Le déplacement du missionnaire

Il n’est question ici que des déplacements effectués par les missionnaires à l’intérieur de leur mission. Sur les voyages avec l’Europe, leur fréquence varie selon la responsabilité du missionnaire ; placé à la tête de la mission le vicaire apostolique doit rendre des comptes à sa congrégation et à la congrégation romaine, auprès de laquelle il accomplit le voyage annuel ad limina, qui réactive l’autorité pontificale. En général, les missionnaires restent toute leur vie dans la mission qui leur a été désignée. Certains reviennent faire profiter des novices des connaissances accumulées sur l’Afrique. Mais la plupart doivent rentrer à la suite de maladies pour se refaire une santé.

L’apostolat rend le déplacement nécessaire

- L’itinérance, premier acte du missionnaire ?

L’acte d’apostolat est avant tout un déplacement, institué par les voyages de Paul au Ier siècle de l’ère chrétienne : l’apôtre portait le message du Christ aux païens. Dix-neuf siècles plus tard, le sens donné à l’apostolat est le même et chaque missionnaire peut reproduire presque chaque jour l’acte originel de Paul. Ce qui a changé est d’ordre spatial : un missionnaire reçoit dorénavant un lieu de mission, qu’il ne pourra quitter sans l’accord de sa hiérarchie, c’est-à-dire la congrégation dont il est issu. L’apostolat est forcément associé à un lieu, désigné et précis, dont l’attribution est fixée par la congrégation romainePropaganda Fide. Le nom qui désigne la mission est celui géographique du territoire et non de la population. Un prêtre est nommé au Gabon et non chez les Mfang, au Congo et pas chez les Batekes, dans l’Oubangui et non auprès des Bandas. Cette dénomination est reprise par tous les acteurs de la mission, depuis les textes officiels de la congrégation pontificale jusqu’aux correspondances entre les missionnaires et leur institut. La Propagation de la Foi emploie le même système pour identifier le plus précisément possible les terres de mission qu’elle veut secourir.

Pourtant, l’apostolat privilégie naturellement l’élément humain sur le territoire. Les populations indigènes constituent l’objectif premier vers lequel convergent tous les efforts. Pour les encadrer, une alternative s’impose au missionnaire : soit il se sédentarise en un point à partir duquel il va rayonner ; soit il se déplace etdevient itinérant pour contacter de nouvelles populations ou bien, cas plus rare en Afrique, pour en suivre une elle-même nomade. Cette possibilité concerne plutôt l’Amérique du Nord. Comme le montre Olivier Servais, des Jésuites ont parcouru au XIXè la région des grands Lacs pour suivre l’ethnie nomade des Ojibwas262. En Afrique, les missionnaires itinérants sont plus rares. Ceux-ci se confondent avec l’explorateur dont ils partagent souvent le mode de vie. Le missionnaire britannique Livingstone constitue sans doute un modèle du genre. Un homme comme Duparquet, lui aussi, privilégie l’exploration et le premier contact plutôt que la mise en valeur ou l’investissement durable en un endroit. De nombreuses voix missionnaires reprocheront d’ailleurs à ces hommes d’avoir fait passer l’exploration et la célébrité qu’apporte ses découvertes avant l’évangélisation complète d’une population. Ainsi, Duparquet est plus connu pour les plantes rapportées auprès du Museum que pour le nombre de païens baptisés. Cette forme d’apostolat est fréquente dans une Afrique encore mal connue à une époque où les premiers missionnaires sont difficiles à contrôler et sur lesquels Propanda Fide a encore peu de prises. Tels des électrons libres, ces missionnaires bousculent les frontières connues du continent africain par les témoignages qu’ils rapportent de leurs voyages.

Néanmoins, certains instituts déplacent leurs missionnaires à l’intérieur de la mission en les affectant à différents endroits. C’est le cas des Jésuites au Kwango par exemple. Dans l’entre-deux-guerres, le RP Ivan de Pierpont a ainsi parcouru au cours de ses cinqséjours en Afrique trois régions différentes à l’intérieur du vicariat. Une carte jointe à sa biographie parue en 1939 nous renseigne sur l’espace géographique qu’il a exactement parcouru263 (Cf. Anne xe 6 : les champs d'apostolat du P. Ivan au Kwango ). Elle inspire deux remarques : tout d’abord, le RP Ivan est bien affecté dans une petite partie de la mission et l’addition de « ses » trois champs d’apostolat ne couvre pas l’ensemble de son territoire, bien qu’elle dépasse la surface de la Belgique, dont la taille est utilement représentée à côté. Mais cette pratique de réaffectation contribue à mieux faire connaître le Kwango par le missionnaire qui s’approprie mieux la mission en tant qu’espace institutionnalisé.

La plupart des situations de mission concerne des hommes fixés dans leur station dont l’influence cherche à rayonner sur les alentours. Pourtant, bien que leur résidence soit établie, ces missionnaires sont appelés à se déplacer. C’est le résultat d’une évangélisation quantitative, comme le résume Bouchaud en 1955, quand il évoque la mission de brousse :

« La mission rayonne sur un territoire plus ou moins vaste, où son action s’exerce par des postes de catéchistes installés dans les principaux villages et visités à intervalles réguliers par l’un ou l’autre Père de la mission.

Les résultats de cette organisation ont varié beaucoup suivant les lieux et les circonstances, mais d’une façon générale, on peut dire que cette méthode d’apostolat a fait ses preuves. Sans doute, elle vise à une évangélisation d’abord quantitative, c’est-à-dire qu’elle cherche à atteindre le plus de monde possible, mais elle a l’avantage de se situer dans le milieu indigène lui-même et de faire évoluer les gens sans les sortir de ce milieu. Sans doute, aussi, elle ne donne qu’une formation religieuse limitée : l’enseignement repose surtout sur les catéchistes et ne va guère en profondeur »264.

- La tournée apostolique

Cette limite explique pourquoi la visite du missionnaire est primordiale. Il est le seul à entretenir ou réactiver la flamme du catholicisme. Les passages du missionnaire sont hebdomadaires, mensuels ou parfois annuels. Ensemble, ils constituent la visite pastorale ou tournée apostolique. Accomplie de manière rationnelle, c’est-à-dire dans un certain sens géographique de manière à économiser les déplacements, elle détermine finalement l’espace effectif de la mission, c’est-à-dire l’espace où l’action du missionnaire s’est réellement portée. En reliant tous les postes qu’il a fondés, le missionnaire réactive son œuvre et délimite du même coup son territoire.

Cette tournée s’inscrit dans une volonté d’organisation et de rationalisation de l’apostolat, sans cesse croissante, demandée par la congrégation Propaganda Fide et permise grâce à la discipline de son personnel. A la tête de chaque vicariat apostolique siège un évêque. Or, celui-ci doit rendre des comptes une fois par an à Rome sur sa mission, en accomplissant la visite ad limina265. Cette action hautement symbolique donne à la fois un sens et un rythme aux visites du vicaire dans son territoire. A partir du XVIIIè266, pour mieux rendre compte de son action sur le territoire dont il a la charge, l’évêque adresse chaque année un compte-rendu détaillé de sa mission, sous forme d’un questionnaire qui aura nécessité la visite des diverses stations que compte le vicariat. Ainsi, la visite ad limina devient-elle l’occasion d’une description détaillée et chiffrée de la vie dans l’ensemble de la mission, que seule une tournée d’inspection auprès de toutes les stations peut dresser. La collecte d’informations exigée par le vicaire mobilise donc chaque responsable de station qui la relaie sur l’ensemble des missionnaires, chargés d’accomplir à leur niveau leur propre tournée. Le résultat est consigné plus ou moins rigoureusement dans des registres archivés qui alimenteront les lettres adressées à Rome comme aux organismes bienfaiteurs d’Europe, eux-mêmes voraces d’informations et de statistiques. Cette centralisation a été une réussite, surtout auprès des congrégations qui avaient très tôt anticipé le mouvement en exigeant de leurs missionnaires des rapports circonstanciés267.

