Conclusion

Après des années de déclin prononcé et ininterrompu de la production s’accompagnant de taux d’inflation élevés, le Royaume du Cambodge enregistrait depuis 1993 une nette amélioration de ses résultats macroéconomiques. Les études conduites par le FMI ces dernières années ont conclu à la relative bonne performance macroéconomique du Cambodge depuis 1999, année qui avait vu le retour à la stabilité politique. Les activités privées se sont développées, grâce en particulier à l’accès facilité des produits textiles aux marchés américain et européen et au développement du tourisme. De 1999 à 2003, le taux de croissance annuel moyen s’est situé entre 6 et 7 %. Les contributions relatives des différents secteurs ont toutefois été inégales : la contribution du secteur agricole est beaucoup plus erratique et ce dernier a connu en 2000 et en 2002 une chute de sa valeur ajoutée en raison de la réduction de la surface arable.

Le Cambodge a également enregistré de bonnes performances dans la maîtrise de l’inflation et la parité du riel par rapport au dollar américain a été maintenue. Cependant, la gestion des finances publiques enregistre un décalage par rapport aux objectifs. La rémunération des fonctionnaires se situe très en-deçà de celle des salariés du secteur privé, ce qui encourage les agents de l’Etat à briguer simultanément des emplois privés.

L’économie du Cambodge reste très peu diversifiée, donc très sensible aux chocs extérieurs. Ses performances passées plutôt satisfaisantes ne doivent pas cacher les défis que le pays devra relever à partir de 2005. Tout d’abord, la suppression des quotas textiles fait peser une menace sur le secteur de confection textile qui était jusqu’à présent le moteur de l’économie. Cependant, le FMI est revenu sur sa prévision pessimiste d’un taux de croissance économique de 2 %, pour en fait l’estimer aux alentours de 5 à 6 % pour 2005 (6,3% selon le Ministère de l’Economie et des Finances), et légèrement supérieur à 6 % pour 2006 (6,1 % selon le même Ministère). Cette bonne performance est due à une résistance du secteur textile plus importante que ne l’avaient prévue les experts.

Néanmoins, la croissance de ces dernières années a eu peu d’impact sur la pauvreté avec une disparité qui s’est plutôt accentuée entre la zone urbaine de Phnom Penh et le reste du territoire. Les indicateurs sociaux restent décalés par rapport aux objectifs cambodgiens du millénaire. Un effort doit donc être fait pour, en particulier, faciliter l’accès à l’eau potable et améliorer le système d’assainissement afin de réduire le taux de mortalité infantile et maternelle.

Si le contexte macroéconomique du Royaume du Cambodge semble en nette amélioration, on ne peut porter le même jugement positif sur la réforme structurelle. Le nouveau mode de privatisation, qui entraîne un ralentissement du processus, soulève des inquiétudes quant à ses conséquences à long terme sur la transformation de l’économie cambodgienne. Ce ralentissement s’explique par la crainte qu’une privatisation rapide n’aggrave le chômage, déjà implicitement élevé.

Ces contraintes sont peut-être fondées, mais elles doivent être comparées au coût à long terme qu’un ralentissement de la privatisation risque d’avoir sur les perspectives de croissance de l’économie cambodgienne. Les gains (économiques et politiques) à court terme et les pertes résultant à long terme d’un ralentissement du processus de privatisation s’équilibrent. La question cruciale est de savoir si le nécessaire processus d’investissements soutenus peut être déclenché sans la privatisation des entreprises industrielles grandes et moyennes. L’expérience de ces années, même celle de 2004, n’est pas encourageante car les investissements ont fortement diminué. En outre, les investissements étrangers directs ont été très faibles, en particulier si on en compare le volume à celui des pays voisin du Cambodge.

L’analyse de l’évolution macroéconomique du Cambodge offre des informations importantes permettant des analyses détaillées sur la question du marché du travail ainsi que des politiques de l’emploi au Cambodge. Par ailleurs, une étude théorique du marché du travail nous semble inévitable avant de parler de la situation du marché du travail au Cambodge. Cette étude sera donc présentée dans le chapitre II de cette partie. Dans le chapitre III, nous aborderons des analyses des structures et des tendances du marché du travail ainsi que les facteurs à l’origine de l’accroissement du chômage. Ce dernier chapitre de cette partie consiste également à vérifier les théories du marché du travail avec la situation actuelle du marché du travail au Cambodge. L’objectif est de savoir s’il existe un marché du travail au Cambodge et quelles sont ses principales caractéristiques.