3) – Sur un plan théorique

On oppose notamment les politiques de l’emploi d’inspiration keynésienne et celles d’inspiration libérale ; tout dépend du diagnostic.

Les politiques de l’emploi d’inspiration keynésienne conviennent à un diagnostic de « chômage keynésien ». On pense que le chômage est plutôt conjoncturel, qu’il est dû à une insuffisance de la demande tandis que les capacités de production sont sous-employées, dès lors des politiques macro-économiques pourront viser à soutenir la croissance (politiques actives de relance par exemple). Mais les politiques de l’emploi keynésiennes peuvent inclure aussi des politiques dites passives en tant qu’actions structurelles de stabilisation durable de la demande. Ce sont donc essentiellement des « politiques de la demande ».

Les politiques de l’emploi d’inspiration libérales conviennent à un diagnostic de « chômage classique » : on pense que le chômage est plutôt d’origine structurelle, (par exemple la structure des prix relatifs serait mauvaise pour la compétitivité des entreprises et les règles du jeu politique bloqueraient un peu cette situation). Il conviendrait alors de lutter contre ces rigidités par des politiques visant à alléger les contraintes autres que la concurrence qui pèse sur l’entreprise (par exemple en favorisant plus de flexibilité sur le marché du travail). Mais les politiques de l’emploi libérales peuvent inclure aussi des politiques visant à améliorer le « capital humain » comme autre source de compétitivité de l’appareil productif (politiques de formation…). Ce sont donc essentiellement des « politiques de l’offre ».

Le chômage ayant souvent plusieurs causes, les politiques de l’emploi se sont multipliées dans de nombreuses directions.

Les politiques macro-économiques keynésiennes ont montré leurs limites dans la lutte contre le chômage. Par exemple, on estime que les politiques de relance de la demande (relance de1974-75 et 1981-82 en Europe) ont échoué en raison de la contrainte extérieure. Les politiques libérales (lutte contre l’inflation, modération salariale et restauration du taux de marge des profits…..) n’ont pas permis non plus d’éradiquer le chômage. Devant cette difficulté à maîtriser toutes les causes et tous les obstacles au retour au plein emploi, on a vu se multiplier (en Europe surtout) des politiques de l’emploi de plusieurs inspirations en même temps, mais à différents niveaux ou dans différents secteurs d’activité ou compartiments de la population active. Il arrive par exemple qu’un gouvernement combine des mesures de relance de l’activité à court terme et des mesures de flexibilisation de la main-d’œuvre à plus long terme, des mesures de protection accrue pour une catégorie de travailleurs et des mesures de protection diminuée pour d’autres...

 Au delà du débat entre politique actives et passives, on retrouve le débat entre les politiques de l’offre et celles de la demande. De nos jours, le grand débat oppose d’une part les grandes options libérales et social libérales, qui font essentiellement confiance aux « lois du marché » pour guider les grandes décisions (ou plutôt les grandes adaptations), et d’autre part les options plus institutionnalistes qui prônent la nécessité d’une nouvelle gouvernance, par un nouvel État de droit dont les contours sont certainement à redéfinir à cause de la mondialisation, mais qui soit assez fort pour que le marché ne puisse fonctionner qu’à l’intérieur de règles de développement durable (écologiques et sociales) politiquement définies à l’avance... Cette seconde position est aujourd’hui largement dominée par la première dans ce débat.

Citons encore les politiques de Workfare : contraction de work (travailler) et de welfare (État providence). Cette notion désigne le fait d’imposer aux chômeurs indemnisés ou aux allocataires d’aide sociale une activité d’utilité sociale ou un emploi aux normes dégradées, car ce serait le chemin le plus court vers leur réinsertion « libre » sur le marché du travail. Voilà donc une façon assez autoritaire de résoudre une partie de ce que les économistes nomment parfois le « chômage volontaire » qui aurait tendance à devenir un « chômage structurel ».