En effectuant sa tournée, le missionnaire partage le même rapport à l’espace que le militaire, l’administrateur colonial ou encore le scientifique. Chronologiquement, le religieux a sans doute pu inspirer les civils dans l’art et la manière d’organiser leur visite. Parmi eux, Robert Delavignette, administrateur en Oubangui-Chari dans l’entre-deux-guerres, a consigné dans ses mémoires l’art de la tournée. Il privilégiait le contact direct avec les habitants, préférant la marche et les pistes immémorielles où passaient les aînés. Selon lui, tout bon administrateur devait consacrer dix jours par mois à la tournée qui donnait systématiquement lieu à un rapport268. A chaque fois, des relevés étaient effectués pour améliorer la couverture cartographique de la colonie. En 1933, la carte générale de l’Oubangui n’est toujours pas dressée et seuls les broussards peuvent combler les blancs de la carte laissés par les cartographes en chambre de Brazzaville269. Plus globalement, la tournée est aussi le modèle suivi par quelques scientifiques qui fixent dès les années 1930 les bases d’une géographie africaniste270.

- Les voyages d’exploration

Les voyages d’exploration sont aussi nécessaires à l’évangélisation. La désignation d’un territoire de mission s’effectue depuis Rome, où la congrégation De Propaganda Fide décrète le plus souvent sans connaître l’étendue du terrain en question. Or, les premières attributions portent sur des espaces immenses qu’il s’agit de découvrir avant la mise en valeur. Les missionnaires n’occupent qu’une très faible surface de leur mission, résumée au départ à un simple poste sur le littoral. Ainsi, dans un but d’apostolat, ils partent à la découverte de l’espace qui leur a été confié, pour y repérer les populations et fonder de nouvelles stations. Si le but est religieux, la démarche relève de l’exploration car l’Afrique est l’un des derniers territoires encore inconnus de l’Europe et le missionnaire adopte le regard et le comportement de l’explorateur. Leurs souvenirs, qui nourrissent les Missions catholiques, transportent le lecteur sur les marges de la civilisation, au cœur du continent mystérieux. La carte qui accompagne forcément ces témoignages inédits et attendus présente les caractères habituels d’un compte-rendu d’exploration. C’est le cas du voyage du RP Horner, dans l’Oukami au Zanguebar en 1870271 (cf : Oukami  ) : le canevas situe les positions atteintes, l’hydrographie de la région est dessinée, avec fleuves et affluents, le relief brièvement tracé. L’absence d’autre toponyme donne l’impression d’une avancée dans l’inconnu, d’un progrès sur la Terra incognita. Le sujet reste néanmoins le voyage jusqu’à la nouvelle mission de Mondha. Ce document relève du type « carte-itinéraire » où le trajet suivi, scrupuleusement indiqué, confère toute sa valeur au voyage272. L’article qu’il accompagne fait l’objet d’une étude géographique globale et complète. Les remarques sont dignes d’un hydrographe, d’un botaniste, et d’un entomologiste, réunis en une seule personne, qui mobilise par ailleurs ses connaissances des langues locales pour identifier les noms donnés à chaque rivière. Ainsi, le fleuve Kingani qui traverse la région, est aussi appelé Mto ou Roufou. Ces précisions contribuent à lever les doutes sur les toponymes employés jusque-là, doutes qui ont du alimenter d’interminables discussions entre géographes et explorateurs, et confèrent au passage une certaine autorité scientifique au missionnaire273.

Le missionnaire-explorateur, voilà sans nul doute l’idéal de Duparquet, qui traverse de vastes étendues de l’Afrique australe encore inconnues des Européens. Sa connaissance du portugais et son appartenance à la Société de géographie de Lisbonne274 lui servent de sésame pour arpenter une terre qui relève encore, selon le Portugal, du Padroado, soit une terre où les missionnaires de Rome ne sont pas admis. Sur un plan politique, la région n’a pas encore d’autorité bien déterminée : le Portugal revendique au nord le Congo et l’Angola, l’Etat sud-africain s’étend au sud et les limites respectives ne sont pas fixées. Comme les Français s’intéressent à d’autres régions, l’espace parcouru par Duparquet est inédit et inhabituel pour le public de l’hexagone. D’ailleurs, les cartes qu’il avait lui-même à disposition étaient étrangères et peu précises275. En tant que préfet apostolique de la Cimbebasie, le missionnaire effectue seul un voyage de janvier à décembre 1879 qui donne lieu à de nombreuses cartes276, (cf : Cimbebasie , Le Damara , Le Quanhama et l’Ovampo , L’Okavango , L’Ovampo  ) totalement inédites pour l’époque, que plébiscitent d’ailleurs les connaisseurs, comme l’éminent Pr Petermann de l’Université de Gotha dans ses Mitteilungen. Celles du Damara, du Quanhama et de l’Ovampo sont établies avec l’aide d’un explorateur de l’Afrique australe, M. Dufour. Leur contenu relève plus de l’exploration que de l’évangélisation. Les notes qu’il laisse montrent d’ailleurs qu’il utilise les mêmes procédés que Livingstone ou Stanley277. Par exemple, ces cartes rapportent avec précision la position des localités traversées mais pas les ethnies rencontrées. Les documents originaux, consultés aux archives spiritaines, montrent une représentation très pratique du territoire : un itinéraire réunit sur un axe vertical les localités et la distance qui les sépare, estimée en heure de wagon, qui est le mode de locomotion utilisé par les Européens du Cap278. Ensuite, ce type d’itinéraires va être multiplié pour quadriller la région dans tous les sens, l’objectif étant de passer d’une représentation linéaire à une représentation surfacique. Pour combler les vides en évitant des trajets longs et coûteux, Duparquet collecte des informations auprès d’autres voyageurs à qui il soumet un questionnaire complet279. Cette manière pour le moins économique de parcourir le territoire ne transparaît pas dans la carte, qui ressemble davantage à une carte routière de la région destinée au voyageur plutôt qu’au lecteur des Missions catholiques. Finalement, ces documents témoignent d’un double souci : au-delà de la recherche de sites pour fonder une mission, Duparquet entend profiter de l’absence d’autorité pour étendre celle de sa congrégation. Il poursuit un objectif scientifique qui veut combler les blancs de la carte et un autre propre à la mission qui veut agrandir les limites de sa Cimbébasie, aux dépends du clergé portugais et des missions voisines du Natal et du Cap280. Dans les deux cas, l’accumulation des toponymes appuie ses prétentions. Plus l’espace est nommé, plus il est prétendument connu et plus on peut revendiquer son titre de propriété.

C’est aussi une terre vierge et inconnue du public que décrit le RP Le Roy à travers ses voyages sur la côte orientale281,(cf : A travers le Zanguebar   Zanguebar   De Zanzibar à Lamo  ,  V.A. du Zanguebar   Cours du Tana   ») très éloignée des projets nationaux, ce que déplore le missionnaire282.(cf : Afrique orientale   ) Celui accompli au Zanguebar anglais en novembre 1890 fait l’objet d’un soin particulier : une première carte rappelle la situation religieuse de la mission, coupée en deux par les sphères d’influence anglaise et allemande283. (cf : V.A. du Zanguebar )Une seconde montre avec précision le tracé du fleuve Tana284, (cf : Cours du Tana ) remonté au-delà de la station anglaise de Koné, et présenté comme une voie de pénétration vers le mont Kenya. Quant au voyage effectué au Kilimandjaro, il est illustré par une carte totalement inédite sur les pentes méridionales du massif et une autre sur l’itinéraire emprunté285.(cf : «  Le Kilimandjaro   , Au Kilimandjaro , De Vanga à Gondja ) Les documents du RP Le Roy sont des relevés d’exploration : l’itinéraire est mentionné et donne lieu à une mise en scène pour impliquer davantage le lecteur ; quelques considérations générales sur le paysage parcouru, les reliefs repérés, les localités traversées.. Comme un explorateur, Le Roy multiplie les toponymes : l’espace est nommé et découvert. Mais, à l’exemple du RP Horner, le missionnaire se distingue par l’utilisation systématique du nom local pour désigner un endroit. D’ailleurs, il rappelle sur la carte la manière de prononcer les lettres et les sons. Cette précision le distingue des explorateurs habituels.

