Une culture géographique catholique

C’est un héritage de l’intérêt pluriséculaire porté par l’Eglise pour la connaissance géographique, en particulier par la Papauté pour l’exploration. L’action des Papes en faveur des découvertes géographiques n’est plus à démontrer. Elle s’explique par la nature même de l’Eglise catholique qui est apostolique, c’est-à-dire amenée à porter l’Evangile auprès des autres peuples. Son objectif final est l’unité et la pleine possession du globe, car le message chrétien s’adresse à tous sans distinction. La connaissance complète et précise du monde, qui reste l’objectif de la géographie, constitue une étape nécessaire. Ainsi, l’évangélisation est considérée comme un moteur de la découverte. Pour rendre compte de ses progrès, les pontifes du Moyen Age font peindre une fresque du monde dans le palais du Latran1 : Zacharie fait recouvrir son triclinium des tableaux des provinces de l’univers chrétien avec cet avertissement : « même durant leur repas, les pontifes devaient avoir constamment déployé sous leurs yeux le domaine entier de la sollicitude ecclésiastique »2. La fresque s’agrandissait à mesure que se produisaient de nouvelles évangélisations, en commençant par la Saxe. La représentation du monde chrétien se concrétise ensuite au XVIè avec les cartes murales du Vatican, disposées dans deux longues galeries3. La première réunit les régions du monde, la seconde les villes et provinces d’Italie. Ces fresques témoignent de l’intérêt du Saint-Siège pour la géographie en général et la cartographie en particulier. Mais elles assurent surtout un rôle politique, en rappelant à leurs spectateurs, qu’ils soient pontifes ou visiteurs, l’immensité du monde chrétien, c’est-à-dire l’étendue du domaine dirigé par le Saint-Siège4. Ce monde chrétien peut prétendre à l’universalité s’il tient compte des territoires de mission. Au XVIIè, la congrégation De Propagande Fide devient la seule institution de la Papauté qui soit dépositaire des progrès de la géographie religieuse.

Notes
1.

L’idée s’inspire d’une carte murale, dite d’Auguste et d’Agrippa, qui figurait au Palais St-Jean de Latran.

2.

Rapporté par THOMASSY, M.R., Les Papes et la géographie du Vatican, Paris, 1852, p.8.

3.

La première est débutée sous le pape Léon X et terminée sous Pie IV. La seconde, débutée par Pie IV est finie sous le pontificat de Grégoire XIII.

4.

Lors de la signature des accords du Latran, en février 1929 le cardinal Gasparri aurait fait traverser les galeries à Mussolini pour lui faire prendre conscience de l’étendue du domaine pontifical.