Parvenir à comprendre le phénomène étudié, en donnant la « parole » aux enseignants de soutien éducatif à partir de ce qu’ils écrivent en répondant aux questions, fut notre stratégie mise en œuvre comme le dit Britzman, cité par Connelly et Clandinin (1990:4):
La parole est le signifié qui réside en l’individu et qui lui donne la capacité pour participer dans la communauté… La lutte pour avoir la parole commence quand une personne tente de communiquer des signifiés à une autre. Trouver les mots, dire ce que l’on pense et être écouté par les autres font complètement parties de ce processus… La parole suggère des relations : la relation de l’individu avec le signifié de son expérience, et, donc, avec le langage, et la relation de l’individu avec l’autre, dès lors que la compréhension est un processus social.
McDonald (1992: 8) insiste sur la nécessité de donner la parole aux enseignants :
Je suggère que nous commencions par écouter attentivement ce que les enseignants ont à dire. Les enseignants sont, en fin de compte, ceux qui sont les plus près de l’enseignement… Ils connaissent l’incertitude et le mode pour la gérer… Le propos de ce livre est centré sur les paroles des enseignants, à commencer par ma parole modérée… c’est une chronique sur le comment apprendre à lire l’enseignement dans les paroles des enseignants.
De tous les enseignants, ce sont, sans doute, les enseignants de soutien éducatif qui sont ceux dont la parole est la moins écoutée. Selon un recueil de données réalisé en octobre 2004, à la Faculté de motricité humaine, sur les travaux de recherche développés en vue de l’obtention du grade de Master 151 (Mestrado em Educação Especial, 1994 - 2003), sur un total de 72, seulement un avait comme sujets d’étude, les enseignants de l’éducation spéciale. Le même résultat peut être appliqué quant au développement des thèses de doctorat 152 .
Dans notre dissertation de Mestrado, en 1993, nous leur avons donné la « parole », en faisant de ces enseignants, nos sujets d’étude. Nous allons en faire de même dans le présent travail de recherche. La réussite des élèves passe aussi par la qualité de leurs enseignants, par la forme par laquelle ils pensent et agissent, ainsi que l’affirme Yonemura (1986: 4): « pour mieux comprendre les bons éducateurs, il est impératif de savoir plus au sujet de leur mode de penser – de leurs idées, valeurs, croyances – et de la façon dont toutes ces choses sont mises en pratique, et encore du signifié que tout ceci peut prendre pour les enfants»
Dans cette étude, on va faire le recueil des comportements, structures et systèmes de relations socio-éducatives, qui font fonctionner et changer l’univers de la population définie, celle des enseignants de soutien éducatif du premier cycle de l’enseignement de base, de la région éducative de Lisbonne, et non pas les comportements, pour eux-mêmes, des unités qui le composent.
En raison de la taille de la population cible (724 enseignants de soutien éducatif du 1.º cycle 153 ), de la nécessité de recueillir de nombreuses informations de nature quantitative ou qualitative sur chaque individu, afin de parvenir à caractériser les sujets dans ce qu’ils sont, pensent, font et aimeraient faire, nous avons opté pour la constitution d’un échantillon représentatif de cette population cible, en ne réduisant toutefois pas la scientificité à la représentativité, en ne confondant pas « la scientificité avec la représentativité » (Quivy & Campenhoudt, 1998:161). Les questions de représentativité ont à voir avec la généralisation de l’information, ce qui, selon Bogdan et Biklen (1994: 66) n’est pas une question qui préoccupe les chercheurs qualitatifs, en général.
‘L’approche de la généralisation (...) est adoptée par les chercheurs qui s’intéressent au développement de qu’on désigne par une théorie fondamentale (…) d’autres chercheurs qualitatifs pensent sur les questions de la généralisation, en entendant que leur travail est celui de documenter méticuleusement un contexte déterminé ou groupe de sujets, et qu’il revient aux autres la tâche d’apercevoir le mode d’articulation avec le cadre général.’Dans n’importe quel cas, il est toujours nécessaire de faire des choix, prendre des décisions, établir des limites, partiellement arbitraires au départ, qui vont être affinés dans le cours du processus.
