2.3.2.2. Lecture-écriture : typologie des textes

Fortier et Préfontaine (1989, p.289) affirment que « Suivant la nature du texte qu’il [le scripteur] doit écrire, les stratégies adoptées pour préparer, rédiger et réviser un texte changent. ». Effectivement, il est vrai que même si les étapes rédactionnelles restent les mêmes, leur application diffère d’un type de texte à l’autre. Par exemple, si nous prenons en main la rédaction d’un conte et celle d’une dissertation, nous pouvons noter des différences comme suit :

La dissertation et par conséquent le texte argumentatif, qui « vise à modifier les représentations ou les opinions du destinataire à propos d’un objet du discours. » (Reuter, 1996, p.121), demande à démontrer ou à réfuter une thèse en exposant des arguments, des justifications… Donc à l’étape de la planification, outre répondre aux questions communes à tous types de textes et permettant de cerner les paramètres de la situation de communication (à qui s’adresse le texte ?…), le scripteur se doit de faire un remue-méninges à propos du thème de rédaction afin de trouver des arguments et contre arguments pour sa thèse, de les étayer, de penser à élaborer une introduction dans laquelle son problème sera exposé…

Or, lorsqu’il est question d’écrire un conte, pratique qui s’inscrit dans l’ordre des textes narratifs et qui exige donc à exposer un évènement, des personnages, à créer un récit où l’objectif principal est de raconter une histoire susceptible d’être comprise par tous lecteurs sans chercher à influencer ses opinions, la planification diffère largement. En effet, pour planifier le conte il est tout d’abord nécessaire de réfléchir sur les cinq éléments relatifs au texte narratif qui sont (Guillotin, 2007) :

  1. La situation initiale : description des lieux, des personnages de la situation…
  2. L’évènement perturbateur : que va-t-il se passer ? Qu’est-ce qui va perturber la situation initiale ?
  3. Les péripéties : toute action qui va tenter de régler l’évènement perturbateur
  4. Le dénouement : dernière action qui va régler le problème survenu, l’évènement perturbateur  
  5. La situation finale : description de la nouvelle situation. Est-on revenu à la situation initiale ? Les personnages ont-ils changé ?

En ce qui concerne la mise en texte de la dissertation, il sera principalement requis du scripteur qu’il traite ses arguments et contre arguments à travers plusieurs paragraphes. Ceci peut se manifester selon un plan dialectique (thèse/antithèse/synthèse), selon un plan analytique (cause/conséquence), un plan comparatif (notion comparé 1/ notion comparée 2 / synthèse) ou thématique (différents paragraphes soutenant la thèse).

Quant à la mise en texte du conte, elle sera beaucoup plus simple : les éléments relatifs au texte narratif apparaîtront au fur et à mesure que progressera le texte. Par ailleurs, le narrateur aura ici le choix de s’inscrire ou non dans son histoire (usage du “Je” ou du “Il”); alors que dans la dissertation il doit être neutre (usage du “Nous”).

Pour la révision, la différence entre ces deux types de textes sera que les questions comme : “Ai-je bien annoncé mon sujet, mon plan?”, “Est-ce que j’ai un paragraphe pour chacune de mes idées?” seront valables pour la dissertation mais pas pour le conte. Pour ce dernier, le scripteur devra se concentrer davantage sur sa structure, de voir s’il a bien respecté les cinq éléments relatifs au texte narratif.

Certes, tout comme nous l’avions précisé pour la planification, lors de la mise en texte et la révision il existe des questions communes pour tout texte, telles la cohérence, la réécriture linguistique…, que l’apprenant doit se poser aussi bien lorsqu’il est question de la dissertation que du conte.

Ainsi, à la lumière de tout cela, notre constat est que seul l’enseignement du processus de production écrite, même explicite et approvisionné de grilles autoévaluatifs, ne serait suffisante, quoique essentiel, pour remédier aux problèmes, difficultés qu’éprouvent les scripteurs en expression écrite. Nous pensons que ce travail indispensable devrait être accompagné d’une familiarisation des apprenants avec les types de textes afin de les rendre capable d’en écrire de semblables. D’ailleurs Peytard & Moirand (1992, p.51 cité par Mangenot, 2000, p.190) soulignent qu’en langue étrangère « il serait vain d’essayer de faire produire des textes avant d’en avoir donné à lire de semblables dans la langue qu’on apprend, parce que l’exercice implique une appropriation préalable des modèles textuels étrangers ». En fait, il revient ici à bien faire comprendre aux apprenants que la lecture et l’écriture sont dans une interaction constante et que pour écrire il faut connaître, comprendre les caractéristiques des textes.

Cependant, l’emploi de textes finis pour aboutir à la rédaction de textes bien formés ne doit pas se limiter à une simple lecture : Proposer aux apprenants des textes variés et leur demander d’en rédiger ne serait être profitable et aboutirait même à du recopiage. Ce dont il est question ici, c’est de manipuler ces textes avec les apprenants, de leur montrer les étapes d’élaboration qui se cachent derrière le produit fini, d’en faire l’ébauche, d’en dégager la structure afin de mettre à jour le “squelette “ du texte et ceci pour chaque type de texte. Un tel travail permettra de :

Par ailleurs, comme étudier la structure des textes entraîne également l’apprenant à en faire la lecture, ce travail apportera aussi les avantages suivants :