Les connaissances linguistiques des missionnaires -et leurs connaissances du milieu tout court- en font de précieux alliés pour le colonisateur. C’est le second cas de figure des voyages d’exploration. Les soldats de Dieu sont sollicités par les soldats français pour les guider ou les aider dans leur découverte de l’Afrique. Les missionnaires se prêtent volontiers à l’exercice qu’ils tournent à leur avantage : ils en profitent pour arpenter le territoire de leur mission qu’ils connaissent mal et fonder de nouvelles stations. La situation politique impose finalement cette alliance : il est en effet préférable pour les missionnaires d’avoir affaire à des compatriotes plutôt qu’une autre puissance européenne qui risque, craignant leur mauvaise influence, de les persécuter ou les expulser. Cette attitude se traduit donc par une certaine nationalisation des champs d’apostolat, forçant missionnaires et colonisateurs à marcher ensemble. Claude Prudhomme a présenté ce phénomène pour la situation de l’Afrique centrale286 et le modèle est généralisable à l’Afrique entière. Ainsi, dans toutes ses colonies, l’Etat français a sollicité les missionnaires sur place, et ceci dès la phase d’exploration. Au Gabon par exemple, Brazza, qui cherche une voie de pénétration vers l’intérieur, explore l’Ogooué d’août 1875 à novembre 1879. Il emploie des missionnaires mais sans leur rendre hommage dans sa relation de voyage287. L’expédition part de Lambaréné, qui devient le point de départ de toutes les excursions vers l’intérieur, ce qui peut parfois agacer les missionnaires du fait de l’agitation288. En 1880, quand Brazza a finalement atteint le Congo et signé un accord avec le roi Maccoco en amont des cataractes, les Missions catholiques rapportent l’événement dans leur carte du n°641289.(cf : Afrique équatoriale du Gabon au Congo  )Ce document trace la nouvelle voie vers le Congo et montre aussi la présence des stations spiritaines, qui jalonnent le parcours. Il permet aussi de localiser toutes les futures explorations auxquelles ont participé les missionnaires et que relatent les Missions catholiques (Cf. Annexe 7 : les voyages d'exploration vers le Congo ). Le voyage du RP Bichet dans le cours moyen de l’Ogowé et du Ngounie en 1881 lui fait approcher les Ivilis, le peuple le plus éloigné de la région290.(cf : Ogooué et Ngounié ) Ses connaissances le désignent pour accompagner l’enseigne de vaisseau Espinassy dans un voyage visant à relier directement le Rhembowe et l’Ogooué291.(cf : Rembhowé à l’Ogowé ) Le même RP Bichet, auquel est associé le RP Davezac, accompagnent une nouvelle « mission éminement patriotique » de Brazza qui confirme la liaison Lambaréné-Congo en juin 1883292.(cf : De Lambaréné au Congo   ) Cette fois, le trajet est presqu’entièrement fluvial. Seule manque une courte jonction terrestre entre les rivières Passa et Diélé. Cette portion correspond à un seuil séparant à l’Ouest, le bassin hydrographique de l’Ogooué et à l’Est celui du Congo. C’est ce court épisode terrestre que les missionnaires mettent à profit en menant une excursion chez les Batékés. La carte293,(cf : Chez les Batékés ) assez pauvre en termes d’indications, insiste malgré tout sur ce passage incontournable à l’époque pour une liaison entre le Gabon et le Congo. Le long du grand fleuve, les missionnaires sont aussi employés par Brazza. Le RP Augouard est sollicité ; il a déjà exploré la région294 qu’il a représentée par une carte295.(cf : Congo, embouchure au Stanley-Pool* ) En septembre 1883, l’explorateur lui donne rendez-vous au Stanley-Pool afin d’y établir une station et d’entretenir le souvenir de son passage en offrant des cadeaux296.(cf : Congo, embouchure au Stanley-Pool* ) L’installation d’une station de missionnaires français à Linzolo s’inscrit pleinement dans une stratégie d’occupation du terrain que recherche Brazza. Elle sert à baliser les limites du territoire acquis à la France, rôle que jouent les stations de Stanley297 ou les postes des Etats du Congo298 (cf : Congo, du Stanley-Pool à l’équateur* , das Gebiet der Internationalen Kongo-Gesellschaft )pour le rival belge. Mais Augouard reprochera toujours à l’explorateur son manque de reconnaissance pour l’aide qu’il a, avec ses confrères, apportée à l’acte de colonisation. Le thème est fréquent sous la plume des missionnaires299 : ils dénoncent l’oubli dans lequel les rejette la Patrie une fois le service rendu, comme ici en 1902 : « Envoyé presque officiellement par un Ministère, le Ministère suivant ne nous pas reconnus, les mêmes récompenses officielles ne sont pas venues nous trouver, pas plus que la notoriété qui s’attache d’ordinaire à ces voyages (..) Nous avons rempli notre devoir, nous sommes partis pour la France, nous avons suivi la Patrie. Alors que sur ces immenses contrées du pays noir, flottera l’étendard national, nous savons que nos efforts y auront contribué. Soldats obscurs d’une tâche immense, nous aurons pris notre part du labeur. Mais à cette heure où le rôle des missionnaires est parfois étrangement dénaturé, nous tenons à faire remarquer que pour nous, croix et drapeau sont inséparables. Le missionnaire est avant tout un patriote300 »

Cette plainte, qui intervient en France dans un contexte tendu entre le gouvernement et les congrégations religieuses, est celle du RP Trilles, formulée à l’issue d’un long voyage dans le nord du Congo français, d’août 1899 à avril 1901, que les Missions catholiques ont largement rapporté301. Le missionnaire effectuait alors un voyage de reconnaissance avec un certain M. Lesieur, fondateur d’une Société d’Exploration Coloniale.

« Partis le 19 décembre 1899 de Sendjé, nous avons mis près de deux mois à franchir les 250 kilomètres qui séparent les côtes d’Etsam, en ligne brisée, ayant marché successivement N-S, O-E, E-N. Ce long espace de temps, loin de nuire à nos intérêts, nous a permis de beaucoup mieux connaître le pays, d’explorer tout autour des villages, de pousser des pointes dans toutes les directions, de relever des rivières entières, de lever une carte du pays dont notre connaissance de la langue indigène nous a fait inscrire tous les noms d’une façon exacte et avec leur étymologie, évitant ainsi les erreurs grossières qui émaillent nos cartes, de faire en un mot plus qu’un simple itinéraire, mais œuvre d’explorateurs et de Français, un travail utile et non un voyage en coup de vent ».

Si leur but premier était de dresser des cartes et lever les cours des fleuves302, il s’agissait surtout de faire signer des traités avec des chefs locaux et installer si possible le drapeau français dans tout le nord de la colonie.

« Sans verser une goutte de sang, par simple persuasion, promesses de commerce, l’expédition a su traverser un pays et des populations que l’on disait féroces à l’excès, et avec raison, leur faire conclure des traités dûment acceptés et signés, qui les rangent de leur plein gré sous l’autorité de la France. C’est depuis la côte, 250 kilomètres de terrains acquis, en profondeur, sans conteste désormais303 »

Selon le missionnaire, les résultats de l’expédition furent considérables, du point de vue politique comme du point de vue géographique304. Si l’expédition n’était pas officielle, c’est parce qu’elle visait à accaparer le petit espace revendiqué par l’Espagne, le célèbre « contesté franco-espagnol ». Et comme toute la région est peuplée par les Fang, c’est naturellement auprès du RP Trilles305 que s’adressa M. Lesieur. Mais l’opération tourne court en 1911, car la France divise finalement le contesté entre une partie espagnole et une autre allemande, ce qui explique sans doute le manque de reconnaissance pour l’œuvre du missionnaire ainsi que le peu de publicité faite aux résultats cartographiques pourtant inédits306.(cf : Congo, voyage du P. Trilles  ) Le Père assure donc sa propre publicité de l’expédition en publiant ses relations de voyage après la guerre307.

