a. Les travaux de la forteresse

Lorsque le premier shogun de la dynastie militaire Tokugawa , Tokugawa Ieyasu (徳川家康1543-1616), prend possession en 1590 de la forteresse d’Edo, celle-ci est en ruine. Tokugawa Ieyasu n’est pas encore shogun et Edo n’est alors qu’un petit village de pêcheurs sur l’embouchure du fleuve Tone (Tonegawa 利根川) qui se jette dans la baie (de Tôkyô), formant de nombreuses zones humides et marécageuses, dans une période encore marquée par les conflits guerriers. Une fois au pouvoir suprême, il installe à Edo son quartier général, le Bakufu 幕府, qui devient l’organe administratif central du Japon de cette période.

Le château est érigé sur les flancs des plateaux de Musashino武蔵野 à l’Ouest et sur ces terrains marécageux de l’embouchure deltaïque des bras du fleuve Tone.

Figure 1. Les premières avancées sur la mer à Edo, au XVIIe siècle.
Figure 1. Les premières avancées sur la mer à Edo, au XVIIe siècle.

Source : Masai (1987) et Suzuki (2000).

La construction de la forteresse dépasse la seule construction d’un ouvrage militaire et entre dans le processus même de pacification du Japon entrepris par les Tokugawa (Herail et al., 1990). Cela se traduit par une politique de grands travaux dont les motivations sont autant techniques que politiques. Les collines sont découpées pour modeler les douves d’enceinte, des rivières détournées pour l’adduction d’eau potable et les déblais occasionnés par ces travaux fournissent le matériau pour combler la crique de Hibiya 日比谷入江 et les zones humides du delta (fig.1). Ces efforts financiers et matériels sont à la charge des daimyô 大名 (seigneurs féodaux) soumis aux Tokugawa. Ils doivent fournir hommes et capitaux pour les travaux : transport des pierres de taille pour les fortifications, creusement des douves et comblement des estrans avec le matériau dégagé. Ces déblais servent à construire les terre-pleins des quartiers de Nihonbashi日本橋, Hatchôbori 八丁堀, Shintomichô 新富町, Tsukiji 築地, Ginza銀座 et Shinbashi 新橋. Ils forment les terrains sur lesquels les marchands et des artisans, en provenance de l’ensemble du Japon, sont installés par le Bakufu et qui forment le petit peuple d’Edo.