V – Evolution globale du marché du travail

Le Cambodge a été touché par les crises des années récentes. La crise financière asiatique a pris sa source en Thaïlande pendant la première moitié de l’année 1997 et a débordé sur les autres pays d’Asie. Son impact a été néfaste sur les exportations cambodgiennes, sur les entreprises locales en compétition avec les importations, sur l’investissement des pays asiatiques implantés au Cambodge et sur le tourisme. En conséquence, cette situation a permis à la crise interne au Cambodge de prendre plus de force, débouchant sur un conflit armé à Phnom Penh en juillet 1997 précipité par la lutte entre les deux principaux partis politiques opposés. La confiance dans la stabilité politique a été mise à mal, le peuple et les entreprises se trouvant dans une situation fragile et l’environnement politique futur devenant incertain. Ajouté à cela, la suspension des aides internationales a eu un impact très négatif sur l’économie. Le conflit a détruit de nombreuses entreprises et magasins autour de la capitale, et le Riel (la monnaie nationale) a subit une dépréciation considérable par rapport au dollar. L’inflation a pris de l’ampleur, la consommation et l’investissement se sont réduits, le tourisme a fortement reculé. La réponse du gouvernement à ces crises a été l’introduction de mesures d’austérité dans les dépenses publiques en août 1997. Le taux de croissance du PIB réel, qui était supérieur à 7% en moyenne depuis le début de la décennie, a chuté à 1% en 1997 et 1998 avant de retrouver les niveaux précédents en 1999. Plus récemment, une nouvelle crise a été provoquée par des inondations intenses en septembre-octobre 2000. Ce phénomène naturel a également fortement contribué à la dégradation de l’économie et donc du marché du travail.

Malgré les crises, le taux de chômage au Cambodge reste très faible. Celui-ci a esquissé une hausse en 1997 puis est retombé dès 1998 à 5,34% ; pour finalement chuter à un niveau jamais atteint précédemment : 0,8% en 2004 (figure 27). Grâce au redressement économique de ces dernières années (après 1998), l’emploi rémunéré a progressé mais à un rythme très lent par rapport aux autres catégories d’emploi.

Les revenus et les salaires réels restent presque inchangés. Les revenus des travailleurs indépendants (pour leur propre compte) demeure les plus attractifs. C’est la raison pour laquelle cette catégorie d’emploi représente une grande part de l’emploi total.

En conclusion, l’impact favorable de l’évolution récente de l’économie cambodgienne sur les populations ne peut être mis en doute. En effet, notre analyse met en évidence l’image d’un marché du travail en phase de récupération rapide, depuis 1998. Les ménages de la capitale commencent à tirer profit de la politique économique de transition vers l’économie de marché. Le relais pris par le secteur privé formel et informel dans la dynamique de création d’emplois, qui touche tous les secteurs, sont autant de signes encourageants témoignant de l’amélioration de la situation économique.

Cette embellie se traduit par un recul significatif du sous-emploi et du chômage. Elle a également pour conséquence une baisse du taux d’activité des femmes, des plus âgés, ainsi que des enfants. Pour ces derniers, leur moindre participation au marché du travail est particulièrement encourageante dans la mesure où elle s’accompagne d’une hausse du taux de scolarisation. Une amélioration progressive de la situation des femmes est également perceptible. Malgré la persistance d’inégalités au détriment du sexe féminin, les écarts de rémunération se réduisent de façon très sensible au cours des quatre dernières années. Enfin, la régression de la pauvreté, dont l’incidence passe de 56% à 36% entre 1990 et 2004, constitue un phénomène marquant qui illustre l’effet positif de la croissance sur l’ensemble de la population. Toutefois, cette dynamique positive semble avoir davantage favorisé les individus les mieux lotis. Ce sont les diplômés du supérieur qui enregistrent les hausses les plus fortes en matière de revenus d’activité. Malgré tout, le revenu moyen des ménages croît, du quartile le plus pauvre à celui des plus riches (CSES, 2004).