Ce dernier exemple, pris à l’aube du XXèsiècle, prouve que le déplacement du missionnaire peut remplir plusieurs objectifs : l’exploration et le relevé du terrain, les accords passés avec les chefs et, au passage, l’évangélisation le font travailler pour la Science, la Patrie et la Foi. Mais si les souvenirs insistent sur le manque de reconnaissances de la Patrie, ils occultent souvent les enjeux territoriaux propres à la mission, plus ou moins avouables au grand public. En l’occurrence, le RP Trilles espérait pouvoir conserver les stations fondées par sa congrégation que seule une souveraineté totale de la France aurait pu lui assurer. La crainte était fondée car la position de Bata, occupée depuis 1890, fut finalement cédée à l’Espagne en 1903, suivie par celle de Mouni, fondée en 1891, accordée à l’Allemagne en 1911308.

Mais les conditions locales difficiles nécessitent des adaptations

- Des conditions naturelles contraignantes

Le déplacement dans les paysages de l’Afrique subsaharienne est difficile, surtout en l’absence de routes et de chemins. Voilà comment le RP Briault présente encore en 1930 le sentier dans la forêt du Gabon :

« Les gens d’Europe finiront un jour par comprendre et retenir que l’Afrique est plus grande que sur la carte (..). Le sentier africain garde la marque et la mesure de son origine : la largeur des deux pieds de l’homme placés côte à côte. Jamais un coup de pioche ne l’a couvert davantage. Jamais un coup de houe ne l’a nivelé. Il est si étroit que les touffes d’herbes ou les arbustes bas le cachent à l’œil : alors on le devine comme un sillon de végétation moins dense et cela suffit au guide pour ne pas le perdre de vue. Mais jamais vous n’y pouvez marcher à côté d’un compagnon : en file indienne, toujours.

A pied aussi, toujours. Un cheval ou un âne ne sauraient ici porter un cavalier, car les branches basses auraient vite fait de le désarçonner ? Il n’est même pas besoin d’une monture pour entrer en collision avec les branches, car les Noirs ignorent la coutume d’élaguer »309

Plus loin, le missionnaire explique que..

« ..la marche en forêt est pénible parce qu’elle est rendue monotone. La conversation est rendue impossible par la disposition en file indienne, ou bien alors il faut crier fort. Il faut aussi, si l’on veut causer, que l’allure se ralentisse, car, d’ordinaire, le pas est très rapide et, le danger de se perdre aidant, chacun a le souci de suivre de près celui qui le précède. Mais tout le temps il s’agit de regarder à ses pieds, aux racines, aux boucles des lianes, aux épines des raphias, des pandanus, des palmiers grimpants qu’on appelle encore asperges sauvages. On est des huit et des neuf heures, en certains itinéraires, à marcher ainsi comme des bêtes presque sans lever la tête ».310

Enfin, « dès qu’on reste deux mois sans plus y passer, la piste est envahie à nouveau par le sous-bois et il est périlleux de s’y fier »311. L’absence de chemin et la densité du couvert végétal expliquent la lenteur des déplacements et la raison pour laquelle les fleuves et leurs affluents ont toujours été privilégiés comme voie de pénétration. L’hydrographie reste le premier élément référencé sur une carte de l’Afrique. En l’absence de route, elle constitue en quelque sorte son réseau de communication, insistant sur la navigabilité des cours d’eau, les éventuelles chutes ou écueils. Ainsi, il n’est pas surprenant de voir chaque Européen explorant le continent noir relever systématiquement pour chaque cours d’eau rencontré des données comme le sens de son courant, la largeur de son lit et sa profondeur. Tous contribuent à dresser la carte des voies de circulation en Afrique, qu’emprunteront leurs successeurs.

Un autre problème concerne les conditions du voyage, que le RP Le Scao, CSSp, rapporte en 1908 :

« Le missionnaire ne voyage pas seul. Il lui faut des porteurs, au moins quatre : un pour son autel portatif, un pour son lit de camp, un pour faire sa cuisine, et un autre pour les marchandises à échanger contre des vivres. Les porteurs sont difficiles à recruter. Cela se comprend. Faire trente km par jour sous une charge de trente kg, et cela pendant trente ou quarante jours, n’est guère agréable ! Leur salaire, que notre maigre bourse trouve encore élevé, n’est que de dix à quinze francs »312.(cf :   Loango (V.A.) )

Les nombreux témoignages des missionnaires rapportent ces difficultés qui toutefois ne constituent pas un obstacle insurmontable. Au Cameroun s’est posé le problème de la pénétration terrestre quand les voies fluviales n’y suffirent plus. Du côté allemand, on encouragea la locomotion à pied à laquelle on s’exerçait par de longues promenades dans les maisons de formation313. Les distances n’effraient pas les missionnaires et certains ont pu s’inspirer du jésuite Jean de Breboeuf qui parcourait au XVIIIè près de 40 km quotidiens en suivant les Hurons. De même, le RP Augouard aurait plusieurs fois accompli à pied la distance séparant Pointe Noire à sa résidence de Brazzaville, bien avant la construction du célèbre chemin de fer314. Au-delà des prouesses physiques, et pour donner une idée du rapport de l’homme aux distances en Afrique, le RP Briault préfère évoquer en 1945 le sort des Africains eux-mêmes, engagés comme porteurs. Selon lui, certains auraient accompli, « à l’heure de la vapeur » près de 1400 à 1500 km à pied. Il rapporte l’histoire de cet homme qui avait reconnu le RP Joseph Soul, CSSp, chargé de la visite officielle des communautés, à Leketi au Congo, soit 1700 km de l’endroit où il l’avait vu une première fois, à Bukama. Et Briault de s’interroger : « où sont vraiment les grands voyageurs ? Est-ce bien nous ? »315.

Aux contraintes de distance et de transport s’ajoute celle du temps, qui met durement à l’épreuve les premières fondations ; au Congo, vers 1880, les stations spiritaines rappellent la précarité des premières fondations : « Placées dans des villages qui avaient manifesté de l’intérêt pour la mission, elles présentaient quelque espoir de conversion. Celles échelonnées le long de la rivière voyaient plus fréquemment le missionnaire. Mais cette organisation était satisfaisante pour un personnel stable. La maladie et la mort entraînaient souvent le remplacement des missionnaires. Les nouveaux devaient resserrer les liens et commencer par apprendre la langue »316. Cette situation montre à quel point la visite du missionnaire, à défaut de sa présence permanente, détermine la réussite de la mission. Peu nombreux, difficiles à remplacer, les hommes doivent en plus maintenir un contact avec les populations. Dans des immensités menacées par le paganisme, l’islam, l’erreur protestante ou tout simplement l’oubli, ils mènent une course contre la montre et l’adoption d’un mode de déplacement, qui tente d’allier rapidité et économie, devient une nécessité. Tout d’abord, les formes de déplacement les plus élémentaires ont été utilisées, puisant force humaine ou animale pour avancer, avant de recourir aux progrès techniques.

- L’utilisation d’une force humaine ou animale

Au contact des sociétés esclavagistes, quelques missionnaires ont utilisé des modes de transport nécessitant des porteurs (Cf. Annexe 8 : quelques moyens de déplacement en mission ). C’est le hamac du RP Courdioux au Dahomey, le filanzane des Jésuites de Madagascar. Si l’image provoque parfois des réactions, toutes relatives pour l’esprit de l’époque, elle ne mentionne pas que de nombreux porteurs étaient rétribués et les missionnaires durent parfois y renoncer justement parce qu’ils étaient trop chers. Souvent, ce mode de transport est réservé à des personnages ou des moments exceptionnels, comme la visite d’un Supérieur ou l’arrivée des religieuses dans la mission. Mais il a pu être utilisé auprès de chefs locaux car il provoque un effet d’autorité assuré sur les populations à qui s’impose le cortège. Un parallèle peut être fait avec les missionnaires installés dans des zones lacustres, fluviales ou littorales, qui parcourent presque quotidiennement une distance sur l’eau. Disposant d’une barque ou d’une pirogue personnelle, nombreux comptent aussi sur des rameurs, notamment pour les voyages qui engagent matériel et cargaisons.

