3.2.2.3. La reprise en écho

Un phénomène caractéristique du discours oral et de la conversation est intéressant à relever dans cette dernière partie, il s’agit de la reprise en écho. La particularité de la situation de contact de dialectes fait que la reprise en écho est également touchée par les adaptations, et n’est pas simplement monolingue comme dans la plupart des conversations. Nous en avons relevé quelques exemples dans le corpus Pâques :

l.168-175 : dans cet extrait, Martin répond à la question de NZ en reprenant la forme de la copule verbale utilisée juste avant par NZ, et Cathy reprend l’énoncé de Martin à l’identique, tous les deux ayant reproduit la même adaptation amenée par NZ.

Note 187. Nous avons surligné les formes dans la variante-source et la variante-cible que nous souhaitions mettre en valeur dans l’analyse.

l.181-185 : cet exemple est intéressant à étudier. Il s’agit là encore d’une paire question/réponse amorcée par NZ qui, toujours à propos du porte-clefs, demande à Martin en conservant sa variante occidentale combien il l’a payé. Ce dernier, dans sa réponse, souhaite s’adapter en reprenant la forme verbale utilisée par NZ dans sa question et en appliquant le bon morphème de personne (2e personne du singulier dans la question de NZ  1e personne du singulier dans la réponse de Martin), mais l’adaptation échoue puisqu’il utilise, par hypercorrection, un morphème qui n’est attesté dans aucune des deux variantes.

l.579-584 : nous avons ici un autre exemple de reprise en écho erronée. NZ pose une nouvelle fois une question à Martin qui, dans sa réponse, reprend un morphème lexical précédemment utilisé par NZ et typiquement occidental. Mais la réappropriation de ce terme ambigu dans la construction syntaxique de Martin débouche sur un parfait contresens.

NZ lui demande s’il a encore/toujours de la famille en Iran. A cela, Martin reprend le même terme et répond qu’il n’a encore personne pensant signifier qu’il n’a en fait plus personne en Iran. Ce malentendu est d’ailleurs bien soulevé par NZ qui, après un bref silence, se base sur la suite de l’énoncé de Martin (« je n’ai personne ») pour être sûr qu’il a bien compris ce qu’il voulait lui dire. Il produit alors une demande de confirmation en deux temps (Martin ne répondant que trop minimalement à sa première sollicitation) comme le montre la suite de l’interaction :

l.298-303 : ici, la reprise en écho se déroule à l’inverse. Cette fois-ci, c’est NZ qui reprend un segment du discours de Martin. Il répète à l’identique, et donc en arménien oriental, la prononciation de l’adjectif « plate ». Rappelons que les adaptations phonétiques sont extrêmement rares du côté des locuteurs OCC, et le phénomène de reprise en écho (avec modèle à l’appui) peut expliquer les rares cas observés.

l.304-310 : ce passage est également intéressant à étudier parce qu’il se produit une reprise en écho après adaptation. La plupart du temps, un interlocuteur dialectalement opposé reprend à l’identique (ou presque) un segment produit précédemment par le locuteur dans sa variante d’origine. Ici, c’est le contraire. NZ utilise un mot adapté de l’arménien oriental et ce mot est repris par Martin (donc dans sa variante-source) dans sa réplique.

l.312-315 : il se passe exactement la même chose dans l’exemple suivant. Martin produit une adaptation lexicale (mixte) à l’occidental dans son tour de parole, et ce mot est repris à l’identique par NZ (en rectifiant la prononciation), donc dans sa variante-source, dans son propre tour de parole.

Ces quelques exemples illustrant un phénomène caractéristique de l’oral laissent apparaître deux configurations possibles :