Bien que nous ayons eu accès à la liste complète des enseignants de soutien éducatif du premier cycle de l’enseignement de base 154 qui exercent des fonctions de ce cycle même, soit 724 individus, les techniques d’échantillonnage aléatoire simple se sont avérées difficiles d’application compte tenu que la région éducative recouvre 249 regroupements d’écoles, avec 1508 écoles du premier cycle, réparties en 51 conseils administratifs. Une telle structure nous exposait à rendre l’accès à l’individu presque impossible.
Nous avons dû solliciter l’autorisation de la Direction régionale de l’éducation de Lisbonne (DREL 155 ), entité qui supervise les questions éducatives dans cette région, pour la réalisation du projet de recherche, aussi bien que pour l’application d’un questionnaire, comme ce fut le cas pour celui qui nous concerne.
Au niveau des Équipes de coordination des soutiens éducatifs (ECAE’s 156 ), de la Direction régionale de l’éducation de Lisbonne (DREL), soit un total de 20 équipes, il y eut un premier contact personnel direct et/ou téléphonique avec les coordinateurs afin de leur expliquer les objectifs et solliciter leur collaboration. L’adhésion et la disponibilité des coordinateurs furent, dès le début, le premier critère auquel nous avons recouru pour sélectionner les sujets de l’étude. Seul un coordinateur s’est montré peu disponible en créant divers obstacles, ce qui nous conduisit à renoncer, dès lors que nous avons recueilli l’adhésion pleine de l’autre coordinatrice de la même zone géographique.
Au départ nous n’avons pas stipulé un nombre fixé de sujets et nous avons remis des questionnaires à remplir à tous ceux qui répondaient aux critères établis, à savoir : être enseignant de soutien éducatif du 1er cycle de l’enseignement de base en exercice dans ce cycle même pour y assurer des fonctions de soutien éducatif, et accepter de collaborer. Nombre ont adhéré immédiatement à notre projet et une proportion acceptable retourna le questionnaire complété. Ainsi, avons-nous recueilli 340 questionnaires parmi la population cible, soit un taux de sondage de 46,96%. Cet échantillon a donc été obtenu par une méthode qui appartient à la catégorie des méthodes raisonnées empiriques. Nous allons présenter une description des principales variables caractérisant les sujets de cet échantillon.
La recherche en éducation, au Portugal, a été un ajout aux cours de mestrado. Les thèses de doctorat demeurent encore très rares.
La recherche, au Portugal, est essentiellement faite pour obtenir un grade académique.
Sur un total de 857 enseignants de soutien éducatif, 724 exercent leurs fonctions dans le 1er cycle (année scolaire 2003/2004). Il existe une mobilité des enseignants de soutien éducatif : les enseignants du 1er cycle peuvent exercer des fonctions dans les autres cycles de l’enseignement basique ou secondaire, et réciproquement, mais c’est moins fréquent. Ceci explique la différence entre les deux nombres présentés 857 et 724.
La liste fut fournie par la Direcção Regional de Educação de Lisboa, liste qui fut opportunement diffusée sur Internet.
Portugal est divisé en cinq régions éducatives: Norte, Centro, Lisboa, Alentejo e Algarve, chacune avec sa Direction, dotée d’autonomie administrative, assure l’orientation et l’appui aux établissements d’éducation et d’enseignement non supérieur.
L’Équipe de Coordination des soutiens Educatifs (ECAE), créée par le Despacho 105/97, du 1erjuillet, est l’organe local auquel tous les enseignants de soutien éducatif sont rattachés et assure des fonctions de gestion pédagogique et administratives des appuis éducatifs dans les écoles. Ce Despacho a souffert du réajustement apporté par le Despacho 10856/2005, du 13 Mai, mais cet objet n’a pas été touché par les modifications. Au moment de la finalisation de notre travail, les ECAE ont été supprimées.