Les animaux ont parfois été exploités. Leur force permet d’épargner celle du missionnaire. Mais le climat africain met les bêtes comme les hommes à rude épreuve. La mouche tsé-tsé fait des ravages et pousse les explorateurs européens à renoncer à la solution animale pour le portage317. Vers 1880, sur la côte orientale, après l’échec des chevaux, des mules et des ânes, certains prévoient d’utiliser des éléphants d’Asie domestiqués, mais sans succès. Les missionnaires n’ont pas introduit d’animal de bât en Afrique, préférant recourir aux espèces locales : le RP Charles de Foucault parcourt le désert en dromadaire, le RP Lang la Cimbebasie sur un buffle, que le RP Duparquet préfère atteler à son « wagon » sur le modèle des convois boer, dans sa traversée de l’Afrique australe.

- L’utilisation de la technique

Pour dépasser la vitesse d’un marcheur et quand cela a été possible, la bicyclette a été utilisée. Importée d’Europe, elle a elle-même connu quelques adaptations en Afrique. La revue des Missions catholiques fourmille des modifications apportées pour adapter le matériel aux rudesses de la terre africaine. Européens avant tout, de nombreux missionnaires n’ont pas renoncé aux progrès accomplis en matière de transport et de locomotion. La plupart n’hésitepas à faire parvenir jusque dans la mission, un mode de locomotion conçu en France. La technique est admise car elle contribue, en permettant de se déplacer plus rapidement, à améliorer l’efficacité de son apostolat318. De plus, la maîtrise de cette technologie augmente encore une fois l’autorité du missionnaire sur les populations, comme le montrent les très nombreuses photographies prises au moment du départ pour la tournée319.

Au Cameroun, les missionnaires adoptent les techniques les plus récentes. A la marche du XIXè, ils préfèrent la bicyclette, dès 1900, pour sillonner la brousse. Après 1914-1918, le RP Graffin est signalé à motocyclette. Puis, les chefs locaux importants transportent les pères dans leur voiture. Le train atteint Yaoundé en 1927. Les camionnettes font leur apparition dans les années 1930, et en décembre 1931, on signale la première automobile à Minlaba320. Les autres missions connaissent les mêmes adaptations321.

Pour les plus vastes, l’avion est mis à disposition des missionnaires. En Afrique australe, la célèbre OMI, relie ses stations les plus éloignées grâce à ses junkers322. Les missions protestantes ont recours au même procédé et Marc Spindler reconnaît que l’avion, loin de supprimer les rencontres missionnaires, facilite l’apostolat, « en rendant accessible à la mission et au monde extérieur en général des populations totalement à l’écart des grands circuits maritimes et routiers ». En un mot, l’avion incarne le grand idéalmissionnaire : atteindre Omnes Gentes, toutes les nations sans exception323. Le même mode de transport est utilisé dans le grand nord canadien, pour les mêmes raisons.

- La vapeur au service de l’évangélisation324

Il faut toutefois revenir à cette période de l’exploration africaine qui a privilégié le navire à vapeur pour pénétrer le continent en remontant ses fleuves. Il est une parade aux difficultés comme le manque de rameurs ou la nécessité de remonter le courant. En revanche, il mobilise une équipe chargée de la navigation et de son entretien. L’exemple le plus abouti est l’expérience du RP Augouard325 sur le Congo, puis sur l’Oubangui, principal axe de circulation du vicariat apostolique éponyme (Cf. Annexe 9 : la vapeur au service de l'évangélisation ). Son premier navire, le diata-diata, rebaptisé Léon XIII, lui permettent de parcourir rapidement le fleuve326 et de pousser toujours plus loin l’évangélisation en installant de nouvelles stations auxquelles il assure le ravitaillement, considérées comme des « sentinelles avancées de la civilisation chrétienne »327. Outre le lien quasi-vital pour ces stations les plus isolées, le navire sert aussi de refuge dans la lutte contre l’esclavage en accueillant à son bord des enfants rachetés. C’est du moins en ces termes que Mgr Augouard le présente dans un rapport adressé à la Propagande en septembre 1894328. Cet outil d’apostolat se modernise avec un nouveau Léon XIII en 1897, commandé en France et monté en Afrique. Un troisième navire, le Pie X, est construit en 1908 : 27 m de long, 6 à 10 m de large, propulsé par deux machines de 150 CV329. Dans son rapport habituel adressé à la Propagande, en 1920, Augouard résume :

« Ce bateau nous est d’une grande utilité pour l’inspection et le ravitaillement de nos missions, de même que pour la visite de nos catéchistes échelonnés le long de nos fleuves ; le Pie X est une véritable mission flottante (..) Il s’arrête chaque soir dans les villages ou dans les postes qui nous fournissent du combustible et bon nombre de chrétiens en profitent pour accomplir leur devoir religieux »330.

A la mort d’Augouard, la mission compte trois navires, ainsi que des ateliers de réparation et d’entretien, que le vicaire aura soin de léguer naturellement au RP Rémy, par testament. Cette mobilisation de la vapeur à des fins d’évangélisation a finalement transformé les missionnaires en véritables spécialistes de la navigation sur ces fleuves, dont les caprices sont autant connus que craints. Ainsi, dans la biographie d’Augouard que fait paraître son frère en 1934, on apprend que..

«  les nombreux voyages sur les fleuves congolais avaient incité les missionnaires à dresser des cartes de navigation pour obvier aux nombreux accidents qui se multipliaient par suite soit de la baisse des eaux, soit des épaves de bateaux coulés, soit de la formation de nombreuses îles (..) En 1906-1907, Mgr Augouard publia sa carte fluviale de l’Oubangui, de Liranga à Saint-Paul-les-rapides, en 40 feuillets au 50 millième »331.

Résultat d’un travail d’une douzaine d’années, compilation des nombreuses observations des pilotes lors d’une navigation sur près de 600 km, l’ensemble constitue en 1906 avec les 600 km supplémentaires de Liranga à Brazzaville, un atlas332, aussitôt plébiscité par les revues spécialisées. La Dépêche coloniale vante « l’itinéraire raisonné, produit d’une expérience presque quotidienne et dressée avec une précision que les vrais hydrographes ne peuvent qu’imiter »333. Ainsi, la Société de géographie de Paris décerne en 1910 sa médaille d’or à l’ouvrage. Cette cartographie répond à un souci pratique de navigation qu’ont rencontré les missionnaires. Malgré l’absence assez surprenante de bathymétrie, ces cartes rendent service à la navigation à vue334, (cf : Carte fluviale du Congo, extrait 1 , Carte fluviale du Congo, extrait 2  ») et permettent à Augouard de revendiquer la reconnaissance des scientifiques comme des autorités coloniales. Selon lui, ces cartes prouvaient que les missionnaires savaient faire marcher de pair la science et l’évangélisation.

Ce trop court aperçu des modes de déplacement pose la question évidente des moyens mis à la disposition de la mission. Après les techniques bricolées par les premiers arrivants, qui suscitent par leur ingéniosité l’admiration des lecteurs des Missions catholiques, les engins adoptés par la mission placent les missionnaires à l’heure européenne. Ce qui accroît encore un peu plus l’effet qu’ils provoquent quand ils se rendent en tournée. Les lettres envoyées à la Propagation de la Foi regorgent de demandes d’équipement. Augouard par exemple, très bien renseigné sur les coût de fabrication, adresse un devis qui prend toute sa dimension dans une forme de chantage : « pas de mission sans vapeur » aurait-il pu conclure. Ainsi, les missions les mieux dotées bénéficieront de meilleurs modes de transport.

L’adoption des techniques propres à l’ère industrielle a un effet multiplicateur pour l’espace du missionnaire. Ses trajets sont plus courts et donc plus nombreux ; l’espace parcouru est plus vaste et atteint presque les limites de la mission confiée par Rome. Ainsi, l’élément technique a pu peser dans l’appropriation des missions par les missionnaires. En tous cas, en augmentant la mobilité du missionnaire, cela lui a permis de cartographier plus d’espace et de présenter la mission à une échelle plus petite.

Notes
262.

SERVAIS Olivier, Des Jésuites chez les Amérindiens Ojibwas, Collection Mémoires d’Eglises, Paris, Karthala, 2005, 662 p.

263.

« Champs d’apostolat du P. Ivan », in WILMET Louis, Un broussard héroïque : le RP Ivan de Pierpont, S J,(1879-1937), Dupuis, Paris, 1939, 444 p. 

264.

