujet de ces recommandations et la volonté politique de les mettre en route. Il ne sert de rien d’avoir de bonnes lois si leur exécution n’est pas exigée.

Selon le compte-rendu du Ministère de l’éducation (Observatoire des soutiens éducatifs), pendant l’année scolaire de 1998/99, il existait 192 équipes de coordination des soutiens éducatifs, qui dans la majeure partie des cas, avaient pour étendue le Département, et qui surveillaient du point de vue technique et scientifique 6 419 enseignants de soutien éducatif. De ceux-ci, 24% avaient une formation spécialisée et à chaque professeur spécialisé en éducation spéciale correspondaient 12 élèves reconnus avec des besoins éducatifs spéciaux. La plupart des enseignants de soutien éducatif (63%) appartenait à l’enseignement primaire 110 et avait moins de 3 ans d’expérience professionnelle (58%). De la totalité des enseignants du pays, 28% exécutaient des fonctions à la Direction régionale d’éducation de Lisbonne 111 . D’après l’analyse du degré de satisfaction des organes d’administration et de gestion des écoles par rapport au travail réalisé par les enseignants de soutien, ceux-ci se disent satisfaits du travail exécuté avec les enseignants de l’école, avec l’organe de gestion, avec les familles et de leur participation à l’élaboration du projet éducatif et du plan annuel d’activités. Ils se montrent moins satisfaits en ce qui concerne le soutien à la gestion du curriculum, à la définition de priorités en termes de formation et au travail articulé avec les services d’orientation et de psychologie (SPO), domaines dans lesquels les enseignants de soutien eux-mêmes reconnaissent avoir des difficultés. Les aspects moins positifs ont à voir avec le temps, considéré court, pendant lequel les professeurs restent à l’école, le planning avec les professeurs de la classe et le manque d’assiduité. Relativement à ce que les professeurs de soutien préfèrent faire, il en ressort, en premier lieu, le travail direct avec les élèves, suivi de la coopération avec les professeurs, le soutien aux familles, la stimulation et la participation aux projets et la promotion de stratégies en salle de classe. Selon la même source, plus ou moins deux tiers des enseignants de soutien révèlent leur volonté de continuer à exercer leurs fonctions afin de poursuivre les projets commencés et parce qu’ils aiment leur travail; les autres justifient leur option d’abandon des fonctions par des raisons qui se prennent à la fatigue causée par les déplacements à plusieurs écoles et parce que la réduction de la charge horaire les empêche d’avoir droit à une préretraite.

Nous soulignons le fait que 24% des enseignants ont une formation spécialisée et que 58% possèdent seulement 3 ans d’expérience professionnelle. Nous frisons que, pour accéder à la formation spécialisée, il faut 5 ans d’expérience dans l’enseignement.

Selon la même source et le compte-rendu de 2000/2001, le nombre d’enseignants de soutien éducatif affectés au système, pendant cette année scolaire, était de 6 877. D’entre eux, 57% appartenaient à l’enseignement primaire et 31% avaient une formation spécialisée en éducation spéciale. On vérifie donc un ratio de 1 enseignant pour 11 élèves, à l’échelle nationale. Dans le dernier compte-rendu divulgué, de 2002/2003, le nombre de professeurs de soutien éducatif était de 7211 et le ratio, de 1 enseignant pour 9 élèves à besoins éducatifs spéciaux 112 .

Notes
106.

L’italique est de la responsabilité de l’auteur de ce travail. Tout le processus a comme point de départ la catégorisation des élèves. .

107.

Groupement est un concept récent d’organisation des écoles.

108.

Arrêté 105/ 97, du 13 Août et Arrêté 10856/ 2005, du 13 Mai.

109.

Arrêté 10856/ 2005, du 13 Mai.

110.

Niveau d’enseignement dans lequel nous allons développer ce travail de recherche.

111.

Région où cette recherche va être menée. Les régions éducatives du pays sont cinq.

112.

Les critères des écoles pour identifier les enfants à besoins éducatifs spéciaux ne sont pas uniformes.