En analysant la première catégorie que se détache au niveau quantitatif, réaliser un soutien direct à l’élève avec des besoins éducatifs spéciaux (28,5%), on peut faire des regroupements et faire ressortir les domaines d’intervention dans lesquels les enseignants de soutien éducatif le mettent en application, comme le montre la Figure suivant:
Dans chaque domaine, on peut faire ressortir des stratégies, comme le montre le tableau suivant:
Au sujet du soutien direct à l’élève, c’est au niveau de la relation, en accord avec la quantité d’information émise, c’est à dire 53,2%, soit 306 unités sur le 575, que ces enseignants disent que les efforts doivent être portés.
En première position dans la catégorie relation, ils disent vouloir établir des liens affectifs réciproques, (18,6% soit 57 unités sur les 306), et être très attentifs à l’élève même pour pouvoir le récompenser, quand il fait des progrès, valoriser, négocier le processus avec lui et le rendre responsable, en rendant toujours adéquat l’action à son profil personnel. Ils disent qu’il est nécessaire de le motiver, mais aussi de le punir. Ils disent encore qu’il faut user de fermeté et lui faire comprendre les conséquences de ses actes. La récompense pour ses progrès s’accomplit essentiellement au travers du «renforcement positif» qui doit être appliqué quand l’élève agit bien, en faisant des «éloges», «en encourageant», et en créant un «système de récompenses». La valorisation de ses «réussites et progrès», ou simplement de son «travail», passe par le «stimulus» constant et par le «développement de l’auto-estime». Il est important de négocier le processus avec l’élève, en recueillant son «opinion sur ses comportements et attitudes», en lui faisant «comprendre que il est celui qui devra tracer son projet d’inclusion», en conversant avec lui, en l’impliquant dans la planification et dans l’exécution, dans la réflexion et dans l’évaluation. Il est nécessaire de motiver l’élève, il devra trouver les raisons valides pour agir, étant important de «promouvoir des tâches dans l’intérêt de l’élève», lui proposer le «choix des tâches», «lui attribuer des tâches qu’il peut réussir» et «faire ressortir ce qui existe de positif en lui». Il est aussi nécessaire de punir l’élève, en établissant des «punitions» ou des «renforcements négatifs», quand il n’accomplit pas ce qui a été préalablement établi. L’ «adoption d’attitudes fermes, de la part des éducateurs», «en exigeant qu’il accomplisse ce que lui-même a programmé» revêt un caractère, de la part de ces enseignants, contraire à ce qui se passe dans quelques écoles, où les élèves avec des besoins éducatifs spéciaux ne font simplement que ce pour quoi ils ont de l’appétit 189 . La complicité avec l’élève, en le rendant protagoniste de son propre processus de croissance, émerge dans les expressions comme celles-ci: «Il est nécessaire que (…) Miguel perçoive qu’il ne peut blesser les autres enfants», «lui faire entendre que son comportement doit changer» ou «sensibiliser Miguel aux effets de ces actes agressifs» (Annexe 6).
L’établissement d’une relation forte avec les élèves est le point le plus fort de l’action des enseignants de soutien, comme on peut le voir par la grande quantité et diversité de l’information émise dans cet item (306 unités sur les 575 centrées sur le soutien direct à l’élève). Dans les textes émis, nous passons près d’un discours de grande complicité avec Miguel, d’un discours d’une tendresse qui exprime aussi l’énorme volonté de résoudre la situation, en faisant le mieux possible et de la meilleure manière, comme dit Q197: «L’amour dépasse de nombreuses agressivités» ou Saint-Exupéry (1997: 68): «Mais, si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde».
Le soutien se développe aussi autour des apprentissages (32,7% soit 188 unités sur les 575). «Essayer de promouvoir la réussite scolaire (normalement ces élèves ont des "crises" parce qu’ils sentent ignorants) comme facteur facilitateur de la normalisation des comportements et promoteurs de l’auto-estime» (Q165) sera une bonne stratégie, souvent ignorée par les enseignants même qui trouvent que les apprentissages pour ces élèves ne sont pas très importants. La fonction de l’école est d’enseigner et les élèves vont à l’école pour apprendre, ce qui, parfois, est oublié.
