Partie I : Cadre macroéconomique et le marché du travail Combodgien

Introduction de la partie I

La population du Royaume du Cambodge a été évaluée à 13,091 millions 15 de personnes en 2004. Le taux annuel de croissance démographique se situe à environ 1,81 %, ce qui place le Cambodge au deuxième rang des pays de la région à forte croissance de la population. La population totale devrait s’accroître de 2 millions de personnes au cours de la période 2001 à 2006. La répartition actuelle par âge et par sexe est déséquilibrée : il y a davantage de femmes que d’hommes – 93 mâles pour 100 femelles. D’autre part, les enfants de la tranche d’âge 0 à 14 ans représentaient 42,8 % de la population totale en 1998 16 . Les déséquilibres par âge et par sexe, reflétant un taux de mortalité et d’émigration exceptionnellement élevé pendant la période des Khmers rouges, sont lourds de conséquences dans les efforts actuels et futurs que le Gouvernement Royal déploie en vue de promouvoir le développement.

Le Gouvernement est parfaitement conscient des obstacles de taille qui s’opposent de nos jours au développement du pays. Les catastrophes naturelles et celles causées par l’homme qui ont caractérisé les trente dernières années, ont porté un coup dévastateur au Cambodge. Les décennies de guerre et de conflits internes non seulement ont démoli les fondements physiques et socio-économiques nécessaires à la croissance et au développement, mais surtout ont décimé à la base le capital humain du pays. Le déséquilibre de la répartition de la population par âge et par sexe et le manque de compétences chez la population active ne fait qu’aggraver les défis devant être relevés pour atteindre les objectifs du pays en matière de développement. Le Gouvernement considère que s’il est possible de raccourcir les échéances pour la réhabilitation, la reconstruction et la mise en valeur des infrastructures physiques – à condition de disposer des ressources nécessaires – la reconstitution du capital humain nécessaire au développement socio-économique durable est quelque peu inféodée au rythme imposé par le temps. Il faudra au moins dix ans pour reconstituer le capital humain au niveau qu’il était avant l’avènement du régime des Khmers Rouges : c’est là un simple fait démographique auquel le Cambodge doit faire face aujourd’hui. À l’heure actuelle, en termes de compétences disponibles au Cambodge, moins de 1 % de la population active ont pu bénéficier d’une formation au-delà de l’enseignement secondaire. Autre répercussion du manque de compétences chez la population active, c’est que le système éducatif continue d’être en butte à de sérieux problèmes affectant son rendement interne : environ un tiers seulement des élèves inscrits à la 1re année continuent leur scolarité jusqu’à la fin de la 6e année, ce qui ne fait que réduire davantage l’offre d’effectifs possédant les compétences dont on a un si grand besoin 17 .

Au terme de 30 années de guerre et de conflits internes, la société cambodgienne est confrontée aux défis posés par la reconstruction et le développement non seulement de ses infrastructures économiques, mais aussi de son capital humain. La mise en valeur du potentiel humain exige la création d’un environnement dans lequel l’ensemble de la population pourra profiter d’une vie longue, saine et prospère grâce à l’égalité des chances et à la participation à la vie économique, sociale et culturelle du pays.

Le Royaume du Cambodge fait partie des pays les plus pauvres de la planète. En 2005, le revenu par habitant a été estimé à environ 305 dollars US (estimation de NIS). De même, selon l’indice du développement humain du Programme des Nations Unies pour le Développement, le Cambodge était classé en 2001 au 121ème rang sur une échelle de 162 pays. Si la période de 30 années caractérisées par la guerre et la dislocation appartient désormais au passé, une grande partie de la population reste vulnérable en raison de la pauvreté et du manque de sécurité alimentaire. En 2005, selon les estimations, environ 36 % de la population vivaient au-dessous du seuil de pauvreté (cf. NIS, Statistical Yearbook 2005). Plus de soixante-dix pour cent des pauvres vivent dans les régions rurales du pays, et 71 % d’entre eux sont des agriculteurs. En 2000, le Cambodge a vécu les pires inondations depuis 70 ans, et cela malgré les efforts consentis par le Gouvernement pour en atténuer les effets néfastes, et cette catastrophe a peut-être aggravé davantage l’incidence de la pauvreté dans les zones rurales.

