3.2. Bilinguisme et diglossie

Le terme de diglossie n’est pas le simple équivalent grec du terme d’origine latine bilinguisme. Ces phénomènes illustrent tous deux ce qui se passe lorsqu’il y a présence de deux codes dans une situation, que ces codes soient des langues distinctes ou des dialectes issus de la même famille. Leur différence essentielle réside dans le fait que la diglossie est un phénomène social, et les codes qui sont employés possèdent leur sphère d’utilisation, tandis que le bilinguisme est un fait individuel et dépend du locuteur et d’un certain nombre de facteurs se rapportant à lui 91 .

Le concept de diglossie « a été forgé pour nommer une situation sociolinguistique où deux langues sont bien parlées, mais chacune selon des modalités très particulières » (Boyer, 2001 : 47). Les multiples approches théoriques qui sont développées dès la fin du XIXe siècle, et qui sont brièvement reprises par Boyer, vont justement diverger sur ces modalités.

Psichari, helléniste français d’origine grecque, est le premier à utiliser ce terme en France, dans des études linguistiques, dès la fin du XIXe siècle. Pour lui, la diglossie est une « configuration linguistique » dans laquelle deux variétés d’une même langue 92 sont utilisées, mais utilisées de façon différente et concurrente parce que « l’une des variétés est valorisée par rapport à l’autre » (Boyer, 2001 : 48). Il est ainsi le premier à soulever le fait que le phénomène de diglossie pourrait être relié à une situation de domination, de décalage entre deux entités linguistiques.

Notes
91.

Il est à noter que dans l’usage ordinaire, le « bi-/plurilinguisme » s’applique aussi bien aux régions et pays qu’aux individus (cf. Petit Robert).

92.

Psichari se réfère à la situation de la langue grecque où cohabitent le catharevousa, variété savante, écrite et puriste, et le demotic, variété usuelle et populaire.