Le rôle des archivistes-bibliothécaires dans les congrégations

Ainsi, en l’absence de cartographie officielle, c’est à chaque congrégation que revient la tâche de produire un document permettant d’identifier sa mission. Cet exercice qui consiste en synthèses et mises à jour est accompli par l’archiviste-bibliothécaire, fonction assurée par un prêtre-missionnaire, attaché à la maison-mère dans chaque congrégation. Chargés d’archiver tous les documents envoyés par les missions-le plus souvent des lettres, mais aussi des dessins, des photographies et des cartes- ils incarnent la mémoire de la congrégation. On les sollicite quand survient un problème de juridiction. Habituellement, la correspondance ne retient que le nom du Supérieur. Mais parfois, celui-ci s’efface pour laisser s’exprimer directement le spécialiste, plus apte à défendre l’intérêt de sa Société. Il surveille l’évolution de chaque mission et en dresse l’image la plus récente et la plus précise qu’il conserve précieusement. C’est lui qui produit la carte pour réclamer une extension, un découpage ou une modification du territoire. Ainsi, en 1888, l’archiviste des Scheutistes à Malines, Pierre Lambert, adresse personnellement au congresso une carte et un texte sur les limites de l’Etat du Congo pour nourrir la demande d’un nouveau V.A.

L’archiviste-bibliothécaire effectue aussi un travail de mise à jour des cartes après chaque modification de la Propagande. Le nouveau document est ensuite diffusé, notamment auprès des organisations charitables qui réclament en permanence des précisions sur l’étendue exacte des champs d’apostolat560. L’archiviste cartographe remplit en quelque sorte le rôle que devrait jouer la Propagande, ce qui rend le document parfois discutable car chacun profitedu mutisme de Rome pour faire valoir ses intérêts. Il n’est donc pas rare de voir l’Œuvre de la Propagation de la Foi douter des informations cartographiées561 et demander à la Propagande précisions et confirmations562.

Notes
560.

« Les deux vicariats du Congo français », 1890, OPM, fonds Paris, G-35 Oubanghi, 4. La carte, transmise par le Supérieur Emonet, fait suite au bref du 14 octobre 1890 qui érige le nouveau V.A. On pourra remarquer que les limites au Nord-Est sont hors-cadre et qu’apparaît la mention « anthropophages », la seule information ethnique de toute la carte, pour rappeler sans doute les difficultés de la région que combat le RP Augouard.

561.

Comme de toutes les lettres qu’elle reçoit d’ailleurs, presque toutes annotées quand elles comportent une information administrative nouvelle, surtout quand elles sont adressées par les congrégations. Un lecteur chargé de dépouiller le courrier, écrit souvent « information sûre » ou « à publier » sur les documents qu’il a parcourus.

562.

Pour évaluer ce doute, on dispose de la correspondance entre la Propagande et l’Œuvre, soit près de 343 documents pour la période de 1868 à1883. La plupart du temps, il y est question d’un renseignement que Rome fournit à l’organisation qui préfère obtenir une confirmation : une modification territoriale, une nomination de v.ap.,.. Archives OPM, Correspondance avec la Propagande ; B-15 (1868-1873), B-16 (1874-1879), B-17 (1880-1883).