III – L’équilibre partiel du marché du travail et ses perturbations

Sur le marché du travail, l’offre d’emploi des entreprises fait face à la demande d’emploi des candidats à l’embauche. Le prix du travail en résulte. Il s’agit du taux de salaire. Il détermine la quantité de monnaie qui sera échangée contre une quantité unitaire de travail. C’est ce que l’on appelle le salaire nominal et il ne se confond pas avec le salaire réel 75 .

Une fois l’offre et la demande de travail construites (et agrégées), il suffit de chercher l’intersection des courbes, comme sur n’importe quel marché. On obtient alors, pour le salaire d’équilibre (w/p)*, les quantités offertes et demandées de travail telles que l’offre égale à la demande. Si le salaire effectif se situe au-dessus du salaire d’équilibre, alors l’offre de travail augmente et la demande de travail diminue. L’écart entre l’offre et la demande de travail est le chômage.

Comme pour un autre marché, la flexibilité à la baisse du salaire réel doit rétablir l’équilibre. Dans la mesure où le salaire réel est non flexible à la baisse, le chômage a un caractère volontaire. L’explication de cette propriété fera notamment l’objet du point suivant.

L’équilibre partiel du marché du travail ne dépend que de l’offre et de la demande de travail 76 . Le salaire dépend de l’offre et de la demande momentanées de travail. Le salaire n’est pas défini par des règlements corporatifs. Il fluctue en permanence. Cela correspond à la pratique actuelle de certaines entreprises qui modulent le salaire en fonction de l’activité mensuelle. Pour la théorie classique, la flexibilité du salaire assure l’équilibre du marché du travail. Du point de vue du seul marché du travail, un demandeur d’emploi reste au chômage s’il demande un salaire qui dépasse le produit marginal de son travail pour les offreurs d’emploi. Le chômage individuel provient de la demande d’un salaire nominal (exprimé en monnaie) trop élevé. Il y aura plein-emploi si les candidats savent demander le bon niveau de salaire.

Figure 6 : Equilibre sur le marché du travail
Figure 6 : Equilibre sur le marché du travail

Source : Perrot Anne (1992), Les nouvelles théories du marché du travail, La découverte.

Mais l’équilibre du marché du travail dépend aussi de l’équilibre sur tous les autres marchés. Nous avons vu que les marchés des biens et services jouaient un rôle central. Encore que cette formule n’ait pas beaucoup de sens dans un système d’interdépendances. Considérons-la plutôt comme une manière de dérouler notre raisonnement.

Sur les marchés des biens et services, la flexibilité des prix assure l’équilibre de l’offre et de la demande. A l’équilibre, les offreurs réalisent un profit par la vente de leurs marchandises. En fonction des profits réalisés (disponibilités monétaires) et anticipés (espérance de gain), les entrepreneurs vont investir dans des matières premières et des machines. Ils accroissent la demande sur ces marchés. A l’équilibre, il y a pleine utilisation des capacités de production. Les entrepreneurs vont aussi embaucher sur le marché du travail. A l’équilibre, il y a plein emploi des candidats qui demandent le bon niveau de salaire 77 .

Notes
75.

Entre les deux se trouve le marché de la monnaie. Le salaire réel correspond à la quantité de biens et services que l’on peut acheter avec le salaire nominal. En cas de hausse des prix (inflation) il arrive que les salariés perdent d’un coté (baisse du salaire réel) ce qu’ils ont gagné de l’autre (hausse du salaire nominal). Sur le marché de la monnaie cela se traduit par une baisse du pouvoir d’achat de la monnaie. En effet, la théorie quantitative de la monnaie (David Ricardo) montre que si la quantité de monnaie en circulation augmente, toutes choses égales par ailleurs, le prix des marchandises (biens ou services) ne fait qu’augmenter en proportion.

76.

Pour que fonctionne effectivement le schéma d’ajustement de l’offre et de la demande qui vient d’être décrit, un certain nombre de conditions doivent être réunies (absence de barrières à l’entrée sur le marché, transparence de l’information, atomisation de l’offre et de la demande,…). Dans la réalité, ces conditions sont imparfaitement remplies. Il en résulte des frictions, des délais ou des blocages dans la réalisation des ajustements prévus, qui sont cause de chômage.

77.

PERROT Anne, (1992), « Les nouvelles théories du marché du travail », La découverte