Réflexion sur les méthodes de recueil et d’analyse des données

Questionnaire

Le questionnaire, un instrument en principe quantitatif, représente, dans cette recherche, une large, sans doute trop dans une dimension qualitative, résultante d’un procédé, plus ou moins inconscient, fuit d’une pratique d’investigation davantage liée aux méthodes qualitatives, pensant que par elles nous pouvons tirer une information qui permet une « meilleure compréhension », parce que plus contextualisée et plus personnalisée, de la part de l’informateur. Dans cette perspective, nous ne pourrons cesser de relever la complémentarité du qualitatif et du quantitatif que ce soit tant au niveau de la nature des données qu’à celui de l’analyse.

De notre part, il y avait une forte préoccupation à l’égard des réponses recueillies aux deux dernières questions, avec une priorité pour la dernière qui sollicitait une grande réflexion. Malgré cela, les personnes écrivirent tant, ceci principalement dans la toute dernière question, que nous avons recueilli un texte de 71 pages, compilé en Annexe 4. Après la mise en œuvre d’un questionnaire long et très ouvert, le résultat fut surprenant. Tout paraît comme si les enseignants s’étaient sentis défiés par cette question et avaient réagi en relevant le défi, ce qui naturellement nous a obligée à réaliser un long travail d’analyse, explicité au travers de 50 pages de texte résultant de l’analyse de contenu. Si, d’un côté cette analyse fut longue et laborieuse, d’un autre, elle nous a apporté la satisfaction personnelle de n’avoir pas posé une question considérée comme inopportune et introduisant un inconvénient. Ceci nous a permis d’accéder à un ensemble d’informations qui nous aidera certainement à mieux comprendre ce monde difficile du soutien éducatif ainsi qu’un constat relatif à la volonté ou non de construire une réponse valide pour les enfants et les jeunes avec des problèmes, dans notre système éducatif, qui, par ailleurs, souffre de grandes contradictions et défis, les uns plus justes que les autres, pas toujours préoccupé par une meilleure qualité pour ses usagers.

Il convient de remarquer aussi le fait que les répondants ont « adopté » Miguel, dans leur discours, avec une sorte de tendresse. Nous observons que les enseignants utilisèrent le nom Miguel dans leur texte, ce qui pourra indiquer un certain transfert de cette simulation vers leur propre réalité.

Le modèle adopté pour la plupart des questions fermées a été celui d’une variable qualitative ordinale avec les 4 modalités suivantes : 1= jamais, 2=parfois, 3= presque toujours, 4=toujours. Nous n’avons pas obtenu le résultat escompté dans la mesure où il y eut parfois une indifférenciation entre, d’une part, « toujours » et « presque toujours » et, d’autre part, « jamais » et « parfois », ou encore des réponses contradictoires mettant en évidence un manque de réflexion sur l’échelle utilisée dans son application à la réalité. Ainsi quand une enseignant déclare travailler « toujours » selon la modalité « soutien direct à l’élève, individuellement », il ne peut pas, par exemple, « parfois » réaliser, dans le même temps, un « soutien direct à l’élève, intégrant les activités de la classe ». Nous avons ainsi remarqué, à quelques reprises, un manque de cohérence des réponses fournies par un individu, fait pas toujours facilement visible dans un questionnaire (Ghiglione et Matalon, 1992), mais que nous avons pu identifier lors de la saisie des données et de l’analyse préliminaire. Ce fait nous a obligée à recourir à une certaine pondération et à prendre des précautions particulières dans l’analyse des données.

L’usage même du codage 1 pour « jamais », 2 pour « parfois », 3 pour « presque toujours » et 4 pour « toujours », a été une source de perturbation. Nous aurions dû mettre les signifiants en face des codages numériques pour faciliter la mémorisation et aider les sujets à répondre. Nous avons trouvé parfois une croix au lieu du codage numérique : ce peut être par distraction, par le fait d’être pressé de finir, ou par « paresse » de vérifier le code.

Nous aurions dû mettre une question pour localiser géographiquement les réponses. Son absence n’a pas permis de mettre en lien les réponses obtenues avec les contextes dans lesquels elles ont été produites. Il nous a manqué aussi une question en lien avec le travail de collaboration avec l’enseignant de classe, pour pouvoir comparer cette collaboration à celle des autres professionnels.

Les plus grandes difficultés sont celles de construire l’instrument parfait et de parvenir à susciter chez les répondants une certaine réflexion qui contrarie l’automatisme du remplissage.

Globalement nous dirions que le questionnaire devrait avoir été construit en ayant comme grand objectif l’identification des pratiques qui nient l’accès à une éducation inclusive, au travers du non accès au curriculum ordinaire 167 , et la reconnaissance des pratiques facilitatrices d’une éducation inclusive, au lieu de se centrer sur les pratiques des enseignants de soutien éducatif en fonction de l’élève considéré avec des besoins éducatifs spéciaux.

Notes
167.

Nous entendons par curriculum l’ensemble des activités d’apprentissage que l’école propose à ses élèves.