BOUCHAUD J., in Mgr DELACROIX (dir.), Histoire universelle des missions catholiques, T.III : Les missions contemporaines (1800-1957), Paris, Grund, 1958, p 307.

265.

La visite ad limina a donné lieu à une analyse pour l’Amérique du Sud : BOUTRY Philippe & VINCENT Bernard, Les chemins de Rome, les visites ad limina à l’époque moderne dans l’Europe méridionale et le monde hispano-américain, Ecole française de Rome, n°293, 2002, 273 p. Jean Pierre BERTHE y montre que pour couvrir le diocèse de Puebla, aux dimensions exceptionnelles proches de 100. 000 km2, soit une taille assez proche des missions d’Afrique au XIXè, l’évêque avait nommé deux ecclésiastiques qui firent la visite à sa place, par procuration. Cette attitude a très certainement pu s’observer en Afrique, le vicaire attendant simplement dans sa résidence épiscopale le résultat de l’enquête. Cf. « Les rapports ad limina des évêques d’Espagne au XVIè et XVIIè », pp.197-211.

266.

Par les décrets du 17 juin 1747 et du 2 avril 1759, renouvelés le 31 octobre 1838, la Propagande rendait la visite annuelle nécessaire, ou au moins la relation. Cf. « La visite ad limina », in Annuaire pontifical, 1911, pp.380-388.

267.

Dès 1840, la règle provisoire pour les Missionnaires du St-Cœur de Marie dressée par Libermann stipule dans son article 4 : « le Supérieur provincial chaque année fera la visite de toutes les communautés de sa province ; il en parcourra les stations et se fera rendre un compte détaillé de tout ce qui se passe dans l’exercice des fonctions saintes et tout ce qui pourrait lui être utile pour entretenir le bon ordre et la ferveur parmi ses confrères ». L’article 15 prévoit aussi qu’ « il doit mettre en ordre tous les détails de sa visite, ne jamais quitter la mission sans avoir réglé ce qui a besoin de l’être. Il doit rendre compte son Supérieur de la congrégation de tout ce qui se passe dans la communauté » in Règle provisoire de la Congrégation des missionnaires du S t -Cœur de Marie, éditée à Rome, imprimée à Amiens, 1845. LIBERMANN, Notes et documents relatifs à la vie et à l’œuvre du vénérable François-Marie-Paul Libermann, Paris, 1929, T. II, pp.325-330.

268.

DELAVIGNETTE Robert, Les vrais chefs de l’Empire, Paris, Gallimard, 1939, 263 p., réédité sous le titre Service africain en 1946, rapporté par BREGEON Jean-Noël, Un rêve d’Afrique ; administrateur en Oubangui-Chari, Paris, Denoël, 1998, pp.126-135.

269.

Si les administrateurs ont des moyens dérisoires, leur visite sur le terrain est nécessaire. Ils corrigent les nombreuses erreurs sur les cartes comme des noms de village reportés deux fois, des rivières inconnues.. BREGEON Jean-Noël, Un rêve d’Afrique, op. cit., pp.110-112.

270.

Voir sur ce point l’apport de trois précurseurs, précisément disparus en tournée : Weulersee, Leclerc et Richard-Molard. Evoqué par ROUGERIE Gabriel, A l’aube de la géographie africaniste, Paris, L’harmattan, 2004, 249 p.

271.

«  Oukami  », MC-1873-582. Le voyage est accompli par les RRPP Horner, Baur et Duparquet. La carte est l’œuvre de M. Dhéré, membre de la Société de géographie de Paris, qui fait paraître l’article dans le Bulletin en août 1873.

272.

Selon l’auteur, le principal mérite de ce voyage est justement sa « priorité ». Speke serait passé au Sud, par l’Ouzaramo. Les missionnaires sont donc les premiers blancs à pénétrer ces contrées. Le chemin sera ensuite utilisé par MM. Vienne et Stanley.

273.

Mgr LEROY, « Le rôle scientifique », op. cit., pp.3-11.

274.

Archives spiritaines, Dossier Duparquet, Diplômes, passeports 2D23.1a1. Outre son passeport français, le missionnaire dispose d’un passeport espagnol et d’un autre portugais de la ville de Santarem. Il est correspondant de la Société de géographie de Lisbonne, comme l’atteste un diplôme.

275.

Duparquet aurait utilisé une carte de Chapman, Map of South Africa qui dresse l’état des connaissances des années 1848-1864, mais qui est muette sur le Damaraland et le Great Namaqualand, ainsi que d’autres cartes de Petermann parues dans les Mitteilungen.

276.

«  Cimbebasie   », MC-1879-479 ; «  Le Damara   », MC-1880-367 ; «  Le Quanhama et l’Ovampo   », MC-1880-405 ; «  L’Okavango  », MC-1880-465 ; «  L’Ovampo   », MC-1881-475.

277.

Archives spiritaines, Dossier Angola, 3L1.16.4.

278.

Archives spiritaines, Dossier Duparquet, Afrique australe, Cartes, 2L1.1.1.

279.

Archives spiritaines, Dossier Duparquet, Afrique australe, Cartes.La fiche correspondant à la localité d’Oubombo présente au recto une quinzaine de questions : dans quel état de l’Ovampo nous trouvons-nous ? Quel est le pays entre Six-Fontaines et Oubombo ? Ya-t-il de l’herbe, de l’eau, des rochers ? Est-ce plat, montagneux, marécageux ? Est-ce habité, ya-t-il de la végétation, est-ce froid ? Qu’est Oubombo ? Les Européens sont-ils bien accueillis ? La population est-elle nombreuse ? Est-elle de race Ovampo ? Gêle-t-il à glace à Six-Fontaines ? Le versant Est des montagnes de Karoko ressemble-t-il au versant Ouest ? Oubombo est-il marécageux ? Est-il malsain ? La vie des Européens est-elle en danger ? Quelle est la meilleure route après Soap Bush ? Au verso figure une ébauche d’itinéraires, sans doute obtenue en croisant ces différentes informations.

280.

Cet objectif est délicat. La correspondance échangée entre le missionnaire, son Supérieur, le RP Planque, et Rome prouvent à la fois sa diplomatie et ses prétentions. Duparquet veut profiter du flou concernant les limites respectives des champs d’apostolat. Une note de son Supérieur lui rappelle, en joignant la carte anglaise de Hall, les limites des vicariats du Cap oriental et du Natal, et lui demande de ne pas empiéter sur ces territoires. Une autre carte de Propaganda Fide adressée par le cardinal Brunetti le 3 mars 1879, établie par le RP Deplechin, jésuite de la mission voisine du Zambèze, propose une délimitation des terres concédées aux Nuova Missione dei P.P. Della S.p.S. Dans cette situation, Duparquet veut profiter de l’ignorance générale, des difficultés portugaises à tenir leur territoire et des hésitations romaines.

281.

La carte «  A travers le Zanguebar   », MC-1884-762, accompagne un récit développé en 16 épisodes ; celle partielle du «  Zanguebar  », MC-1887-298, illustre le voyage accompli avec Mgr Courmont  à l’automne 1886 « A la découverte », in MC, n°942, 1887, p.296 ; «  De Zanzibar à Lamo   », MC-1889-9, accompagne le récit de navigation à bord du Salama de septembre 1887 à septembre 1888 raconté dans « Le long des côtes », in MC, n°1002, 1889, p.10 ; la carte «  V.A. du Zanguebar   », MC-1890-438 ouvre la vaste description « Au Zanguebar anglais », in MC, n°1009, 1890, p.438, que clôt la carte sur le «  Cours du Tana   », MC-1890-630. Chaque voyage se traduit par l’installation d’un nouveau poste.

282.

Le Roy met ses qualités graphiques au service de l’argumentation. La petite carte circulaire sur les routes projetées de l’«  Afrique orientale   », MC-1886-527, est censée attirer l’attention des autorités françaises sur la région. L’auteur y évoque un plan allemand visant à créer un réseau de grandes voies de communication reliant tous les grands lacs –Nyanza, Tanganyka, Nyassa- au Congo d’un côté et à l’Océan Indien de l’autre, accessible depuis le port de Dari-Salama, au sud de Bagamoyo. Selon Le Roy, le projet « paraît maintenant dormir, mais il est trop beau pour que, tôt ou tard, il ne se réalise pas ». La carte est suffisamment séduisante car elle présente le projet comme une évidence. Pourtant, malgré tous ses efforts, parfois appuyés par l’ambassadeur français à Zanzibar, le missionnaire ne parvient pas à mobiliser et Paris ne s’engage pas dans la région.