La réhabilitation et la reconstruction de l’infrastructure du système éducatif, qui avait été complètement détruit par suite des conflits et des guerres civiles, demeure une priorité absolue du Gouvernement Royal. Si des progrès considérables ont été réalisés, la prestation des services permettant d’offrir un enseignement de base n’en reste pas moins un défi de très grande taille. Atteindre l’objectif consistant à assurer universellement un enseignement primaire de base exigera un financement considérable, non seulement pour combler les écarts existants et améliorer l’efficacité de la prestation des services d’éducation, mais aussi pour suivre le rythme de la démographie croissante du pays 18 .

Le Cambodge a franchi des étapes gigantesques en à peine une dizaine d’années. Les Cambodgiens ont intensifié et accéléré les efforts au cours des six dernières années, et sont parvenus à créer une transformation profonde de la société cambodgienne. Dans le but de bien comprendre la situation économique du Cambodge, nos objectifs de la première partie consistent en effet à analyser, dans le premier temps, une évolution du cadre macroéconomique du Cambodge tout en rappelant l’histoire économique du Cambodge à partir de l’époque de protectorat à nos jours. Il nous paraît également nécessaire d’aboutir, dans le deuxième temps, une analyse détaillée sur le fondement théorique du marché du travail pour pouvoir ensuite passer, à la dernière étape, à une analyse approfondie sur les caractéristiques du marché du travail et l’emploi au Cambodge.

Notes
15.

Estimation faite par NIS (Institut Nationale des Statistiques), ministère des plans, Cambodge, 2005.

16.

Il n’existe pas des données détaillées sur la population totale en 2004, notre analyse du marché du travail ne concerne désormais que des données en 1998.

17.

Governement Royal du Cambodge (2002), Priorité de développement socio-économique et le besoin d’aide public pour le développement, CDC, Phnom Penh, Cambodge. Parmi les contraintes les plus sérieuses qui continuent de freiner le développement socio-économique du Cambodge, citons les suivantes :

- Insuffisances de ressources humaines qualifiées : c’est là le goulot d’étranglement le plus important s’agissant des efforts déployés par le Cambodge en vue de son développement. À court terme, le Gouvernement fait face au problème en ayant recours à des spécialistes venus de l’étranger et dans le cadre de missions temporaires. À long terme, la stratégie passe par un effort concerté visant à accroître les possibilités d’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle.

- Limitation des revenus et de l’épargne: étant donné le très faible revenu par habitant et la pauvreté généralisée, le Cambodge est limité dans sa capacité à mobiliser suffisamment d’épargne domestique pour financer des investissements.

- Insuffisance des infrastructures physiques : au Cambodge, les infrastructures sont peu étendues et de qualité médiocre, ce qui n’attire guère les investissements privés.

- Contraintes au niveau de la capacité institutionnelle : un travail d’arrache-pied s’impose au niveau des institutions administratives, juridiques, commerciales, judiciaires et réglementaires, afin qu’elles fonctionnent selon des normes susceptibles de mériter la confiance des investisseurs et la participation du secteur privé. À l’heure actuelle, le Gouvernement accorde une grande priorité aux questions relatives à la bonne gouvernance.

18.

Le Gouvernement Royal considère que la reconstruction d’une base de capital humain susceptible de fournir les compétences nécessaires dans les secteurs privé et public est un préalable indispensable à l’atteinte de ses objectifs en matière de développement socio-économique durable et à la mise en œuvre réussie des nombreuses réformes qu’il a lancées.