Bien que les piémonts volcaniques soient modérément peuplés, la périurbanisation et la structure vieillissante du peuplement transforment la vulnérabilité.
Avec la première diminution de la population depuis la fin de la seconde guerre mondiale, le pays a franchi un cap. Lors du fort séisme de Kashiwazaki166柏崎, le 16 juillet 2007, les onze victimes avaient toutes plus de 70 ans. Un journaliste notait que déjà lors du typhon n°4 de la semaine précédente, la plupart des victimes à Kyûshû avaient plus de 65 ans. Lors du violent tremblement de terre qui avait déjà frappé Niigata en 2004, les deux tiers des victimes succombèrent au stress, pour moitié durant l’évacuation même167. Le séisme « a frappé une ville avec une forte proportion de retraités et de personnes âgées, moins capables que les jeunes résidents de survivre à de grandes catastrophes ou de surmonter le traumatisme de leurs répercussions […]. Une population qui vieillit pourrait requérir d’amples transformations de la stratégie d’aide aux survivants, de l’offre de repas faciles à digérer […] à la mise à disposition de refuges permettant plus d’intimité et des soins spécialisés »168.
Le cas de Kashiwazaki n’est pas isolé. Le rapport du ministère des affaires intérieures et des communications de septembre 2007169 indique que les plus de 65 ans sont estimés à 21% de la population (27,44 millions de personnes), dont un quart d’octogénaires (plus de sept millions). Selon ces prévisions, en 2015 la proportion de personnes âgées frôlerait 27% de la population. Ce phénomène résulte directement de la longévité japonaise et de son progrès, comme de la faiblesse de la natalité, qui ne permet plus d’assurer le renouvellement des générations170 (figure 3-2).
D’après Ritô sentâ (2004a)
Le phénomène est bien sûr moins apparent dans les villes, qui aimantent les jeunes actifs, qu’à la campagne, régions volcaniques incluses. Il est aussi plus prononcé dans les ritô où la surreprésentation des aînés est accentuée, notamment chez les femmes, tandis qu’un déficit des classes correspondant aux jeunes adultes est patent. Le cas de ces îles est particulier, puisqu’on observe, dans le même temps, une surreprésentation des moins de quinze ans, ce qui semble indiquer une fécondité plus élevée que la moyenne (figure 3-3).
En outre, les situations sont très variables d’une île à l’autre, comme le prouve la comparaison entre les îles volcaniques étudiées (tableau 3-2). Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les îles les plus éloignées et les plus petites ne sont pas les moins dynamiques démographiquement, ce qui conduit à relativiser la portée des facteurs éloignement et taille. Cette remarque peut s’appliquer, on le verra dans le dernier chapitre, au dynamisme local dans son ensemble.
population totale (2000) | ≤ 14 ans | 15-64 ans | ≥ 65 ans | |||
Iô-jima | 150 | 23 | 15,3% | 89 | 38 | 25,3% |
Suwanose-jima | 74 | 18 | 24,3% | 50 | 6 | 8,1% |
Aoga-shima | 203 | 40 | 19,7% | 137 | 26 | 12,8% |
Miyake-jima * | 3 857 | 678 | 17,6% | 2 044 | 1 135 | 29,4% |
Ritô | 735 752 | 116 347 | 15,8% | 420 384 | 198 545 | 27% |
Japon (milliers) ** | 126 926 | 18 472 | 14,6 | 86 220 | 22 005 | 17,3% |
* Données de mai 2000 ; après la levée de l’évacuation, la population de l’île se stabilise autours de 2 900 habitants, dont plus du tiers de plus de 65 ans (2006). ** Tôkeikyoku : http://www.stat.go.jp/. |
D’après Ritô sentâ (2004a). *Hoshikawa (2006) et Perrin (2008).
À Miyake, le vieillissement s’est accru avec la dernière éruption, car seulement 40% des moins de trente ans sont revenus, contre 80% des plus de 50 ans… D’après Hata Kôji (directeur du bureau sabô de Shimabara), autour du mont Unzen également, l’évacuation entre 1991 et 1995 a déclenché des départs définitifs sélectifs, concernant surtout les jeunes.
Cette situation impose de repenser les modalités et les conditions d’évacuation, et pourraient bien réduire à néant les plans de prévention basés sur une évacuation autonome et ordonnée des résidents. C’est moins la limite d’âge des 65 ans qui compte, car c’est un âge encore jeune où la plupart des personnes conservent vigueur et autonomie, que la réduction de la mobilité et la dépendance qui change la donne. À ce titre le « survieillissement » ou « hypervieillissement », marqué par la hausse des plus âgés de la société est une donnée déterminante (figure 3-4). Comme les régions volcaniques font souvent parties des périphéries rurales, et que les évacuations à cause des éruptions peuvent durer des mois voire plus, la question est cruciale. Cette situation et ses implications devraient être étudiées plus avant, d’abord parce que des aléas aux implications similaires, notamment les séismes ou les typhons, menacent les régions rurales. L’autre enjeu concerne une échelle plus vaste, car ce vieillissement est l’horizon démographique de la plupart des pays développés.
Ville côtière de près de 100 000 habitants qui fait face à l’île de Sado佐渡が島, dans le département de Niigata. Le séisme off shore du 16/VII/2007 (Niigata-ken Chûetsu Oki jishin新潟県中越沖地震)eut une magnitude de 6,6. La centrale nucléaire voisine, d’une capacité supérieure à huit gigawatts, subit des fissures et a été arrêtée depuis. 13 000 personnes ont été évacuées et plus d’un millier ont été blessées.
Fackler (2007).
Ibid.
http://www.stat.go.jp/data/topics/topi241.htm. Enquête réalisée par le bureau de la statistique à l’occasion du keirô no hi, 敬老の日« jour des personnes âgées », le 16/IX/2007. Tôkeikyoku (2007).
D’après les données du ministère du Travail et de la Santé Publique (厚生労働省Kôsei rôdô shô), en 2007, le taux de natalité est de 8,8‰, et l’indice synthétique de fécondité de 1,34 enfants par femme (après avoir chuté à moins de 1,29 en 2004).