(i) Le soutien direct à l’élève avec des besoins éducatifs spéciaux

Selon l’information recueillie, ces enseignants de soutien centrent leur dynamique d’intervention, ayant comme objectif l’élève, sur le soutien direct ou sur un diagnostic de sa problématique. Les domaines d’interventions sélectionnés pour le soutien direct sont en premier lieu la relation, suivi de l’apprentissage et de l’autonomie. Le diagnostic prend en compte, en premier lieu, l’élève, après le contexte scolaire et, enfin, le contexte familial.

L’investissement dans la relation a comme point saillant, l’établissement d’une relation positive entre l’enseignant de soutien et l’élève, ce qui va augmenter le degré de dépendance dans la relation avec l’adulte. Cet aspect est aggravé quand, à propos de l’autonomie, les stratégies d’intervention vont dans le sens d’un accroissement de l’accompagnement de l’élève, de la part de l’enseignant de soutien ou de l’adulte, ce qui se traduit dans une «assistance de fort à faible, de riche à pauvre, à tonalité paternaliste et assimilatrice plus ou moins consciente» (Gardou, 1985: 265).

Cet excès de présence de l’adulte, c’est à dire l’adulte «accroché» à l’enfant, ne facilite pas l’interaction avec leurs pairs et l’échange d’expérience et de savoirs qui en découle. Le fait que l’élève reconnu avec des besoins éducatifs spéciaux soit la «propriété» de l’enseignant de soutien éducatif diminue son appartenance relativement au groupe de pairs, avec les inconvénients qui adviennent de ce fait. Cependant, la préoccupation exprimée de négocier le processus avec l’élève est un signal important pour commencer à donner la parole à l’élève en tant qu’intervenant et responsable dans son processus éducatif; le rendre responsable par devant la classe est aussi un indicateur de la nécessité de son appartenance au groupe et de sa co-responsabilisation face à ce qui arrive dans le groupe et avec le groupe.

Arnaiz et Castejón (2001) 206 , quand ils énoncent les transformations préconisées pour les prochaines cinq années, au niveau des enseignants des soutien éducatif, préconisent plus d’enseignants de soutien (le plus petit ratio enseignant de soutien/élèves avec des besoins éducatifs spéciaux), mais que ce soit une ressource pour les élèves et non seulement pour ceux qui ont des besoins éducatifs, en accord avec ce que nous dit Porter (1991) quand il préconise non pas un spécialiste pour s’occuper des besoins éducatifs des élèves, mais d’un enseignant de «méthodes et ressources» qui donne un appui à la classe et à l’école, mis dans l’école en fonction des besoins de l’école et d’un élève en particulier.

Ce groupe d’enseignants, privilégiant une présence plus forte auprès de l’élève, promeut une plus grande individualisation de l’enseignement, au contraire de ce qu’affirme Arnaiz et Castejón (2001), quand ils énoncent les transformations préconisées pour les cinq prochaines années relativement au soutien des élèves: enseignement plus personnalisé et moins individualisé. Ce n’est pas d’enseignement plus individualisé dont nous parlent les auteurs défenseurs d’une éducation inclusive, tels que, entre autres, Ainscow (1991, 2000, 2003), Porter (1991, 1997), Rodrigues (2001, 2003), Santos et Sanches (2005) et Hegarty (2006).

D’une forme générale, les enseignants pensent plus à l’acte d’enseigner qu’à celui d’apprendre, ce qui les conduit à penser que le meilleur pour les élèves (ne serait-ce pas le meilleur pour eux ?) est une progressive individualisation jusqu’à parvenir à une relation un à un (de type préceptoral).

Au niveau de l’apprentissage ce groupe d’enseignants prétend faire une place importante pour le développement des activités alternatives, la diversification et le travail en petit groupe, en partant de l’élève et de ses besoins pour l’élève et la modification de ses comportements.

Arnaiz et Castejón (2001) préconisent pour les cinq prochaines années en relation au soutien des élèves: des groupes flexibles, enseignement/apprentissage avec un tuteur et des techniques d’apprentissage coopératif.

L’Agence Européenne pour le Développement sur le besoins éducatifs spéciaux, en 2003, à partir des études de cas conduites dans 15 pays, de visites d’étude dans sept pays et du débat entre des spécialistes, préconise comme pratiques efficaces pour l’éducation inclusive, au premier cycle de l’école de base, l’enseignement et l’apprentissage coopératifs, la résolution coopérative des problèmes, des groupes hétérogènes et un enseignement effectif.

Nous constatons, dans le cas de ce groupe d’enseignants de soutien, un fort accent mis sur l’enseignement au détriment d’une grande place à accorder à l’apprentissage; un enseignement centré sur l’élève et sur ses difficultés, développé essentiellement par un spécialiste avec des méthodes actives, avec une composante fonctionnelle, alternative et diversifiée. L’apprentissage comme acte social, entre pairs, émerge du discours, dans quelques cas, tandis que la croyance continue à être placée en l’enseignant qui enseigne et en l’élève qui apprend ce qu’il lui transmet.

Ces enseignants de soutien veulent savoir tout sur l’élève pour pouvoir travailler avec lui, pour ceci, disent qu’ils feraient un diagnostic qui implique l’élève, le contexte scolaire et le contexte familial. Énoncés dans cet ordre, selon la quantité d’information émise, la priorité du diagnostic va à l’élève, comme centre d’intérêt, à partir duquel tout se développe, situation vérifiée au niveau du soutien de l’élève. Le contexte scolaire gagne ici en priorité sur le contexte familial, paraissant vouloir admettre que l’école pourra être co-responsable, en première ligne, pour les problèmes qui se génèrent à l’égard de ses élèves, concrétisés par le cas spécifique de Miguel. La famille a aussi un rôle important, comme cause possible génératrice de problèmes. Ce qui surprend dans cette hiérarchisation est le fait de co-responsabiliser l’école avant la famille, tandis que l’on vérifie le contraire dans le discours quotidien des enseignants.

En se basant sur la quantité de l’information émise, on constate la nécessité de chercher les causes du comportement problématique, en prenant en compte la globalité de l’élève, en ce qui concerne son profil personnel, éducatif et pédagogique. Le diagnostic, au niveau du contexte scolaire, met l’accent sur la dynamique de la salle de classe et de l’école en général, n’omettant pas pour l’évaluation globale, l’intervention de spécialistes.

Ce qui est à la base de la préoccupation est le diagnostic exhaustif du déficit, pour programmer, à partir de lui, l’action, au lieu d’une recherche autant que possible exhaustive, des conditions qui empêchent ou rendent difficile l’apprentissage académique et social et la découverte du potentiel de l’élève, ayant comme point de départ ce qu’il a déjà fait.

Notes
206.

Voir Partie 1, Chapitre 4, Point 4.3.