283.

«  V.A. du Zanguebar   », MC-1890-438. Le récit qui l’accompagne fait le point sur le partage politique de l’Afrique orientale. La sphère anglaise est présentée comme un terrain interdit dans lequel le missionnaire a pu exceptionnellement pénétrer.

284.

« Cours du Tana   », MC-1890-630. La carte précise le nom de toutes les localités des deux rives.

285.

«  Le Kilimandjaro   », MC-1892-370. La carte est promise depuis longtemps aux lecteurs de la revue et le missionnaire rappelle au début de son récit le caractère exceptionnel des informations, après un bref historique de l’exploration du massif. «  Au Kilimandjaro   », MC-1892-373, est la carte générale qui permet de suivre le trajet. Elle annonce les étapes représentées dans des cartons : « De Monbasa à Vanga », MC-1892-408 ; « Gassi », MC-1892-416 ; «  De Vanga à Gondja   », MC-1892-453 ; « Pare », MC-1892-525.

286.

PRUDHOMME Claude, Stratégie missionnaire du Saint-Siège sous le pontificat de Léon XIII (1878-1903) : centralisation romaine et défis culturels, Thèse pour le doctorat es lettres, décembre 1989, Université Lyon III, Chapitre 11.

287.

BRUNSCHWIG Henri (dir.), Brazza explateur de l’Ogooué (1875-1879), Paris, La Haye, Mouton, 1966, 215 p. Brazza cite quatre Européens : un aide-médecin, un quartier-maître, un spécialiste des collections pour le Museum et lui-même. Par ailleurs, il note que des « interprètes pour les langues M’pongwé, Bakalais, Pahouins et Cabinda pris au Gabon complétaient notre personnel composé de quatre Européens et dix-sept noirs ». Parti de Lambaréné, site qui réunit de nombreuses missions, Brazza a certainement profité de leur présence.

288.

Relire le Journal de Communauté de la mission spiritaine de Lambaréné qui reproche une attitude grossière au compagnon de Brazza, l’explorateur Dutreuil de Rhins. Archives spiritaines, Dossier Gabon, 4J2.6, Journal de communauté de Lambaréné de 1880 à 1964. Voir aussi le mémoire dressé par Augouard sur le personnage, OPM, fonds Augouard, Boîte XI, Dossier 24.

290.

«  Ogooué et Ngounié   », MC-1882-583.

291.

Le voyage, effectué du 19 au 28 septembre 1882 concerne quatre explorateurs. Il teste la viabilité d’un passage reliant l’Ogooué au fleuve Rembhowé et la côte atlantique. Comme le relate la revue, « c’est grâce au RP Bichet que les quatre explorateurs envoyés par le gouvernement français ont pu parvenir sans danger dans ces pays inconnus ». La carte «  Du Rembhowé à l’Ogowé   », MC-1883-126, est exceptionnellement dressée par l’officier. Les indications hydrologiques de sens du courant et de profondeur sont portées pour estimer un trajet fluvial à trois jours.

292.

«  De Lambaréné au Congo  », MC-1884-131. La carte établit le lien avec l’Alima, affluant du Congo en amont du Stanley-Pool. Le document précise par un canevas le chemin suivi ainsi que les ethnies rencontrées.

293.

«  Chez les Batékés  », MC-1884-154. Les missionnaires signalent leur voyage aller et retour à partir de Franceville.

294.

Augouard effectue un voyage exploratoire du 27 juin au 27 août 1881 dans la région. Pressé par le RP Carrie d’atteindre la Kasaï, il doit renoncer et faire demi-tour. ERNOULT Jean, Les spiritains au Congo de 1865 à n o s jours¸ mémoire spiritaine, études et documents, Paris, 1995.

295.

«  Congo, embouchure au Stanley-Pool * », MC-1882-HT. Le missionnaire a rencontré le roi Maccoco, le 4 août 1881. « Voyage au Stanley-Pool », in MC, n°665, 1882.

296.

COQUERY-VIDROVITCH Catherine, Brazza et la prise de possession du Congo ; la mission de l’Ouest africain (1883-1885), Paris, La Haye, Mouton, 1969, 502p. L’ouvrage ne mentionne que très rarement les missionnaires. Pourtant, ils ont bien été utilisés comme auxiliaires. En 1883, Brazza ne voulait pas rejoindre le Congo avant d’avoir assuré ses arrières sur l’Ogooué. Il donna rendez-vous à Augouard sur le Pool en septembre. Le RP Dolisie devait attendre à Loango avec le lieutenant Manchon. Mais le missionnaire se serait adjoint de son propre chef à l’expédition réunissant les RP Augouard, Kraft, Paris, qui, a la tête de 100 hommes, prirent la route du bas-Congo pour rejoindre le Pool. Arrivés sur place, le refus d’un roi Batéké, sans doute poussé par les Belges, les force à s’installer à 10 milles en deça, à Saint-Joseph de Linzolo. « Lettre d’Augouard à Brazza », 27 janvier 1884, Archives Nationales section Outre-Mer, Fonds Brazza, 3è mission.

297.

«  Congo, embouchure au Stanley-Pool * », MC-1882-HT.

298.

«  Congo, du Stanley-Pool à l’équateur * », MC-1886-20. La carte présente dans sa légende par des drapeaux les postes français et ceux des Etats du Congo et par des croix les missions catholiques. Le texte qu’elle accompagne rappelle l’antécédence de l’installation des missionnaires. Une autre carte relate de manière plus objective la compétition, dressée par de Lannoy de Bissy : « das Gebiet der Internationalen Kongo-Gesellschaft   », in Petermann’s Mitteilungen, 1884, Tafel 12.

299.

C’est un thème récurent dans les correspondances publiées par les Missions catholiques. C’est aussi le sujet choisi par Valéien Groffier, rédacteur de la revue, qui tient à rappeler l’intimité historique entre Mission et colonisation. GROFFIER Valérien, Héros top oubliés de notre épopée coloniale, Lyon, 1905, 400 p. L’auteur cherche aussi à faire sortir une fois de plus la littérature missionnaire de ses cercles habituels. La colonisation étant à la mode, il s’agit de rappeler l’œuvre accomplie par les soldats du Christ pour la gloire de la France. L’ouvrage est réédité en 1928.

300.

RP Trilles, conclusion de « Mille lieues dans l’inconnu », in MC, 1903, pp.620-621.

301.

La première partie est racontée en 38 épisodes durant l’année 1902 ; la seconde anime 25 épisodes en 1903.

302.

Le missionnaire est conscient de l’intérêt de ses travaux pour la géographie : « nul voyageur encore, ou à peu près, ne les avait en effet visitées, et sur la carte du Congo, le pays que nous devions parcourir était à peu près exclusivement en blanc » in TRILLES, Deux ans de voyage dans le Congo Nord, Paris, Desclée de Brouwer et Cie, 1920, p.16.

303.

TRILLES, Deux ans de voyage dans le Congo Nord, Paris, Desclée de Brouwer et Cie, 1920, p.109.

304.

Ibid ., p.110. Le missionnaire a progressé en quadrillant tout le territoire, fréquentant toutes les routes. Le moindre déplacement doit selon lui avoir son utilité pour améliorer la carte que lui a confiée le Ministère des Colonies. Il relève le tracé de nombreuses rivières, insistant sur leur taille, le sens de leur courant, leur profondeur, en un mot, leur navigabilité : la Lanya ou la Neille, la Lébé, le Woleu surtout, le Ntèm.. Selon lui, « les erreurs de détail à relever sont nombreuses. Le mont Fyelivinge s’appelle en réalité Fandzibe (qui donne beaucoup d’ombre). Les plaines indiquées sur la carte ne sont que de vastes plantations. La rivière Lanya est la Neille ; Kouembo se nomme aujourd’hui Kwem ; le mont Mdouandjo, Méboum onwam (huit repos), etc.. La carte des Colonies que nous possédons, carte officielle, n’est au fond qu’une carte de fantaisie, faite au petit bonheur, d’après les dires des étrangers ».

