L’élève reconnu avec des besoins éducatifs spéciaux est inclus dans l’école, quand il est objet de son intervention.

En considérant la quantité d’information émise relativement aux deux aspects considérés, l’opinion des enseignants de soutien va dans le sens de ce que le principal responsable pour l’inclusion de l’élève reconnu avec des besoins éducatifs spéciaux à l’école régulière [ordinaire] est l’école même, ce qui se manifeste par la forme par laquelle se fait l’accueil des élèves, par laquelle s’implémente une philosophie de l’école inclusive, par laquelle se rend disponible le soutien technique/spécialisé et humain, par laquelle surgit et se déploie la coopération entre tous les intervenants, par laquelle, au niveau de son organisation et fonctionnement, on prend en compte les droits et les devoirs, les capacités et les besoins de ses élèves qui furent reconnus avec des besoins éducatifs spéciaux.

À partir de ce que les enseignants de soutien ont dit, un élève est inclus à l’école «quand il est véritablement accueilli par cette école et que celle-ci s’organise de manière articulée et ouverte, reflétant et développant un travail dans lequel tous les élèves ont leur place et partage de façon respectueuse et solidaire les différents savoirs» (Q65). La nécessité de bien accueillir l’élève se détache dans l’ensemble de l’information, en situant cet accueil dans le milieu ambiant, comme le dit Q25: «un élève est inclus à l’école quand l’environnement lui offre les conditions du bien-être (…)»; dans la communauté éducative en général: «il [l’élève considéré avec des besoins éducatifs spéciaux] est pleinement accepté par la communauté scolaire et impliqué dans des activités qui le concernent (…), dans un compromis avec la famille et toutes les personnes de l’école» (Q311); dans la relation que les autres établissent avec lui: «l’élève avec des besoins éducatifs spéciaux est inclus à l’école quand il est accepté sans préjugés de la part de ce qui l’entourent» (Q22); dans le fonctionnement de l’enseignante: «quand l’enseignante du groupe-classe le considère comme son élève de la même manière que les autres et le fait participer à toutes les activités compatibles avec ses potentialités et jamais ne le désigne comme "un enfant du soutien"»(Q77) ou simplement parce qu’il fait partie de l’école: «quand il entre pour la première fois dans l’école» (Q18).

Cet accueil qui couvre de nombreux aspects fait penser qu’«une autre école est possible»; une école dans laquelle se pratique l’«hospitalité» qui, dans son plein sens, correspondrait à la pleine acceptation de l’autre qui, bien que sujet soumis à des règles passerait de la condition d’ "étranger" à celle d’ "hôte"» (Canário, 2006:42). Ce même auteur continue sa réflexion:

‘C’est dans la manière de traiter nos élèves que réside la clé du problème (…). Pour construire une école fondée sur l’hospitalité, ce dont nous avons besoin n’est pas de plus de "réformes", ni plus de "formation", il nous faut surtout avoir la capacité de "désapprendre" pour construire quelque chose de nouveau (…) au-delà de la capacité de "désapprendre", serons-nous aussi disponibles [pour construire quelque chose de nouveau/différent pour qu’aucun élève ne se sente intrus ou non-désiré? (p.43)’

Les questions d’un bon accueil fait aux élèves auxquels sont reconnus des besoins éducatifs spéciaux ont pour base, ainsi que les enseignants de soutien qui ont répondu le disent, l’introduction d’une philosophie de l’école inclusive , c’est à dire, une école dans laquelle « on promeut les chances d’apprentissage effectif pour tous les élèves.»(Q43), dans laquelle elle-même adapte «sa pratique aux besoins réels de tous les enfants qui la fréquentent.» (Q174), dans laquelle «le travail avec la classe est planifié en tenant compte des potentialités/limites et que ceci constitue une plus value pour le développement de tous» (Q49), dans laquelle l’élève auquel sont reconnus des besoins éducatifs spéciaux, est «un élève qui relève d’un processus d’enseignement-apprentissage orienté par les principes d’égalité des chances éducatives et sociales.» (Q145).

La nécessité exprimée d’introduction d’une philosophie de l’école inclusive, en adoptant comme principe l’éducation inclusive, vient dans le sillage des grands principes préconisés par la Déclaration de Salamanque (1994) et de ceux qui lui ont donné suite directement ou indirectement. Aujourd’hui, plus que jamais, il y a nécessité de nous questionner «sur le statut de l’institution scolaire et sur sa vocation à faire cohabiter des publics différents» (Dupriez & Draelants, 2004: 162), parce que «au fond, la meilleure école, comme la meilleure ville, est celle qui fait vivre ensemble les individus les plus divers. Moins l’école soit homogène socialement et culturellement, mieux elle remplira son rôle d’éveil des personnalités» (Touraine, 1995: 92). Crahay (2000, cité par Dupriez & Draelants, 2004: 160) «prône une école du futur pensée á partir d’une éthique, combinant deux valeurs cardinales: la solidarité et l’ouverture aux autres, dans leur diversité culturelle» et humaine, ajouterions-nous.

L’ouverture à la diversité passe par celle de l’école non seulement à tous les élèves mais aussi autres professionnels, pour que puissent être constituées des équipes techniques, spécialisées et multidisciplinaires, comme le dit Q305: «quand l’élève est dûment accompagné par les techniciens professionnels qui intègrent des équipes multidisciplinaires et que celles-ci établissent un partenariat avec l’école et ce qui sont chargés de l’éducation, pour la réussite des élèves», ayant ainsi «la capacité technique et humaine pour accueillir un enfant avec des besoins éducatifs spéciaux.» (Q292).

Selon les enseignants de soutien de l’échantillon, l’école doit promouvoir avec force la coopération entre tous les intervenants , pour qu’il ait «un travail conjoint avec les enseignants, les élèves du groupe-classe et les autres techniciens professionnels (thérapeutes, psychologues, etc.) (Q109), «un travail de partenariat et d’implication de tous les agents de communauté éducative» (Q208), ce qui est dans la perspective du discours de Ainscow (1997: 17): «nous encourageons spécifiquement, les enseignants à former des équipes et/ou des partenariats dans lesquels les membres respectifs s’accordent pour s’entraider à exploiter les aspects de leur pratique».

Une école qui a comme objectif d’inclure ses élèves, quand elle s’organise, détermine les règles de fonctionnement et élabore son plan d’activités, a comme point de départ les droits et les devoirs, les capacités et les besoins de ses élèves comme un tout, en considérant la diversité de ceux-ci.

Cette focalisation sur le contexte scolaire comme priorité met l’accent sur la ligne qui est en train de se développer, en termes éducatifs, de ce que l’«apprentissage est, dans une grande mesure, un processus social.» (Ainscow, 1997: 16) et que les contextes dans lesquels il se produit, sont co-responsables du succès ou de l’insuccès de celui-ci ( Bronfenbrenner, 1979; Azevedo, Ferreira & Ponte, 1999). C’est encore Ainscow (1997:21) qui rapporte «que le culture du lieu de travail a un impact direct sur la forme par laquelle les enseignants voient leur travail et, sans aucun doute, voient leurs élèves.» La propre évolution des concepts: d’«enfants déficients», «enfants avec déficience», on passe à «enfants en situation de déficience», est le résultat du déplacement de la centration de la problématique sur l’enfant même vers la co-responsabilisation des contextes dans la recherche, le développement et le perfectionnement de leurs réponses aux défis qu’ils [enseignants] rencontrent, ce qui fait, dans le cas de l’école, que Rosenholtz (1989) utilise la dénomination «école en mouvement».