2. L’aménagement du Central Breakwater (Chûô bôhatei) et de la Nouvelle zone de décharges en mer (Shin kaimen shobunjô)

a. Un nouveau terre-plein de 480 hectares

Dernier des grands terre-pleins du port de Tôkyô, le « Nouveau site de décharge du front de mer » (Shin kaimen shobunjô 進海面処分場) est situé au sud du Brise lame central. Cette décharge en mer devrait atteindre 480 hectares lorsque son exploitation sera terminée en 2016. Il aura alors absorbé 39 480 000 m3 de déchets urbains de tous types, dont il est la principale zone de traitement à l’échelle du département.

Il est prévu pour l’instant d’aménager cette vaste zone avec des infrastructures portuaires sur le pourtour, des quais conteneurs à gabarit -16m en avancée du port, avec à l’intérieur des plateformes logistiques. Au centre des parcs marins et une « zone urbaine » dont les desseins sont encore que très peu définis.

L’ensemble de ces terre-pleins décharges forment une parcelle de près de 1 000 hectares (989 hectares), soit pratiquement dix fois la surface du palais impérial. Cette production d’espaces nouveaux pose autant de problèmes en amont qu’en aval. En effet on atteint à Tôkyô, comme dans le cas de Kawasaki, aux limites du périmètre de la juridiction du département sur son espace portuaire. Il faudra définir non seulement l’usage de ces terrains, mais aussi répondre d’une autre manière à la production continue de déchets urbains dans la capitale.

Jusqu’à présent les mesures de réduction de la production de déchets et le recyclage ont permis de faire passer le volume moyen de déchets par an, de 3 200 000 m3 à 2 600 000 m3.

Ce sont d’ailleurs essentiellement les boues issues du dragage du port et des canaux de la ville qui constituent le principal matériau des remblais, suivies par les déchets ménagers et ceux du BTP. Si les premiers ont tendance à baisser dans la part des remblais pour cette décharge, les derniers semblent avoir une variance plus forte (fig. 104). Mais la composition de la nature des déchets enfouis sur la décharge fait aussi l’objet d’une procédure pour mêler les déchets, et permettre la décomposition et l’évacuation des méthanes. Cette évolution ne représente donc uniquement ce qui est remblayé dans la décharge du port, et non la composition générale des ordures et autres déchets du département de Tôkyô.

Figure 104 : Volume de déchets ménagers remblayés dans le brise-lame central de 2002 à 2006.
Figure 104 : Volume de déchets ménagers remblayés dans le brise-lame central de 2002 à 2006.

Lorsque la décharge sera fermée en 2016 et que pourra commencer l’exploitation du sol, celui-ci sera composé à 45% de déchets non organiques. Les déchets industriels consistent à 69,7% de vases et d’eaux usées et de 20,7% de gravats sur les 22 509 tonnes produites dans le département de Tôkyô en 2004 (source : TMG, bureau de l’environnement), auxquels il faut aussi ajouter les cendres issues des incinérateurs du département (53 en tout pour Tôkyô) et qui fournissent une part du remblai. Mais seulement 27% concernent les ordures ménagères, ce qui permet de relativiser l’impact de campagnes de réduction des déchets et de tri par les citoyens eux mêmes. Les véritables moteurs de production de ces terre-pleins ce sont les incompressibles comme le curage des chenaux et les déchets du BTP.

Au niveau technique, on remblaie d’abord les boues issues du dragage du port, puis ensuite les déchets qui s’enfoncent progressivement par-dessus, entre les deux caissons.

Figure 105 : Type de déchets remblayés dans le brise-lame central.
Figure 105 : Type de déchets remblayés dans le brise-lame central.

Source : TMG 185 .

Le département connaît un boom de la production de déchets entre 1985 et 1991 avec plus de 12 000 000 m3 d’ordures produites par an. On est aujourd’hui revenu à un niveau inférieur de celui de 1978, sous la barre des 4 000 000 m3 / ans. L’évolution suit quasi exactement la courbe des prix fonciers lors de la Bulle, autrement dit de l’activité du BTP.

Par ailleurs, alors que la masse de déchets collectés à Tôkyô tend à baisser (légèrement), on peut constater que la part de ces déchets se retrouvant dans les terre-pleins de la baie se maintient, et même elle retrouve en 2005 un niveau comparable à celui de 2001 (fig. 106).

Figure 106 : Volume de déchets collectés dans le Tôkyô-to et part de déchets incinérés, 2001-2005.
Figure 106 : Volume de déchets collectés dans le Tôkyô-to et part de déchets incinérés, 2001-2005.

Que faire de ces nouvelles surfaces ? Le seul usage qui semble certain d’après les publications du Tochô est l’utilisation des berges et d’une partie du terre-plein pour les activités portuaires : nouveaux quais conteneurs et parcs logistiques, zones d’accueil des équipages et plateformes multimodales. Celle-ci bénéficiera de la construction à Tôkyô de la portion de la voie express côtière n°2. Elle relie le CBW au Keihin au sud-ouest et à Chiba, par le terre-plein de Wakasu.

À proximité des terre-pleins de Ôi, Shinagawa, dans le prolongement de ceux de Aomi, cet aménagement est aussi un nouveau bassin portuaire qui permet de repousser les activités du port vers le large et contribue ainsi à réserver les bassins plus en amont aux activités urbaines, non polluantes, et plus tertiaires. Cela, tout en modernisant l’appareil logistique de la capitale.

Pour le reste, le terre-plein sera consacré à l’aménagement de parcs marins, une obligation pour permettre un accès public au front de mer, mais aussi une méthode généralisée pour utiliser des espaces en surabondance, surtout dans cette partie extrême du port où le potentiel de développement non portuaire est encore faible.

La place, si l’on considère l’espace brut, est donc loin de manquer dans la capitale japonaise. Le moteur de production de terre-pleins, nourri par les déchets de tous ordres de la ville, pose donc surtout un problème d’usage de nouvelles parcelles, dont la mise en valeur est très aléatoire, dans la situation foncière actuelle, et dans un cadre peu aménitaire. La seule réalisation du Tochô prévue pour cette zone, à l’horizon des années 2030 est un grand parc : Tôkyô no mori東京の森(« la forêt de Tôkyô »).

Notes
185.

Shinkaimen shobunjô (Le nouveau site de décharge de front de mer), TMG, Bureau des affaires portuaires, 2003, 6 p.