Le roi Sihanouk (années 1960) s’intéressa de près à l’éducation. Entre 1953 et 1968, le nombre d’écoliers dans le primaire passa de 300 000 à 1 million. L’augmentation du nombre d’élèves dans le secondaire fut encore plus impressionnante : de 5000 à 1 million. Neuf universités furent ouvertes pendant cette période. Malheureusement, en dépit de ses bonnes intentions, ce programme instaura un niveau d’éducation faible et des perspectives d’emploi peu réalistes 280 .
Suite à la période de terreur perpétrée par les Khmers Rouges de Pol Pot dans les années 70, le pays semble ne s’être jamais véritablement remis des conséquences engendrées par ce régime. Tous les intellectuels y ont été exterminés : la reconstruction totale du pays à la sortie de cette période n’en est que plus difficile et le Cambodge panse aujourd’hui encore les plaies causées par ce régime. Sous perfusion internationale, le pays est l’un de ceux dont l’indice de développement humain est le plus bas au monde : la pauvreté y est présente plus que dans tout autre pays d’Asie du Sud Est.
Avec 5,2 enfants par foyer et la moitié de la population qui a moins de 15 ans, les besoins en matière d’éducation sont énormes. Les actions menées aujourd’hui joueront un rôle capital pour le développement futur du pays.
Officiellement, l’école est obligatoire, mais elle est accessible à peu d’enfants pour les raisons suivantes :
Tout est à faire en matière d’éducation. De nombreuses actions ponctuelles voient le jour, mais tout semble désordonné et sans cohérence. La solution et la cohésion de toutes ces actions doivent venir du gouvernement qui pour le moment répond trop lentement aux besoins de l’éducation dans le pays.
Education |
|
||||||||||||||||||||||||||
Analphabètes Primaire Secondaire Lycée Autres formations (BTS) Université et poste université Sans réponse Total |
9,0 37,2 29,1 15,3 4,9 3,3 1,0 100 |
21,0 44,2 22,5 8,3 2,6 0,7 0,5 100 |
19,4 40,8 25,9 11,9 3,9 2,0 0,8 100 |
17,0 53,7 22,8 4,7 0,9 0,3 0,6 100 |
29,3 56,1 12,5 1,6 0,2 --- 0,2 100 |
23,5 54,7 17,3 3,1 0,6 0,1 0,4 100 |
16,0 51,5 23,6 6,0 1,4 0,6 0,7 100 |
28,4 54,7 13,6 2,3 0,5 0,1 0,3 100 |
22,4 53,1 18,5 4,1 1,0 0,3 0,5 100 |
Source: NIS, « Labor force survey of Cambodia », november 2000, page 12.
Le tableau 53 met en évidence une courbe en U renversé en ce qui concerne la composition de la population active de plus de 7 ans selon le niveau d’instruction. Ainsi, la population active s’élève avec le niveau d’instruction jusqu’au primaire et chute très rapidement à partir du secondaire. En effet, nous constatons que plus de la moitié des travailleurs ont arrêté leurs études au niveau primaire, soit 53,1% de la population active totale. La population active analphabète représente 22,4% du total ; 18,5% ont atteint le niveau secondaire et seulement 4,1% détiennent un baccalauréat. Le reste, 1,3%, est population active qualifiée qui a obtenu un certificat de BTS ou autres formation professionnelles et un diplôme de l’université.
Les taux de scolarisation des filles chutent manifestement à la fin de l’école primaire, avec pour conséquence de plus grandes disparités au niveau du premier cycle secondaire. Il ressort des résultats de l’enquête que trois facteurs expliquent le taux d’abandon disproportionné des filles.
Dans un pays au PIB si faible, le coût de reconstruction d’un système éducatif solide reste raisonnable ; mais le gouvernement en est-t-il vraiment convaincu ?