305.

Le RP Trilles a signé une première étude sur le peuple Fang dans les MC en 1900. Ses travaux ethnologiques lui valent un grand prix à l’Exposition belge sur le Congo en 1911, in MC, 1911, p.51. Par la suite, il est l’auteur de nombreux ouvrages : Le totémisme chez les Fân, Münster, 1912 ; Chez les Fangs ou quinze années de séjour au Congo français, Lille, Desclée de Brouwer et Cie, 1913, 286 p. Il reprend ensuite les travaux de Mgr Le Roy, son Supérieur, sur les pygmées : Les Pygmées de la forêt équatoriale, Paris, Bloud & Gay, 1932 ; L’âme des pygmées d’Afrique, Paris, Cerf, 1945.

306.

La petite carte que publie les M issions catholiques résume mal toutes les avancées géographiques apportées par le voyage. «  Congo, voyage du P. Trilles   », MC-1902-33. C’est pourtant la même que l’auteur joint à ses mémoires vingt ans plus tard.

307.

TRILLES, Deux ans de voyage dans le Congo Nord (ancien contesté franco-allemand-espagnol), Paris, Desclée de Brouwer et Cie, 1920, 190 p.

308.

OPM, G-67 Gabon, Rapport annuel adressé à l’œuvre, 1912, G 05828. Le RP Adam note le 12 août 1912, après l’échange de terres avec l’Allemagne : « Le pauvre Gabon cède toujours et que reçoit-il en retour ? Cherchez d’abord le royaume des cieux et le reste vous sera donné par surcroît. Je cherche ce surcroît et je ne vois que des dettes. En 1897 on nous a pris le Bas-Niger qui ne nous a laissé que ses dettes. Le 25 avril 1903, il en fut de même de nos belles missions de Bata cédées à l’Espagne. Aujourd’hui c’est le tour de Mouni. Que nous prendra-t-on encore dans quelques années ? ».

309.

BRIAULT Maurice, CSSp, Dans la forêt du Gabon, Paris, Bernard Grasset, 1930, p.166. Un chapitre entier est consacré au sentier.

310.

Ibid. , p.171.

311.

BRIAULT Maurice, CSSp, Dans la forêt du Gabon, op. cit , p.174.Concluant sur les routes apportées par les Européens, l’auteur affirme qu’elles auront « sans le savoir travaillé pour l’Evangile. Les grandes voies qui apportent un peu de lumière parmi les ténèbres de l’Afrique ».

312.

LE SCAO, « Au Loango », MC, 1908, n°2039, p.317.«  Loango (V.A.) », MC-1908-319.

313.

LABURTHE-TOLRA Philippe, « Les transports au Cameroun », pp.119-127, inPIROTTE Jean (dir.), Les conditions matérielles de la mission, Actes du colloque conjoint du CREDIC, de l’AFOM et du Centre Vincent Lebbe, Belley du 31 août au 3 septembre 2004, Paris, Karthala, 2005.

314.

AUGOUARD, 44 années au Congo, Evreux, Poussin, 1936, 512 p.

315.

BRIAULT M., Sur les pistes de l’AEF, Paris, éd. Alsatia, 1945, p.223-224. En fait, l’auteur démontre par cet exemple le caractère tout à fait probable des distances accomplies par les premiers évangélisateurs en Europe aux Ier et IIè s. que ses contemporains remettent alors en question. Ce témoignage choisi avec soin réhabilite les premiers missionnaires en même temps que les marcheurs africains.

316.

KOREN Henri, Les spiritains. Trois siècles d’histoire religieuse missionnaire, Paris, Beauchesne, 1982, pp.508-509.

317.

Voir une première carte des effets de la maladie du sommeil dans BRUEL Georges, L’Afrique équatoriale française, Paris, Larose, 1918, 558 p.

318.

Les terres de mission seront donc parfois les premières régions d’Afrique à recevoir les progrès permis par la révolution industrielle.

319.

L’image du missionnaire devait sans doute être associée à celle de son moyen de transport pour bon nombre d’Africains et son arrivée dans le village, au moment de sa tournée, devait assurément produire son petit effet.

320.

LABURTHE-TOLRA Philippe, « Les transports au Cameroun », op. cit., pp.125-127.

321.

En Angola, des photographies rapportées dans le calendrier Mission de la congrégation du St Esprit de 2002 attestent de cette utilisation : wagon tiré par 6 bœufs en 1900, le RP Mathurin Le Mailloux sur un navire dans le Nord-Angola, le wagon tiré par six bœufs après 1903, le RP Laaget et son catéchiste sur sa moto vers 1920, Mgr Louis-Alfred Keiliing au départ d’une tournée et au volant d’une automobile en 1923. Ce calendrier témoigne de l’intérêt apporté au déplacement : plus de 6 photographies sur 12 évoquent un missionnaire et son moyen de locomotion.

322.

Le RP Schulte, OMI, est pris en photo devant l’appareil avec son pilote. Testo-atalante illustrato delle missioni, Novara, 1932.

323.

SPINDLER Marc, « L’aviation auxiliaire des missions », pp.129-150, in PIROTTE Jean (dir.), Les conditions matérielles de la mission, Actes du colloque conjoint du CREDIC, de l’AFOM et du Centre Vincent Lebbe, Belley du 31 août au 3 septembre 2004, Paris, Karthala, 2005.

324.

Ce titre évoque l’ouvrage offert par le RP Jules Remy à Mgr Augouard en 1901 pour ses vingt années d’Afrique, au nom de tous ses confrères de l’Oubangui.

325.

Sur la correspondance d’Augouard : AUGOUARD, 28 années au Congo, Poitiers, Société française d’imprimerie et de librairie, 1905 ; 44 années au Congo, op. cit., Thèse récente d’Olivier OUASSONGO, Mgr Augouard et les missions catholiques du Congo français de 1878 à 1921, Université Aix-Marseille 1, janvier 2003.

326.

Deux jours pour le trajet Brazzaville-Kassaï alors qu’un navire met habituellement le double. AUGOUARD, 44 années au Congo, op. cit., «  Notes historiques sur la fondation de Brazzaville », pp.440-460.

327.

Ibid. p.465. Les termes sont extraits d’un sermon du RP Rémy.

328.

Rapport inédit de Mgr Augouard sur l’état du vicariat apostolique de l’Oubangui-Chari, adressé au préfet de la Propagande, présenté par COULON, « Le catholicisme et la vapeur au centre de l’Afrique » in Mémoire spiritaine, n°14, 2è semestre 2001, pp.82-89. Le vicaire en profite pour obtenir une aide pour construire un nouveau bateau, dont le budget s’évalue à plus de 100.000 francs, à part égale entre la construction et l’assemblage.

329.

Quelques plans du bateau se trouvent aux Archives OPM, Fonds Augouard, BoîteVIII, Dossier 17, plan du Pie X, 13 juin 1908, K01177.

330.

Archives OPM, Fonds Augouard, BoîteVIII, Dossier 18, Rapport quinquennal adressé à la Propagande, 1er janvier 1920, K1265.

331.

Chanoine AUGOUARD, Vie inconnue de Mgr Augouard, Poussin Evreux, 1934, pp.238-239.

332.

Mgr AUGOUARD, Carte fluviale de l’Oubangui, imprimerie Noblet, 1906, 35 feuilles au 1/50.000 ; avec le capitaine du Léon XIII, le RP LERAY, Carte fluviale du Congo, Imprimerie de Soy et Fils, 1908, 25 feuilles au 1/50.000è. Archives spiritaines, Fonds de Banville.

333.

Article de La Dépêche coloniale de Frédéric Lemoine, 1907, rapporté dans AUGOUARD, 44 années au Congo, op.cit¸ n°307. L’article écarte l’un des défauts majeurs de la carte qui est l’absence de bathymétrie, expliquant que les fonds du fleuve sont en formation perpétuelle et qu’il est préférable de s’en tenir aux éléments visibles et connus des missionnaires-navigateurs.