L’apprentissage, selon ces enseignants, doit se produire, surtout, en créant des stratégies pour modifier les comportements: «contrats par objectifs, programmes d’intervention qui permettent d’implémenter des comportements plus adaptatifs, des stratégies de résolution de problèmes et de gestion des conflits, des stratégies de "time-out" dans les situation de cris, objectifs opérationnels e médication adéquate, entre autres (Annexe 6). Notons que, selon les réponses émises, c’est le domaine de la socialisation qui est la première à devoir être travaillée. A l’intérieur du même contexte, on observe qu’il est nécessaire de développer des activités alternatives extérieures à la salle de classe: sportives et ludiques, sans oublier les animaux et la floriculture ainsi que les travaux avec l’ordinateur ou à la bibliothèque. Diversifier, pour ces enseignants, veut dire réaliser des activités et utiliser des matériaux diversifiés, mais aussi employer une «pédagogie différenciée», «instruction directe», travailler dans des «espaces différenciés» et avec «différentes techniques»; il est nécessaire d’ «organiser des routines», «avoir des temps d’exécution très courts», «travailler avec des modèles positifs» et «ignorer les comportements inadaptés». L’apprentissage devra se développer, selon l’information recueillie, en partant de l’évaluation des comportements de l’élève, dans les modalités de l’auto et de l’hétéro-évaluation en fin de journée. Dans l’information, est présente la préoccupation constante d’impliquer l’élève dans son processus d’apprentissage. Travailler avec l’élève e n petit groupe, en utilisant le jeu comme stratégie, est une autre forme d’accéder aux apprentissages au niveau de la socialisation, au travers de laquelle on peut coopérer, réfléchir, relaxer, dialoguer et promouvoir l’inclusion dans le groupe. Leur enseigner comment on fait avec des exemples très concrets, en définissant des objectifs très précis, susceptibles d’être atteints, sont aussi des points saillants de l’intervention à réaliser par ces enseignants de soutien, peut-être parce qu’ils savent que nombre d’élèves avec des besoins éducatifs spéciaux ont des difficultés à s’apercevoir de la globalité de la tâche, d’où la nécessité de la diviser en petites étapes plus concrétisables et, ainsi, avec un plus forte probabilité d’obtenir un succès immédiat.
L’autonomie signifie une plus grande présence de l’adulte pour l’accompagnement de l’élève, représentant 12,4% de l’information recueillie, soit 71 unités sur les 575, pouvant signifier, pour ces enseignants, la nécessité de renforcer la présence de l’adulte au côté de l’enfant pour qu’il fasse des apprentissages, fruit de la tradition de l’école: les élèves apprennent essentiellement avec l’adulte, l’enseignant, mais plus grande est la présence de l’adulte, moins grande est l’autonomie pour l’élève.
Vigotsky (1985) et Bandura (1979), entre autres, nous font penser à d’autres formes d’apprentissage, peut-être plus efficaces. Ces enseignants de soutien, par la quantité de l’information émise à cet item, paraissent vouloir dire qu’une des principales stratégies à mettre en œuvre sera précisément un grand accompagnement de la part de ces enseignants. Serait-ce qu’ils ont peur de perdre l’influence envers les écoles et les élèves, ou bien serait-ce qu’ils sont convaincus que c’est le meilleur pour les élèves? Notons que ce soutien est pensé surtout en raison de la quantité: «l’enseignant de soutien éducatif [devra] l’accompagner le plus grande nombre d’heures possible.» (Q98), en établissant une relation à deux, surtout en dehors de la salle de classe: l’élève «peut développer d’autres activités, en dehors de la salle de classe, avec l’enseignant de soutien éducatif» (Q265).
Sortir l’élève de la salle de classe pour faire des apprentissages, quels qu’ils soient, n’est pas un problème pour les enseignants de soutien éducatif, c’est trop habituel. Peut-être n’ont-ils pas pensé que chaque fois que l’élève laisse les autres élèves, il est éloigné de «l’histoire» qu’ils sont en train de vivre ensemble. Quand il revient, «l’histoire» peut être terminée et ils n’ont pas eu la chance de vivre son issue…
Dans cet accompagnement, l’enseignant de soutien peut être remplacé par un adulte, un autre enseignant: «Miguel devra avoir toujours avec lui (ou presque toujours) un enseignant qui l’accompagne dans les cours et, si possible, dans l’intervalle, afin de l’aider à contrôler son agressivité.» (Q121). L’aide de l’action éducative est aussi sollicitée pour accompagner Miguel: «dans ce cas, il me paraît indispensable, pour que le travail de la classe ne soit pas perturbé, que demeure en permanence avec l’élève un auxiliaire d’action éducative, pour faire avec lui une analyse et un registre des comportements, et qu’il puisse sortir avec lui de la salle de classe dans les moments où il perturbe le plus» (Q325).
La situation contextuelle (1,7%) est aussi un des domaines de l’intervention préconisés par ces enseignants, se concrétisant dans l’adaptation de la classe, transformation de l’enseignant ou de l’école. Ces enseignants parlent de petites classes (pas plus de 18 élèves). Les règlements officiels déterminent que la classe avec des élèves reconnus avec des besoins éducatifs spéciaux (maximum: 2) ait, si possible, vingt élèves. Si c’était Ainscow (1997) qui parle, il dirait que le fondamental pour réussir à l’école sont justement les stratégies utilisées par les enseignants des classes ordinaires mais aussi le travail développé à l’intérieur de la classe ordinaire, en mettant au second plan, le nombre d’élève par classe.
Affirmation qui découle de l’observation et du témoignage des enseignants de soutien éducatif.