II. Pratiques et représentations traditionnelles du volcan et de la montagne

La relation concrète la plus évidente entre volcan et société est celle de l’antonymie, car chacun est localisé sur un territoire distinct et s’excluent l’un l’autre. Mais cet éloignement a aussi une dimension idéologique, culturelle et religieuse. Historiquement, la plaine a toujours eu le primat sur la montagne dans les logiques d’occupation et d’utilisation de l’espace. A. Berque a montré que les espaces montagneux (pentes supérieures à quinze pourcents), qui représentent pourtant les trois quarts du territoire, restent un potentiel (en termes de ressources, d’aménités) peu valorisé au Japon426. Des mesures précoces de protection de la forêt face à la vigueur de l’érosion, la marginalisation de l’élevage au profit de la pêche, le développement de la riziculture, ont contribué à la densification démographique puis à la concentration du fait urbain en plaine, tandis que les activités de montagne restaient peu peuplantes (exploitation du bois, chasse). La montagne, irréductiblement « à part », avait « ses maîtres, ses gardes, ses familiers, ses exclus – et aussi ses rites de passages », et même son « dialecte », le yamakotoba 山言葉, utilisé par des chasseurs du Tôhoku lorsqu’ils entraient en montagne427.

Notes
426.

Berque (1980a) p. 158 et (1982) p. 92 sq.

427.

Ibid. (1980a) p. 158.