L’investissement dans le secteur de l’éducation au Cambodge est donc primordial pour l’amélioration des ressources humaines qualifiées. Même si le GRC s’est engagé à étendre l’accès équitable aux services d’éducation de base, à améliorer la qualité de ces services, et à optimiser l’utilisation des crédits alloués à l’éducation, reste que la mobilisation des ressources nécessaires pour accroître les dépenses et hisser le système éducatif au niveau des pays voisins demeure médiocre.
Plusieurs problèmes restent encore non résolus : les problèmes d’écoles et d’enseignants, les problèmes d’équité et d’efficacité avec l’extension des heures de cours, les provisions de matériel pédagogique, les salaires des enseignants…etc.
Au cours des dernières années, les réformes du gouvernement se sont concentrées sur l’amélioration des taux de scolarisation, en particulier pour les filles, l’élévation des standards académiques et la limitation des taux de redoublement et d’abandon, à travers une amélioration continue de la qualité de l’éducation. Pourtant, la scolarisation des filles demeure assez faible, et elles représentent aujourd’hui moins d’un tiers des effectifs globaux. Les régions mal desservies ont du mal à obtenir des services d’enseignement pour le 2ème cycle, le problème du nombre de disciplines enseignées reste encore présent, la mobilisation du budget de fonctionnement n’est pas adéquat ; et les mesures pour assurer l’accès équitable des familles les plus pauvres ne sont pas prises en compte.
Nous constatons que les institutions de l’enseignement supérieur ont besoin d’améliorer leurs performances. Plusieurs domaines devraient être examinés pour trouver des solutions aux problèmes posés et améliorer le rendement scolaire afin d’être en mesure de soutenir le processus de développement économique et social. Une telle politique gouvernementale devrait prendre en compte le renforcement des systèmes de financement, de régulation et de gestion, tout en améliorant la qualité de l’enseignement.
La croissance économique a engendré des besoins nouveaux en matière de formation dans les disciplines techniques aussi bien dans les zones urbaines que rurales. Actuellement, la capacité du système public d’EFTP est limitée et ses programmes sont en déphasage par rapport aux besoins réels de l’économie. Au cours des années récentes, la scolarisation dans l’EFTP et le nombre d’heures de cours qui y sont enseignés ont connu un déclin notable à cause de la perception du public quant à la qualité médiocre de l’enseignement et aux possibilités limitées d’emploi dans l’administration publique. La faiblesse du système d’EFTP dans le secteur public a encouragé le secteur privé à créer un nombre plus important d’institutions fournissant une formation dans les technologies de l’information et les langues étrangères. Cependant, la plupart des activités d’EFTP du secteur privé sont confinées à Phnom Penh et les capacités de l’EFTP dans les zones rurales restent dépendantes de l’assistance extérieure.
En somme, au Cambodge, le problème des ressources humaines est un blocage majeur pour le bon fonctionnement du marché du travail. L’éducation et la formation professionnelle répondent à de réels besoins du marché du travail cambodgien :
Le pays est en phase de « reconstruction ». Les modes de vie évoluent, la population rurale encore très importante se déplace progressivement vers les villes. Le tourisme se développe et avec lui, les infrastructures de transport et d’accueil. L’entrée dans l’ASEAN tire le Cambodge vers le haut et lui permet d’obtenir une assistance de ses voisins. Le secteur de la construction est un des plus dynamiques actuellement, important pourvoyeur d’emplois. D’où l’importance de mettre en place des actions de formation pérennes et de qualité dans ce secteur.
Malgré tout, l’éducation et la formation professionnelle ne sont pas toujours reconnues comme prioritaires par les bailleurs. Il faut dire qu’elles sont coûteuses et ne peuvent raisonnablement s’autofinancer. Par ailleurs, un même bailleur ne peut soutenir la même action pendant des années.
S’ajoutant au problème de la faiblesse du système éducatif, la santé de la population vient renforcer l’état de dégradation des ressources humaines au Cambodge.
NIS, (2005), « Statistical Yearbook », Ministère des plans, Cambodge.