I – L’offre de travail

Par construction du modèle classique, tous les prix sont déterminés par le marché. Ils assurent l’équilibre de l’offre et de la demande. Ils traduisent l’ensemble des anticipations, des offres et des demandes de tous les acteurs des marchés. Pour Walras, tous les prix de tous les marchés sont les solutions instantanées d’un vaste système d’équations simultanées. Ce système décrit la structure des offres et des demandes.

Le choix de l’offre de travail de la part des individus se fait synchroniquement avec le choix de la demande de biens. En effet la fonction d’utilité des individus ne comporte pas seulement des biens de consommation habituels, mais inclut également un bien particulier, le loisir. La détermination de l’offre de travail s’effectue à partir de quatre hypothèses 71  :

  • L’individu effectue une allocation du temps total N° dont il dispose entre travail N et loisir L. On a ainsi par définition N° = N + L. A priori toutes les allocations (travail, loisir) respectant la contrainte de temps total sont possibles ;
  • L’individu doit optimiser son travail offert pour un prix donné, le salaire réel (w/p). Le marché du travail est donc supposé concurrentiel ;
  • L’individu n’est pas sujet à l’illusion monétaire : il se détermine en fonction du salaire réel (w/p) et non du salaire nominal w ;
  • L’individu maximise son utilité sous contrainte de budget (R).
Figure 4 : Courbes d’offre et de demande de travail
Figure 4 : Courbes d’offre et de demande de travail

Source : Perrot Anne (1992), Les nouvelles théories du marché du travail, la découverte.

Le calcul économique permet de déterminer simultanément  72 :

  • La demande de biens qui est croissante avec R/p et w/p mais décroissante en fonction de p/w.
  • La demande de loisirs qui est croissante avec R/p et décroissante avec w/p.
  • L’offre de travail qui est croissante avec w/p et décroissante avec R/p. Cependant, en l’absence de revenu non salarial, l’offre de travail ne dépend pas du salaire et est verticale.

La courbe d’offre de travail est en principe croissante ave le salaire réel, mais il arrive qu’elle soit en partie décroissante. Ce problème est lié à la réaction de l’individu face à une variation de w/p. Si w/p augmente :

  • L’individu voudra offrir plus de travail (demander moins de loisir) car le prix du travail a augmenté (le loisir coûte plus cher et le travail procure une désutilité moindre). L’effet de substitution est négatif sur le loisir et positif sur le travail ;
  • L’individu étant plus riche, il peut, à temps de travail offert égal vouloir conserver le même niveau de consommation et demander plus de loisir. L’effet de revenu est positif sur le loisir et négatif sur le travail.

Au total, les deux effets sont de sens contraire. Si l’effet de revenu est supérieur à l’effet de substitution (en valeur absolue) cela peut donner une allure anormale à la courbe d’offre de travail (retour vers l’arrière).

Ainsi certaines catégories de main-d’œuvre (femmes mariées, jeunes) peuvent présenter des fonctions d’offre de travail « anormales » : l’effet de revenu peut être supérieur à l’effet de substitution, le revenu étant une composante marginale du revenu total du ménage.

Certains auteur, comme J. Robinsons, défendent l’idée que ces effets ne jouent pas de la même manière à la hausse et à la baisse : notamment en cas de baisse du salaire, le ménage voudra conserver un même niveau de revenu et cherchera à augmenter son offre de travail73. L’élasticité de l’offre de travail au salaire (qui mesure la variation relative de l’offre de travail à son prix) peut ainsi être négative.

Notes
71.

Perrot Anne (1992), Les nouvelles théories du marché du travail, La découverte.

72.

Perrot Anne (1992), Les nouvelles théories du marché du travail, La découverte.

73.

Robinson J., « Essays in the theory of employment », Hyperion Press, first published in 1947, dans Perrot Anne (1992), Les nouvelles théories du marché du travail, La découverte.