b. Ville basse (Shitamachi 下町) et Ville haute (Yamanote 山の手)

Les grands travaux pour la construction d’Edo s’achèvent dans les années 1630. Les shoguns Tokugawa inventent alors un autre moyen pour affaiblir les seigneurs féodaux : le système de résidence alternée, le Sankinkôtai参勤交代. En vigueur de 1635 à 1862, c’est l’obligation pour les daimyô 大名de résider à Edo une année sur deux, d’y laisser épouses et héritiers en leur absence et d’entretenir dans la ville une résidence. Cette mesure a pour effet d’accroître la population de la ville, tant au niveau de l’aristocratie et des militaires de tout rang qui résident en permanence dans la ville, qu’au niveau des classes populaires de marchands et d’artisans nécessaires à l’entretien des premiers.

Les résidences des daimyô s’établissent à l’ouest et au sud ouest du château, sur les collines du plateau de Musashino, c’est la Ville Haute, la Yamanote山の手. Au pied du château, sur les terres alluviales et sur les terre-pleins construits sur la mer, c’est la ville basse la Shitamachi 下町. Celle-ci comprend les quartiers des commerçants, des artisans, des guerriers de basse extraction, les lieux de plaisir et des infrastructures comme les entrepôts de la ville. Deux trames urbaines très différentes se mettent en place : grandes propriétés sur les collines verdoyantes de la Ville haute et quadrillage rigoureux avec regroupement par activité et fort contrôle social dans la Ville basse (Masai, 1987). Ces premiers quartiers urbains construits sur les bancs de sables de l’embouchure de la Sumida correspondent à l’emplacement des arrondissements 8 actuels de Chûô中央, Minato港, et Chiyoda千代田.

Pendant toute la période Edo, les travaux d’aménagement et d’entretien des douves du château et des canaux de la ville basse fournissent un matériau utilisé comme remblais côtiers. Ceux-ci deviennent ensuite des quartiers d’habitation, des d’entrepôts portuaires mais aussi des résidences aristocratiques de bord de mer. En 1658 le shogun Tsunashige fait ainsi remblayer cinq hectares sur le front de mer pour construire sa résidence secondaire, le Hamarikyûteien  浜離宮庭園.

C’est aussi à cette période le début de la construction des décharges en mer. Suite à l’encombrement des canaux d’Edo par les ordures quotidiennes, le Bakufu ordonne en 1657 de les entreposer sur une zone à l’embouchure de la Sumida qui devient par la suite le terre-plein d’Etchûjima越中島 dans l’arrondissement de Kôtô. La décharge est étendue en 1730.

Les déchets urbains combinés aux boues de canaux servent également à la construction de shinden gagnés sur la mer dans le cadre des opérations de défrichements. La particularité des terre-pleins d’Edo est cependant d’avoir été consacrés dans un premier temps à l’espace urbain. Dans les autres villes côtières de cette période, les avancées sur la mer ont d’abord été des shinden, reconvertis par la suite en espaces urbains (Ishida et Shôji, 1996).

Notes
8.

Ku 区, arrondissement, divisés en chôme丁目 sous divisés en blocs numérotés. Kôtô-ku Toyosu 3e chôme (en japonais Kôtô ku Toyosu san chôme江東区豊洲三丁目) signifiera donc arrondissement de Kôtô, troisième bloc de Toyosu.