(i)Ce que les enseignants de soutien éducatif, cible de cette étude, disent sur le concept d’inclusion scolaire

Relativement à ce point, l’analyse des données nous conduit à conclure que ces enseignants de soutien éducatif responsabilisent, en premier lieu, l’école et ses agents pour l’inclusion des élèves considérés avec des besoins éducatifs spéciaux. La réussite du processus d’inclusion est directement relié à l’investissement que l’école et ses agents directs et indirects font dans celui-ci, depuis l’accueil des élèves jusqu’à la dynamisation du processus d’apprentissage, avec la création de conditions pour mobiliser, générer et gérer les ressources humaines et les matériaux nécessaires.

Prioritairement, le contexte, dans ce cas, l’école dans son ensemble, est le principal responsable de la réussite ou de l’échec qui est généré en son sein. L’école, étant gérée et organisée par les adultes pour former les enfants et les jeunes, fait donc que c’est sur eux, les adultes, que retombe toute la responsabilité de l’implémentation d’une philosophie d’école inclusive. Cette philosophie s’opérationnalise, selon les dires de ces enseignants, en promouvant les chances d’apprentissage effectif pour tous les élèves, orientées par le principe suivant : tous les enfants rencontrent dans leur parcours scolaire au moins une fois des difficultés et le potentiel/difficultés du groupe sont une plus-value, un défi pour tous. Chaque élève, indépendamment de son profil, a le droit à ce que le processus d’enseignement/apprentissage soit orienté par les principes d’égalité des chances éducatives et sociales, et il incombe à l’école d’adapter ses pratiques aux besoins réels de tous les enfants qui la fréquentent en considérant la diversité physique, intellectuelle, ethnique et culturelle.

Or la philosophie en vigueur à l’école a directement à voir avec le rôle que chacun et tous dans leur ensemble, attribuent à l’école en tant que microcosme social, en se constituant comme l’origine et, en même temps, le produit de la société que nous avons et que nous voulons avoir, en nous permettant de questionner avec Dupriez et Draelants (2004: 160): «Quel type de société voulons-nous instaurer pour la collectivité sociale? Quel est le rôle de l’école dans cette société? (…) il est important de côtoyer des personnes différents (en termes d’origine sociale, culturelle, ethnique…) ou l’école est-elle envisagée comme un lieu de vie en communauté où les semblables se retrouvent pour apprendre et vivre ensemble ?».

De manière récurrente, nous pourrions nous demander : voulons-nous une société et une école efficace ou une école équitable ? Ce sont des options éthiques différentes qui définissent les grandes lignes d’action aux divers niveaux, du micro au macro. Dans le monde néolibéral dans lequel nous nous situons, l’action des systèmes éducatifs s’est avant tout préoccupée et investie dans l’efficacité, justifiant la grande investigation faite autour de l’efficacité au détriment de l’investigation sur l’équité, au sein de ces mêmes systèmes éducatifs 212 . Pourrons-nous trouver un paradigme de développement qui permette de concilier efficacité et équité ?

En ayant comme point de départ, la perspective écologique du développement qui découle de la propre constitution naturelle du milieu ambiant et de l’équilibre qui en ressort, en fonction de sa diversité (une forêt est d’autant plus riche qu’elle est plus diversifiée), l’équité sera le défi et le chemin à suivre au sein des systèmes éducatifs, en général, et de l’école/communauté scolaire, en particulier, pour donner une réponse à l’hétérogénéité de ses publics. Des établissements d’enseignement hétérogènes ont tendance à former, en leur sein, des classes hétérogènes, classes qui constituent un défi pour les agents éducatifs et pour les propres élèves, en contrepoint avec les classes homogènes, une fois que «l’homogénéité s’accompagne “d’une perte en équité”» (Dupriez & Draelants, 2004: 163).

Comme il fut constaté, dans la première partie de ce mémoire, nous ne vérifions pas une option claire, au niveau des politiques éducatives, sur le chemin à suivre, dans le contexte de notre pays, le Portugal, ce qui rend difficile la prise d’options au niveau de l’école, de la classe et de l’orientation des apprentissages des élèves. Il y a un discours qui vient remplir de mots et de phrases 213 qui sont l’expression d’une philosophie de l’école et d’une éducation inclusive, mais les mesures et les pratiques politiques mises en œuvre vont dans des sens contraires : catégorisation des élèves, catégorisation selon des critères médicaux, recrutement d’enseignants pour les écoles selon ces mêmes critères 214 , organisation de réponses éducatives, basée sur la compensation éducative, en différenciant et en excluant 215 , et donc des contextes non inclusifs.

Ces enseignants choisirent le contexte, l’école, comme premier responsable pour l’inclusion de l’élève avec des besoins éducatifs spéciaux, en nous laissant penser qu’ils croient que le changement à faire, dans le sens de l’inclusion, devra avoir comme priorité première le contexte dans lequel se réalisent les apprentissages, au lieu que ce soit l’élève l’unique objet de la transformation.

L’élève surgit dans le processus d’inclusion, comme un élément actif, mais non comme un élément responsable pour son inclusion. Il doit vouloir cette inclusion même et chercher à l’atteindre, en se configurant un cheminement pour cela, réalisé par l’école et par l’élève.

Notes
212.

Voir, à titre d’exemple, Partie 1, Chap. 4.

213.

On dit que l’inclusion est à la mode. Le Président de la République dans son discours, du 25 Avril 2006, a choisi l’inclusion sociale comme une priorité de son mandat. Il ne fit pas référence à l’éducation inclusive.

214.

Avec le Décret-loi 20/2006, du 31 Janvier, il fut créé dans les écoles la cadre de l’éducation spéciale, établissant deux priorités dans la mise en oeuvre : la première a comme base la formation des enseignants, dans cet environnement, avec un accent mis sur les domaines des déficiences (E1, E2, E3). Les enseignants de soutien éducatif n’ont pas questionné la mesure en elle-même, mais ils ont discuté de leur place dans ce cadre.

215.

Despacho n.º 1438/2005, du 4 Janvier 2005: «Programmes de compensation à tout moment de l’année scolaire ou au début d’un nouveau cycle.»